Financement

L’officine a besoin d’argent frais

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Publié le 29/10/2018
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Pour mettre en application les nouvelles missions, l’Union des groupements de pharmaciens d’officine (UDGPO) n’en démord pas. Petites et moyennes officines ont besoin d’un apport financier. Mais comment l’obtenir ?

La mutation du métier est profonde mais, d’après Laurent Filoche, elle risque de profiter aux grosses officines si rien n’est fait en faveur des petites et moyennes qui constituent, le rappelle-t-il, « le gros du marché » mais surtout qui « font le maillage du territoire et la force de notre profession ». Il n’est donc pas question de les abandonner au bord du chemin. « Il faut une transformation radicale des points de vente physiques, de trop nombreuses pharmacies ne disposent pas encore d’espace de confidentialité par exemple », ce qu’exigent un grand nombre de nouvelles missions, souligne le président de l’UDGPO.

Pour y parvenir, il faut « de l’argent frais ». Sans trancher, Laurent Filoche cite deux possibilités : la levée de fonds ou un mécanisme coopératif. « Il faudra trouver une solution car nous sommes tous dans le même bateau, que ce soit la répartition, les groupements ou les officines. Il nous faut nous parler, nous allier pour in fine offrir un meilleur service au patient. » Il prévient néanmoins que le but doit être la consolidation du réseau, et non l’intérêt individuel. Et qu’il ne faut surtout pas marcher sur les plates-bandes de l’autre. « Quand les grossistes veulent racheter des officines ou des groupements, cela fonctionne rarement car ce n’est pas leur métier. De même quand les groupements veulent se lancer dans la logistique en créant des centrales d’achat pharmaceutique (CAP), les succès sont rares. » Sa préconisation ? Que chacun reste dans son rôle « pour que la profession de pharmacien en sorte grandie et puisse effectuer sa mutation dans les meilleures conditions possible ».

Déstabilisation

Selon l’économiste de la santé Jean-Jacques Zambrowski, « s’il y a un besoin de financement, il faut que ce soit les professionnels de santé, en l’occurrence les pharmaciens, qui trouvent le moyen de permettre à ceux qui en ont besoin d’évoluer. La seule solution logique et honnête reste à inventer ». En tout cas, l’ouverture du capital n’est pas la solution pour le président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) Gilles Bonnefond. L’indépendance et le maillage territorial ont permis de faire émerger le pharmacien « comme professionnel de premier recours aux yeux des pouvoirs publics et de la population confrontés à la désertification médicale et infirmière », souligne Bernard Charles, des Laboratoires Pierre Fabre.

Joël Lecoeur, expert-comptable du réseau CGP, fait la distinction entre « l’officine business et la pharmacie de services ». Face à la menace des fonds de pension qui tentent d’approcher certains confrères, il soumet une proposition. « Les fonds de pension ne sont pas attirés par les pharmacies de services car ils cherchent le rendement, pourtant ce qui les attire c’est la croix verte, le médicament remboursable. Si une pharmacie voit moins de 50 % de son chiffre d’affaires issu du remboursable, il suffit de décrocher la croix verte, ce n’est plus une pharmacie. C’est une manière de traiter le problème de l’ouverture de capital, celui des fonds de pension, et cela sécurise le réseau. Il faut en tout cas agir en urgence car des groupes financiers qui n’ont rien à faire dans le monde de la pharmacie sont en train de déstabiliser le réseau ! »

Mélanie Mazière

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 3469