1,745 million d’euros, c’est le montant qu’a dû débourser en moyenne un candidat à l’installation pour détenir sa pharmacie en 2023, selon les statistiques présentées par le réseau CGP. Un prix en baisse de 165 000 euros par rapport à 2022, mais bien supérieur à ce qu’ont connu les années antérieures. Car ramené en multiple de l’EBE, ce prix équivaut au facteur 7,28. Du jamais vu sinon pendant l’année hors norme de 2022 où il atteignait 7,45.
Cet infléchissement se retrouve quand le prix est appréhendé en pourcentage de chiffre d’affaires, soit désormais 83 %, contre 88 % un an auparavant et 85 % en 2021. Pour Bastien Legrand, vice-président du réseau CGP, cette baisse est normale et mathématique, compte tenu de la poussée des médicaments chers. Il n’en reste pas moins que le marché se maintient à un niveau élevé. Pas d’emballement, toutefois, tempère l’expert-comptable. « Non seulement ces statistiques n’incluent pas les pharmacies qui ne se vendent pas mais elles recèlent aussi des ventes effectuées fin 2022, début 2023. Or depuis nous observons une baisse de prix qui devrait être encore plus marquée au cours de cette année. »
Il est légitime de s’interroger sur la capacité du marché à maintenir ce niveau de valorisation face aux difficultés économiques du réseau, matérialisées par un nombre croissant de fermetures. Les vendeurs pourront-ils maintenir leurs prétentions dans le contexte de baisse de marge que l’on connaît depuis l’année dernière ? Sans compter que la relève se fait désirer ? « Nous perdons des clients, déplorent les experts-comptables, ils ne trouvent pas de repreneur et doivent se résoudre à fermer pour prendre leur retraite. » La cause ? Contrairement aux idées reçues, davantage que la perte de la rentabilité intrinsèque de l’officine, le manque d’attractivité des implantations est le premier facteur de ces fermetures sèches.
Autre facteur, la course à la taille nécessaire aux regroupements, eux-mêmes induits par des impératifs d’économies d’échelle et la mise en œuvre des nouvelles missions, va nourrir cette tendance de fond, et même l’accélérer. Sous ces différentes pressions, il se pourrait que le maillage territorial perde à nouveau en densité, et s’oriente vers un tissu de pharmacies de tailles plus importantes. « Des pharmacies qui se vendent et qui correspondent à ce qui se recherche, soit des officines d’un chiffre d’affaires de 1,5 à 3,5 millions d’euros », constate Bastien Legrand. Autre angle mort : le coût des frais financiers qui ne figure pas dans les prix de cessions indiqués. Or aujourd’hui le volume financier disponible pour le pharmacien est plus faible s’il achète son officine 7,28 fois l’EBE qu’il y a un an quand ce facteur atteignait 7,45. L’expert-comptable pointe par ailleurs la situation précaire des jeunes installés qui doivent intégrer les coûts financiers dans un contexte de baisse de marge. « Ils ne disposent pas, à l’inverse de leurs aînés, d’un matelas et doivent dès leur premier exercice faire face à une baisse de trésorerie. » Autant d’arguments qui plaident en faveur d’un retour à la raison des prix de cessions.
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