Au même titre que le masque, la solution hydroalcoolique (SHA) est devenue, en quelques mois, un objet du quotidien des Français. Utilisées de longue date dans les services hospitaliers, et après une courte frénésie d’achat observée en 2009 au moment où la grippe A/H1N1 fait craindre le pire, les SHA sont revenus sur le devant de la scène pour faire face à la menace du Covid-19. Élément crucial pour limiter la propagation du virus, les SHA permettent d’assurer l’hygiène des mains en toutes circonstances. D’où une véritable explosion du marché alors que la menace se précise.
Selon le GERS, le pic atteint entre le 24 février et le 8 mars est du jamais-vu. À tel point que la pénurie se fait sentir, les fabricants ne parviennent pas à faire face à la demande exponentielle, les pharmacies sont dévalisées laissant les professionnels de santé sans réponse face aux usagers dépourvus. La solution vient de la pharmacie, qui demande instamment au ministère de la Santé l’autorisation de fabriquer elle-même ses SHA. Olivier Véran y répond favorablement par le biais d’un arrêté le 6 mars. Et impose un encadrement des prix. En quelques jours, la profession s’organise.
Les étudiants ne sont pas en reste. Dans les facultés de Lille, Angers, Grenoble ou Saclay, ils se relaient pour produire en grande quantité des SHA à destination des hôpitaux, des cabinets de médecins, des pharmacies. Les officines équipées d’un préparatoire se lancent aussi dans la fabrication, à l’instar de la pharmacie Delpech à Paris, qui investit même la rue pour gagner de l’espace, sur autorisation de la mairie. Son titulaire évoque des pics de production journaliers à 10 000 litres et 280 000 litres vendus en l’espace de deux mois à environ 4 000 confrères qui viennent parfois de très loin pour s’approvisionner. Des sucriers, alcooliers et autres distributeurs de vins et spiritueux mettent à disposition des pharmaciens leur alcool à prix coûtant.
Mesures barrières
Les producteurs habituels augmentent eux aussi leurs capacités, telle la Cooper qui annonçait début avril avoir multiplié sa production par 9. D’autres acteurs, pharmaceutiques ou cosmétiques, se lancent dans la course, après un assouplissement prévu par un arrêté du 13 mars. En quelques semaines, la pénurie est enrayée. Suit, le 26 avril, la baisse de TVA pour l’ensemble des SHA qui passe de 20 % à 5,5 %.
Les pharmaciens sont autorisés à poursuivre la fabrication artisanale jusqu’à la fin de l’état d’urgence sanitaire, soit le 10 juillet. Mais déjà, l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) appelle à une prolongation « au moins jusqu’à la fin de l’année 2020 ». Car plus on déconfine, plus les mesures barrières sont primordiales pour éviter une reprise des contaminations. Les Français l’ont bien compris puisque la consommation en SHA reste bien plus élevée, quelle que soit la période observée en 2020 en comparaison avec l’année précédente.
Seule ombre au tableau : les contrôles de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), dénoncées tour à tour par les syndicats de pharmaciens qui ont mené leur enquête. Depuis début mars, un titulaire sur deux aurait fait l’objet d’un contrôle et de demandes administratives particulièrement lourdes, comme la fourniture des registres d’achat et de vente chaque semaine… S’ils ne remettent pas en cause le principe des contrôles, l’excès de zèle a été mal vécu au moment où les pharmaciens étaient en première ligne.
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