La pandémie de Covid-19 a sérieusement ralenti le tourisme médical mais le marché a retrouvé son dynamisme. Il est cependant très concurrentiel et des freins à son développement persistent. Le secteur n’est pas structuré au niveau international. Les législations et les principes éthiques diffèrent selon les pays. Les délais d’obtention pour un visa sont également variables : l’Asie du Sud-Est et la Turquie ont mis en place des procédures accélérées ou simplifiées, ce qui n’est pas forcément le cas en Europe. Par ailleurs, en France et en Europe, de nombreux professionnels de santé restent circonspects sur le principe du tourisme médical.
Soins « lourds » en Europe
La plupart des pays attractifs en termes de soins ont développé une ou plusieurs spécialités qui assurent leur notoriété grâce à un personnel médical et paramédical souvent formé en Europe ou aux États-Unis. La Hongrie et la Pologne, par exemple, se sont spécialisées dans les soins dentaires (prothèses et implants), l’ophtalmologie (traitement définitif de la myopie) et l’esthétique, la Tunisie dans les implants capillaires et la chirurgie esthétique. Dans le cas de ces soins « légers » ou esthétiques, la différence de coût (frais de voyage et d’hébergement compris) est déterminante dans le choix des patients qui affluent pendant leurs congés. L’existence de listes d’attente, comme c’est le cas au Royaume-Uni pour certaines opérations (prothèse de hanche ou de genou), peut aussi pousser à aller se faire soigner ailleurs, à Calais en l’occurrence. Dans l’Union européenne, le fait que la couverture maladie soit comparable à celle du pays de résidence, entre en ligne de compte.
En revanche, pour les soins « lourds », l’offre est souvent inexistante ou peu compétente dans le pays d’origine et les patients recherchent non pas une prise en charge à moindre coût mais une véritable expertise. Ces soins sont ainsi lissés sur l’année et assurés principalement dans des pays européens comme la France, l’Allemagne et les Pays-Bas, aux États-Unis, en Thaïlande, en Inde et dans certains pays du Moyen-Orient.
Des atouts mais…
En France, tous les types d’établissements hospitaliers ont développé l’accueil de patients internationaux, mais de manière inégale. Les CHU qui comptent des unités de recherche et réalisent des « premières » (à Paris, Marseille, Strasbourg, Lyon…) disposent de référents internationaux et/ou de coordonnateurs. Dans le secteur privé non lucratif, certains Centres de lutte contre le cancer (CLCC) comme ceux de Lyon et de Nantes, l’Institut Gustave-Roussy (Villejuif) ou l’Institut Curie, ont un directeur dédié à l’international. Mais si ces deux catégories d’établissements sont réputées pour leur excellence, elles n’ont pas su s’adapter aux contraintes de l’accueil des patients étrangers. Ainsi, pour certaines prises en charge, notamment en esthétique et dans les traitements de l’infertilité, les délais de réflexion imposés entre le rendez-vous médical et la prise en charge obligent les patients à séjourner 2 semaines. Le système de santé français n’est pas non plus réactif dans la réalisation de devis et de factures ; dans des pays concurrents, notamment l’Allemagne, les délais sont courts. L’absence de maîtrise des langues étrangères du personnel soignant et d’accompagnement constitue également un obstacle. Enfin, la qualité hôtelière et de la restauration est en général inférieure à celle des standards internationaux, surtout dans le public. Difficultés supplémentaires : la demande de visa pour les patients est la même que pour un visa touristique et la liste de documents administratifs à fournir est longue. Le secteur privé lucratif, dominé par Ramsay Santé, Elsan, Vivalto Santé, Korian, est plus dynamique. Ces quatre groupes ont rapidement mis en place des services dédiés en interne, développé une offre hôtelière haut de gamme et signé des partenariats avec des conciergeries médicales.
Les services de santé français ont pourtant un savoir-faire reconnu, en particulier en cardiologie, gynécologie-obstétrique, neurologie, oncologie (qui représente 20 % de l’activité de court séjour, en particulier pour les cancers de l’appareil digestif, du sein et de la peau), orthopédie, pédiatrie et soins de réhabilitation. Pour stimuler le tourisme médical en France, les efforts devraient essentiellement porter sur : l’aspect linguistique (au minimum une maîtrise de l’anglais pour les professionnels de santé et les administratifs) ; le confort (agencement et taille des chambres, choix des repas…) : et, pour se démarquer, un centrage de l’activité médicale sur des spécialités ultra-maîtrisées (techniques de pointe, matériel sophistiqué).
* D’après l’étude des Échos « Le marché français du tourisme médical », 2021.
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