L’usage chronique d’héroïne induit plusieurs types de complications liées, pour une part minoritaire, aux propriétés pharmacologiques de la drogue et, pour l’essentiel, à ses conditions d’utilisation.
Effets somatiques induits par l’héroïne.
Liés aux modalités de l’utilisation de la drogue (voie d’administration, association à d’autres produits) et à l’accoutumance, leurs conséquences sont plus ou moins sévères.
› Thrombophlébites au site d’injection lors d’un usage par voie intraveineuse ;
› Nausées et vomissements, inconstants, disparaissent avec l’accoutumance ; troubles du péristaltisme (constipation) et hyperpression biliaire (coliques hépatiques) ;
› Dépression du système nerveux central avec troubles de la conscience (et risque d’inhalation de liquide gastrique parfois fatale), hypothermie, ataxie, myosis ;
› Complications respiratoires (la dépression respiratoire, qui peut être fatale en l’absence de traitement, résulte d’une réduction de la sensibilité des centres respiratoires à la teneur en gaz carbonique du sang) ;
› Complications cardiaques (myocardites, ischémie) ; dilatation vasculaire (hypotension orthostatique) ;
› Aménorrhée et troubles endocriniens divers ;
› À forte dose, l’héroïne induit des convulsions, notamment en cas d’antécédents d’épilepsie ;
› Évolution insidieuse de lésions organiques, notamment buccales ou ORL (l’héroïne provoque une analgésie deux fois plus puissante que celle de la morphine) ;
Le nombre officiel de décès directement lié à la consommation illicite d’opiacés est de l’ordre de 40 personnes/an en France (un chiffre probablement sous-estimé !). Marginalisation et précarisation des usagers accroissent les risques somatiques liés à la prise d’héroïne.
Complications infectieuses liées à l’injection.
La fréquence des contaminations par le VIH et le VHC chez les usagers de drogues par voie veineuse justifie la politique de réduction des risques développée depuis près de vingt ans en France. Désocialisation, marginalisation, malnutrition, immunodépression aggravent les conséquences infectieuses de la toxicomanie.
L’abcès au site d’injection, fréquent, peut évoluer en thrombophlébite ou en fasciite nécrosante. On observe également des infections systémiques (bactériennes ou fongiques), des endocardites à staphylocoque, des infections pulmonaires, cérébrales ou méningées, ostéoarticulaires ou dentaires.
Complications liées aux substances de coupe.
L’héroïne est diluée dans des substances variées (lactose, glucose, etc.) dont certaines peuvent être à l’origine de granulomes ou d’embolies après injection (talc, amidon, plâtre, cellulose). Elle peut aussi contenir des substances pharmacologiquement actives (paracétamol, caféine, stimulants divers dont cocaïne, benzodiazépines, barbituriques, dextrométhorphane, phénacétine, quinidine, etc.) et parfois toxiques (car pouvant contenir notamment des traces de métaux lourds).
Comorbidités/complications psychiatriques.
Les troubles psychiatriques, fréquents dans la population des héroïnomanes, aggravent la dépendance. Il reste difficile de préciser si la consommation de drogue est la cause des signes psychiatriques ou si elle en est une conséquence. Les comorbidités, nombreuses et intriquées, sont dominées par les troubles de l’humeur et les troubles anxieux. Les personnes schizophrènes recourent parfois à l’usage d’héroïne.
Dépendance.
La dépendance ne peut être réduite à une approche neurobiologique : ayant un déterminisme partiellement génétique, elle s’associe à des stimuli environnementaux (lieux, fréquentations, manipulation du matériel d’injection). Son installation peut être rapide, notamment lors d’un usage par voie parentérale (au terme de 10 à 20 injections parfois).
› La dépendance psychique se manifeste par une quête compulsive (« craving ») de la drogue. Ayant pour origine la mémorisation dans le système limbique du plaisir qui a accompagné les premières injections, elle affecte notamment le sommeil (action de l’héroïne, usage de psychostimulants, style de vie, comorbidités), ce qui explique la fréquence du mésusage des hypnotiques chez l’héroïnomane, et a d’importantes conséquences sur le style de vie du sujet (actes illégaux, trafic, etc.).
› La dépendance physique se traduit par la survenue d’un syndrome de sevrage (« manque ») lors de l’arrêt de la consommation d’héroïne. Ayant pour origine l’action de l’opiacé sur les récepteurs aux endorphines, elle se confond dans son origine avec l’accoutumance (ou tolérance) traduisant l’adaptation physiologique de l’organisme à l’apport régulier d’opiacés exogènes. La dose utilisée peut excéder un gramme par jour.
Article précédent
Trajectoire de l’héroïnomane
Article suivant
Rappel épidémiologique
Quelques définitions
Les mots du client
Trajectoire de l’héroïnomane
Chez le médecin
Rappel épidémiologique
Opiacés de substitution
Stratégie de traitement de substitution
Pharmaco pratique
Accompagner la patiente souffrant d’endométriose
3 questions à…
Françoise Amouroux
Cas de comptoir
Les allergies aux pollens
Pharmaco pratique
Les traitements de la sclérose en plaques