Dans sa voiture, Julien tourne et retourne dans sa tête les mots qu'il souhaite dire à Juliette avant de partir en Alsace. Au fil des semaines, il a fini par admettre que ses sentiments vis-à-vis de la jeune adjointe étaient bien plus qu'amicaux ; des regards pénétrants, une intonation singulière, une complicité évidente et addictive qu'il ne ressent plus depuis longtemps avec sa propre petite amie. Julien est bien décidé à ne pas laisser cette situation ambiguë s'installer plus longtemps entre lui et Juliette. Pourtant, au fur et à mesure que les minutes s'écoulent, sa détermination s'étiole et tandis que la croix de la pharmacie s'éteint et que les préparatrices rentrent chez elles, Julien perd tout son courage. Ses aveux pourraient bien attendre, après tout…
Le jeune homme est sur le point de démarrer quand il voit la porte de service de la pharmacie s'ouvrir. Quinze minutes se sont écoulées depuis la fermeture et Juliette quitte son travail après avoir finalisé la caisse du jour. Il est 18 heures, heure inhabituelle de fermeture mais imposée par la baisse d'activité consécutive au confinement.
Julien s'apprête à sortir de sa voiture quand il voit deux hommes accoster la pharmacienne en train de remettre la clé de la pharmacie dans son sac. Ils l'entourent tout en lui parlant, puis l'un d'entre eux se poste devant Juliette pour l'empêcher d'avancer. La jeune femme tente de passer sur la gauche mais l'autre la retient. Aucun d'entre eux ne voit Julien s'approcher.
- Il y a un problème ?
Le plus grand des deux individus se retourne brusquement, très surpris. Pendant quelques secondes, il dévisage Julien puis fait un signe à son compère pour lui signifier qu'il est temps de partir.
Juliette, tremblante, oublie les consignes de sécurité et tombe dans les bras de Julien.
- Qu'est-ce qu'ils voulaient ? Juliette ? Regarde-moi ? Qui sont ces types ?
- Je ne sais pas. Ils ont commencé à me dire que leurs parents étaient très malades, et qu'ils avaient besoin absolument d'une cinquantaine de masques comme ceux des médecins, répond Juliette, le souffle court.
- Ils voulaient que tu leur ouvres la pharmacie, c'est ça ?
- Oui, c'est ce qu'ils me demandaient ; ils étaient de plus en plus menaçants quand tu es arrivé. Merci, j'ai eu si peur…
- Il faut qu'on prévienne la gendarmerie, et Karine. Je l'appelle tout de suite. Viens, on va se mettre dans la pharmacie, on sera mieux.
- Je peux pas. J'ai le souffle coupé. Il faut que je m'assoie.
Sans laisser le temps à Julien de répondre, la jeune femme se laisse tomber au sol, et place sa tête entre ses mains.
- Je suis là, Juliette, tente de rassurer Julien, accroupi à côté d'elle et lui tenant la main. De l'autre main, il tient son téléphone contre l'oreille.
- Karine. Est-ce que tu peux venir à la pharmacie en urgence ? Juliette vient de se faire agresser par deux types qui voulaient des masques. Non… à l'extérieur de la pharmacie, quand elle partait. Oui, d'accord, je les préviens.
- Juliette, je vais appeler la gendarmerie. Karine arrive. Tu trembles de partout…
Juliette se laisse aller contre le corps du jeune homme et Julien entend sa voix faible lui demander :
- Pourquoi es-tu revenu ce soir ? Pour me voir ? Pour me parler ? Si tu voulais faire romantique, c'est raté…
- Oui, pour tout ça. Je pars en Alsace demain, pour une ou deux semaines. Et je crois que ça va être long sans toi.
(À suivre…)
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