Certaines bactéries nous agressent, d'autres nous protègent. C'est le formidable constat qu'on fait différents scientifiques dès la fin du XIXe siècle. À ces micro-organismes amis, on a donné le nom de probiotiques, un terme-concept qui désigne la capacité de certaines bactéries à rester vivantes le temps de leur passage dans notre lumière intestinale. Actifs, ces germes agissent en renforçant l'immunité du corps. Parmi eux, des bactéries lactiques dont certaines grandes souches ont été identifiées pour le rôle majeur qu'elles jouent dans le système digestif. Au sein des lactobacilles, Lactobacillus rhamnosus (LGG) a ainsi fait l'objet de plus de 800 études scientifiques. C'est l'une des premières souches reconnue comme ayant un impact sur la réponse immunitaire. Une espèce très proche, Lactobacillus casei est devenue célèbre sous l'impulsion de l'industrie agro-alimentaire qui en a fait une star des rayons de produits lactés. D'autres lactobacilles telles Lactobacillus acidophilus ou Lactobacillus bulgaricus ont également fait leur preuve en termes d'immunité. Les bifidobactéries – breve, infantis, bifidum, regularis, entre autres espèces – constituent un autre genre de bactéries lactiques très efficaces pour la défense du corps. Beaucoup d'entre elles ont été relevées chez l'enfant. Autre souche à avoir fait ses preuves, Streptococcus thermofilus dont seule l'association avec Lactobacillus bulgaricus autorise un produit à porter le nom de « yaourt ».
Heureuse contamination
Présents chez la mère, ces micro-organismes sont transmis au bébé au moment de la naissance. L'intestin du nouveau né, stérile durant toute la gestation, va être colonisé par les bactéries présentes dans les bactéries fécales et vaginales de l'accouchée. Dès lors, débute une étape essentielle pour l'immunité de l'enfant. C'est la phase d'apprentissage, de maturation, durant laquelle le système immunitaire intestinal se met en place en réponse à l'agression que provoque l'arrivée des bactéries lactiques. Stimulée, la réponse immunitaire va se constituer et se renforcer au fil des jours. « Sans ce contact essentiel entre les bactéries maternelles et l'enfant, l'implantation de la flore microbienne et la maturation du système immunitaire ne peuvent s'effectuer correctement », explique Christian Latgé, responsable Développement Nutrition à l'Institut de Recherche Pierre Fabre. « Les enfants nés par césarienne sont souvent moins bien armés face à certaines affections ». Une fois initiée, la flore intestinale appelée aussi microbiote, n'aura de cesse de se renouveler, construisant ses défenses sous l'effet des agressions microbiennes.
« Chez l'adulte, 70 % des cellules immunitaires appartiennent au système digestif ce qui fait de l'intestin le premier organe de défense de l'organisme ». Ce bouclier immunitaire agit de deux façons : 90 % des organismes vivants du corps sont des bactéries qui se trouvent en très grande quantité dans l'intestin. Ainsi estime-t-on la population bactérienne du microbiote à 100 000 milliards. Le nombre faisant la force, les quelques dizaines ou centaines de milliers de germes potentiellement infectieux apportés de l'extérieur – quand on mange une pomme par exemple – ont très peu de chance de pénétrer des parois intestinales aussi bien gardées ; mais les probiotiques ont un autre rôle qui consiste à stimuler en permanence les cellules du système immunitaire qui répondent en se défendant, entretenant ainsi un dialogue salutaire pour la santé.
Modes d'action
Selon le genre auquel elles appartiennent, les bactéries lactiques participent différemment au processus. « On pense que les lactobacilles, comme les streptocoques, agissent plutôt par stimulation directe du système immunitaire. Les bifidobactéries, pour leur part, favoriseraient le développement du bouclier bactérien ». Du fait du nombre colossal de bactéries qui composent le microbiote, il est très difficile de définir l'impact précis que peut avoir une espèce particulière de probiotiques. « C'est d'autant plus vrai qu'ils produisent des réactions en cascade et que leur durée de vie – quelques heures - est très courte ».
C'est pourquoi la flore intestinale est étudiée sous l'angle des grandes familles de bactéries qu'elle abrite mais aussi sous celui du microbiote dans sa totalité. « Une chose est sûre, en matière d'immunité, on a tout intérêt à privilégier une flore diversifiée, combinant les propriétés des différentes souches les pus reconnues ». On peut les consommer sous forme de produits alimentaires fermentés (yaourts, fromages, boissons à base de fruits fermentés par des bactéries…) ou de compléments alimentaires. « L'important est d'ingérer les probiotiques en quantité suffisante, pas moins d'un million - ce qu'un yaourt arrive à fournir – et en prise régulière, du fait de la durée de vie très courte de ces micro-organismes, pendant au moins un mois ». En cas de diarrhée où le microbiote est éliminé avec l'eau des selles, il faut renouveler la prise plusieurs fois au quotidien et se traiter pendant quelques jours.
À l’officine, on retrouve-ra principalement les probiotiques sous forme de compléments alimentaires à visée digestive – Alforex et Bifibaby (Symbiosys), Lactibiane (Pileje), Smebiocta (Ipsen), Arkobiotics Supraflor et Arkolevure (Arkopharma), Ergyphilus Confort (Nutergia), Probiolog et Probiolog Fort (Mayoly Spindler), Physiostim et Physionorm (Immubio), Biogaia Protectis (Pediact), Probioregul + (Nutravance), Ultra-baby (Biocodex), centrés sur l’immunité et la vitalité dans les gammes Imunivair (Therabel), Defencia (Symbiosys), Activ 4 (Naturactive), Immunostim (Urgo) et Bion 3 (Merck Médication Familiale)… Les formules avec AMM composées de levures (notamment Saccharomyces boulardii) ou de ferments lactiques sont, entre autres, représentées par Ultra-Levure (Biocodex), Lactéol (Adare Pharmaceuticals), Bacilor (Alpha Wassermann Pharma), Carbolevure (Pierre Fabre Health Care).
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