Bien que ralentie par rapport à 2022, la progression des frais de personnels observée l’année dernière atteignait 8, 9 et même 12,8 points selon les cabinets. « La tendance ne pourra être freinée de sitôt », prédit Bertrand Cadillon, responsable du département pharmacie chez Fiducial. « À l’image d’un bateau qui continue sur son sillage, le marché va poursuivre sur une certaine inertie. »
Car ces hausses des coûts salariaux s’ajoutent à un socle qui a connu vingt points d’augmentation en deux ans, relèvent les experts. « Faute de bras, les pharmaciens ont cédé sur les salaires et nous constatons un surenchérissement du coefficient à l’embauche et un nivellement par le haut des salaires du reste du personnel », observent-ils. Les titulaires seraient-ils otages de leur politique managériale ? « Ils n’ont pas attendu les augmentations de la grille pour effectuer des hausses de salaires, sinon ils savent qu’ils ne parviendront pas à recruter. Dans cette situation, ils ne peuvent se tenir aux salaires minimum », relève Joël Lecoeur.
Une marge d’optimisation
Cependant, le réseau officinal se dirige vers des niveaux de marge tels qu’il sera désormais difficile de continuer à rémunérer correctement le personnel, la masse salariale d’une officine représentant 37 % de la marge. « Les syndicats de titulaires ont raison de maintenir leur position. Une gestion sur les deux ou trois prochaines années doit être observée », préconisent les experts-comptables. Ainsi, la marge brute doit être l’indicateur 100 de l’économie officinale et également l’indicateur de productivité. Il faut désormais raisonner en marge brute par salarié.
Les titulaires disposent-ils encore une marge ( !) de progression ? Emmanuel Leroy en est convaincu. Il cite ainsi plusieurs leviers : la formation, l’optimisation du planning dans le respect des contraintes, la planification des amplitudes horaires pour remplir les nouvelles missions… Bastien Legrand, vice-président de CGP, évoque quant à lui la chasse aux tâches chronophages sans valeur ajoutée. Quand un titulaire ne fait pas de comptoir, car il fait de l’administratif, est en rendez-vous avec les fournisseurs, il n’accorde pas de temps à ses équipes, ni à ses patients. Bertrand Cadillon renchérit : « Les pharmaciens sont les premiers à dire qu’ils manquent de temps, c’est le premier constat chez eux. Sur cette piste-là, il y a des progrès à faire. Nous avons sélectionné dans notre échantillon des officines équipées de robots et d’étiquettes électroniques. Le pharmacien devra demain déléguer davantage, la gestion des achats, la gestion de sa comptabilité, pour se libérer du temps médical. Il devra par ailleurs se pencher demain sur les ressources dont il dispose dans son officine. C’est un métier, celui de manager. »
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