Si continent oublié il y a, les pharmaciens ont de fortes envies de l’explorer. Il faut dire qu’il y a actuellement un développement important des outils susceptibles de les y aider. L’époque est favorable, les technologies sont là, les besoins sont énormes, compte tenu du vieillissement de la population et de l’augmentation du nombre de personnes en perte d’autonomie. Parmi elles, les patients les plus fragiles, isolés, pas forcément ciblés en tant que tels, mais qui de fait seront parmi les principaux bénéficiaires de tous les projets en cours. Que cela concerne le MAD, la télé-assistance, le portage de médicaments ou encore la télé-médecine, des solutions sont proposées et de nombreuses expériences ont été lancées pour vérifier le bon usage des technologies, la relation humaine et professionnelle nécessaire à leur bon déploiement, jusqu’à tester les tarifs, et évaluer ce qui est acceptable par tous.
Le MAD, toujours plus vite et plus loin
Pour les personnes fragiles et isolées, la présence de matériels susceptibles de les maintenir à domicile est quasiment une évidence. Et depuis longtemps déjà, les pharmaciens font office d’intermédiaire. Mais désormais, il faut aller vite, et partout. C’est le sens du partenariat qu’a noué Phoenix Pharma avec le spécialiste du MAD ABM Pharmareva. « Cela nous donne la possibilité d’être très réactif », commente Marine Charlery, responsable et expert MAD du grossiste-répartiteur. La réactivité est d’autant plus vitale aujourd’hui que les pharmaciens se positionnent dans les processus d’hospitalisation à domicile, si bien que leurs partenaires doivent être prêts au moment de la sortie d’hôpital de ces patients. Une affaire de réactivité et de logistique, oui, mais aussi de largeur de catalogue. « Certes, les pharmaciens ont toujours eu accès à des matériels pour le MAD, mais souvent avec un nombre limité de modèles, de tailles, et de références, aujourd’hui, l’offre est beaucoup plus globale », poursuit-elle. Autre élément important à prendre en compte, la formation des pharmaciens, d’abord parce que sauf spécialisations, le MAD est assez peu enseigné durant les études de pharmacie, d’où le besoin de nombreux pharmaciens de s’informer quant à l’adéquation des matériels avec les pathologies de leurs patients. Mais ce n’est pas seulement dans cet objectif qu’il faut former. Jean-Baptiste de Coutures, le président du groupement Giphar qui dispose également d’une offre importante dédiée au MAD, estime indispensable de s’adapter parfaitement au profil du patient. « Il ne faut pas aller trop vite, et proposer les matériels et médicaments qu’il faut, explique-t-il, et cela nécessite beaucoup de psychologie, nous devons aussi former nos adhérents à cela. »
La télé assistance de plus en plus performante
Aider une personne âgée à domicile nécessite d’être en lien avec elle, et ce n’est pas le rôle du pharmacien. Mais d’autres le font à sa place, les plateaux de télé assistance se développent fort, grâce notamment aux technologies numériques qui permettent d’affiner ce lien. Les plus caractéristiques sont liées aux bracelets connectés susceptibles d’alerter les aidants ou les professionnels de santé des problèmes rencontrés par les personnes âgées en difficulté. Parmi les prestataires investis dans cette activité de télé assistance, on retrouve souvent des compagnies d’assurances, qui, on le sait, souhaitent jouer un rôle majeur dans la prévention. L’une d’entre elles, Arkea Assistance, filiale du Crédit Mutuel, s’est associée à Giphar pour pouvoir intervenir auprès des patients équipés d’un système d’assistance. Cela fait partie d’un partenariat regroupant MAD et assistance, un concept d’offre globale cher à Jean-Baptiste de Coutures. « Notre objectif est de mettre en relation des entreprises capables de tout mettre en œuvre pour que les personnes âgées puissent rester chez elles », précise-t-il. Cela peut inclure des corps de métier très divers, comme les artisans qui viennent aménager le domicile des patients.
Un autre exemple montre comment on peut aider les patients fragiles et isolés, celui du groupement Pharmavie qui a lancé une expérience en Rhône-Alpes pour tester un système d’assistance basé sur la solution de la société Lili smart. Celle-ci est centrée sur les aidants, les familles, souvent surmenés par la maladie de leurs proches. Des capteurs sont placés à différents endroits du domicile des patients, lesquels sont équipés d’une montre connectée par GSM. Toute anomalie constatée dans les mouvements du patient est répercutée sur le smartphone des aidants. « Venir en aide aux aidants permet de mieux soutenir les patients », résume Laurence Dubois, directrice développement commercial de Pharmavie. La pharmacie représente un relais très fort pour ce type de solution, estime-t-elle. Le groupement décidera vers la fin du mois de janvier du référencement de cette solution, selon les résultats de son expérimentation.
Le portage de médicaments à l’essai
Pour les personnes dépendantes et isolées, le portage de médicaments est idéalement une solution adéquate qui leur apporte un vrai confort. Et c’est une réalité si l’on en croit Jean-Baptiste de Coutures puisque certains pharmaciens portent eux-mêmes, ou font porter par des membres de leurs équipes les médicaments chez ces patients en manque d’autonomie. Mais c’est une réalité relativement marginale qui ne peut être généralisée. Des solutions sont actuellement expérimentées pour vérifier la viabilité du portage de médicaments à grande échelle par différents prestataires. On peut évoquer le service déjà opérationnel par la société Pharma Express qui distribue les médicaments hors ordonnance sur Paris et certaines communes de la petite couronne. La start-up teste également la vente de médicaments sur ordonnance en utilisant l’ordonnance numérique. Citons également les projets ambitieux de la Poste qui elle aussi expérimente différentes solutions. Dans la région bordelaise, elle livre des médicaments sur ordonnance via une plateforme Internet qui met aussi en relation le patient avec la pharmacie, lesquels peuvent dialoguer par l’intermédiaire du web. De même, la Poste teste un système de livraison de médicaments à Marseille avec le groupement Pharmabest qui a plutôt fait le choix d’une application smartphone pour gérer la commande et la livraison. La difficulté auxquels se heurtent ces différents projets reste encore et toujours les tarifs, que les patients n’acceptent pas facilement de payer.
Quel modèle pour la télémédecine ?
La télémédecine n’est plus une question de technologies, elles sont là, efficaces pour permettre des consultations à distance. C’est plus une question d’organisation et de financement. Pensée avant tout pour pallier les déserts médicaux, elle se heurte à la difficulté de trouver un modèle économique adapté. Les projets qui se sont engagés ont d’abord été centrés sur les médecins, mais commencent désormais à s’intéresser aux pharmaciens, relais incontournable dans les régions où les médecins se font rares, et cela dans la limite de ce que la loi leur permet. Mais chaque projet engagé cherche à trouver le bon fonctionnement, tantôt grâce à l’appui des compagnies d’assurances, tantôt en se spécialisant sur une pathologie, tantôt en ciblant une région ou une catégorie de professionnels de santé… En l’absence de système de rémunération suffisant et adapté, les pharmaciens, pourtant tout à fait légitimes dans l’aide à la téléconsultation pour les personnes âgées et isolées, en mettant à leur disposition un espace dédié et équipé, doivent penser à dégager du temps, à apporter des conseils et pourquoi pas, des produits complémentaires à ces séances de téléconsultation afin de rentabiliser leur investissement.
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