EN AVRIL 2007, un protocole d’accord est signé entre la mutuelle MTRL et les Assurances du Crédit Mutuel (ACM) d’une part, et l’USPO (Union des Syndicats de Pharmaciens d’Officine) d’autre part. Un accord qui prévoit notamment la prise en charge d’un bilan de prévention personnalisé réalisé par le pharmacien et rémunéré sur la base d’une consultation de médecine générale, soit vingt et un euros. Les assurés de la MTRL et des ACM peuvent ainsi bénéficier d’un bilan de prévention personnalisé réalisé par le pharmacien de leur choix, et d’une prise en charge à hauteur de cinquante euros par an des médicaments homéopathiques non remboursés par l’Assurance-maladie. L’objectif affiché par la mutuelle est de faire profiter l'adhérent « des compétences et conseils du pharmacien pour mettre en œuvre de bons réflexes de prévention et d'hygiène de vie » : dans un espace de confidentialité et sur rendez-vous, le pharmacien évalue les besoins et guide le patient en terme de prévention, de conseils, de médication. Le bilan personnalisé fait l’objet d’un recueil d’informations (allergies, résultats d’analyse, vaccinations, professionnels de santé consultés, médication familiale, hygiène de vie, nutrition, prévention…) visant à l’établissement d’une synthèse, d’un plan de soins et de conseils rédigés par le pharmacien. Le patient peut ainsi se voir conseiller un traitement homéopathique, une visite chez le diététicien, un sevrage tabagique ou des séances chez l'ostéopathe. Un dossier personnel est ensuite remis au patient. Les assurés MTRL/ACM ayant signé un contrat « Réflexe Prévention Santé » sont remboursés de leur bilan à hauteur d’un bilan toutes les deux années de couverture.
Prévention ou exercice de la médecine ?
Dès mai 2007, le Conseil national de l’Ordre des médecins (CNOM) s’était vivement élevé contre l’initiative de la mutuelle. Plus récemment, c’est la campagne « Un traitement pour votre santé au quotidien. C’est possible ! » du groupement Giphar qui a provoqué la colère des médecins (voir encadré et le Quotidien du 19 janvier 2009). Estimant qu’elles font la promotion d’une consultation médicale et que ces initiatives sont susceptibles d’engendrer une « confusion préjudiciable au public entre les compétences propres aux médecins et celles des pharmaciens », l’instance menace même d’engager des poursuites judiciaires. Pour le CNOM, l'initiative paraît en effet « contrevenir gravement aux politiques publiques à conduire en matière de prévention, d'autant plus qu'elle tendrait à accréditer la valeur préventive de "médecines naturelles" non éprouvées ». MG France, de son côté, n'hésite pas à crier à l'exercice illégal de la médecine et menace d’utiliser « toutes les voies du droit pour s'y opposer ».
Pour Emmanuelle Balbi, juriste à l’UNPF Union Nationale des Pharmaciens de France, l'article L.4161-1 du Code de la Santé Publique est pourtant clair : « Exerce illégalement la médecine, toute personne qui prend part habituellement à l'établissement d'un diagnostic ou au traitement de maladies ou pratique un des actes professionnels prévus dans la nomenclature des actes professionnels des médecins fixée par arrêté, sans être titulaire d'un diplôme ou certificat exigé pour l'exercice de la profession de médecin ». En proposant un bilan personnalisé de prévention, acte qui n'est pas prévu dans la nomenclature des actes professionnels des médecins, le pharmacien n’a donc pour seul objectif que de prévenir les risques de maladie, et ne s'engage pas dans un bilan de santé en tant que tel ni dans l'établissement d'un diagnostic d'une maladie. « D'ailleurs, suite à ce bilan de prévention, le pharmacien, s'il le juge utile, conseillera au patient de se rendre chez son médecin », note la juriste.
Espérons que médecins et pharmaciens finiront par s’entendre sans avoir passer par les tribunaux.
CHARLES DUCROUX
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