Les génériqueurs ont peut-être une place spécifique à assumer dans les campagnes de communication autour de la santé publique. C’est en tout cas la position commune de deux d’entre eux, et pas des moindres, les Laboratoires Arrow et Biogaran. « Notre portefeuille concerne la majorité des aires thérapeutiques, justifie ainsi Priscilla Daurat Godde, directrice marketing BU Officine d’Arrow, et cela nous permet d’aller au-delà des pathologies et nous donne la possibilité de communiquer plus largement sur des thèmes de santé publique. » Pour Pascal Brière, président de Biogaran, l’image des laboratoires pharmaceutiques est très liée à celles de leurs médicaments. Libérés de cette image, les génériqueurs peuvent aborder plus facilement des thématiques de santé publique plus larges. Constat plus nuancé pour Jean-Louis Anspach, président de Teva, pour qui cette spécificité n’est pas aussi claire : elle incombe aussi bien aux laboratoires pharmaceutiques « traditionnels » qui fabriquent des médicaments princeps qu’aux génériqueurs. Il importe de travailler au-delà du médicament et de porter l’attention sur l’observance. « Les différentes crises autour des médicaments nous ont conduits à nous positionner sur une communication plus centrée sur le bon usage du médicament, quel qu’il soit. » De fait, certains génériqueurs sont aussi fabricants de médicaments princeps, c’est le cas de Teva, et l’on imagine bien qu’ils ne vont pas orienter leur communication de façon différente. Ce qui compte, c’est l’image de marque globale que la société peut laisser dans l’esprit des patients.
Une liberté porteuse de risques
Mais aller au-delà du médicament suppose de bien cerner les sujets sur lesquels il faut communiquer. Car cette liberté offerte est aussi un risque, il faut savoir cibler ses campagnes. « Si on en fait trop, on n’est pas efficace », affirme Jean-Louis Anspach. Chaque laboratoire a sa propre stratégie. Mylan, par exemple, cherche à se mettre à la place des patients et en conclut que pour eux, trier les informations disponibles sur la santé n’est pas toujours facile. « Nous choisissons des thématiques dont les patients ont une mauvaise connaissance », explique Grégory Moses, responsable de l’unité prescription chez Mylan. « Ainsi en est-il de la prostate, une problématique certes connue, mais de façon partielle, car si l’on reconnaît volontiers les symptômes d’un dysfonctionnement, la prise en charge laisse à désirer. Il en est de même pour la vitamine D, beaucoup de patients savent qu’elle est essentielle pour la santé, mais beaucoup aussi ignorent à quoi elle est utile et comment l’assimiler. » D’où l’accent mis par Mylan sur ces deux sujets par le biais de campagnes de communication initiées à la fin de l’année dernière.
Pour Biogaran, la préoccupation est de satisfaire un besoin qui ne l’est pas. Le laboratoire a ainsi choisi de communiquer sur la nutrition dans le domaine du cancer. « Personne n’a pris ce sujet difficile par le biais du plaisir, on sait que les effets secondaires des traitements sont handicapants au niveau de l’alimentation, aussi proposons-nous des recettes conçues par des grands chefs cuisiniers en lien avec des oncologues afin de redonner de l’appétence aux repas », explique Pascal Brière.
Un message doit être délivré 7 fois
Le besoin en question n’est pas forcément lié à une pathologie donnée. Teva se positionne par exemple beaucoup sur l’observance et le bon usage des médicaments, et cible notamment les aidants. Pour sa part, Biogaran a spécifiquement créé une boîte à traitement conçue par un designer de telle sorte qu’elle plaise aux enfants de familles monoparentales ou recomposées pour qu’ils puissent avoir leurs traitements lors de leurs déplacements. Certes, cela va au-delà de la stricte communication, mais les prestataires en ont une définition large, pour certains, comme Arrow, une campagne de communication s’inscrit forcément dans une dynamique où les messages sont relayés par des actions concrètes. Pour que ces campagnes soient efficaces, il faut les déployer dans l’espace (lire encadré ci contre) et le temps. Mylan prévoit par exemple pour les deux opérations précitées une durée d’environ 18 mois. « Un message doit être délivré sept fois avant d’être entendu », rappelle Jean-Louis Anspach. Il reste aussi à identifier les bons moments, dans certains cas cela peut être n’importe quand, dans d’autres, il faut savoir cibler en fonction de critères comme la saisonnalité ou des dates liées aux grandes campagnes nationales ou mondiales.
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