Un traitement systémique du psoriasis est nécessaire chez quelque 25 % des patients atteints d’une présentation modérée à sévère, en cas de retentissement important sur la qualité de vie ou encore de résistance aux traitements locaux. Il relève alors (comme la photothérapie, cf. plus bas) d’une prescription spécialisée. Les médicaments « conventionnels » (par opposition aux biothérapies, cf. plus bas) sont alors utilisés en première intention. Généralement efficaces, avec des rémissions obtenues en six (ciclosporine) à dix semaines (méthotrexate), ces médicaments peuvent induire des effets indésirables iatrogènes impliquant un strict contrôle des posologies et un suivi médical. L’association de plusieurs médicaments systémiques est évitée, sauf cas particulier, mais en revanche ce traitement est souvent associé à un traitement local.
Rétinoïdes.
Régularisant la croissance et la différenciation cellulaire, les rétinoïdes sont actifs sur le psoriasis. Une seule molécule bénéficie d’une indication dans ce cadre : l’acitrétine (Soriatane), indiquée dans les formes sévères. La posologie initiale (0,2 mg/kg/j) est augmentée progressivement à 0,5 mg/kg/j, avec surveillance des effets indésirables, jusqu’à trouver le meilleur compromis entre efficacité et tolérance (de fortes doses peuvent fragiliser l’épiderme, avec survenue de lésions unguéales parfois irréversibles). Cette stratégie, privilégiant une approche par de faibles doses (25-50 mg/j), offre jusqu’à 60 % de réponses et 40 % de blanchiment des lésions en 6 à 8 semaines. L’acitrétine est également utilisée à faible posologie (25-35 mg/j) en entretien : elle s’administre en monothérapie ou en association.
Ses effets indésirables, communs à tous les rétinoïdes systémiques, dose-dépendants et réversibles, intéressent avant tout la peau (chéilite desquamative, xérose, prurit, épistaxis, alopécie). Une surveillance biologique est assurée (transaminases tous les 15 J pendant 2 mois puis, tous les 3 mois ; dosage du cholestérol et des triglycérides avant le début du traitement puis à surveiller régulièrement, principalement chez le sujet à risque de dyslipidémie).
L’acitrétine, tératogène (malformations du système nerveux central, cardiovasculaires et squelettiques, etc.), impose une contraception au minimum un mois avant l’instauration du traitement puis un wash-out de deux ans avant d’envisager une conception.
Son association à l’alcool induit une accumulation d’étrétinate, également tératogène, dont la demi-vie est prolongée (4 mois à plusieurs années) et qui s’accumule dans le tissu graisseux : la patiente doit s’engager à ne pas consommer d’alcool pendant la durée du traitement et les 2 mois suivants. Le don de sang est interdit pendant le traitement et dans les 2 ans suivant son arrêt.
L’ANSM impose depuis février 2014 une prescription initiale annuelle par un dermatologue et le respect des conditions d’encadrement de la prescription incluant notamment un contrat de soins et d’information de la patiente en âge de procréer (ANSM, février 2014).
Méthotrexate.
Le méthotrexate (Imeth, Métoject, Novatrex) bloque la synthèse de l’ADN et inhibe le renouvellement des kératinocytes. Il exerce une action anti-inflammatoire (inhibition de la synthèse des cytokines pro-inflammatoires) et immunosuppressive. Agissant rapidement (deux mois), il est indiqué dans les formes sévères de (› 50% de la surface cutanée, formes érythrodermiques, pustuleuses, généralisées, etc.) ou résistantes. Il s’administre per os (7,5 mg à 25 mg/semaine, en une prise unique ou en trois prises fractionnées à 12 heures d’intervalle, selon posologie atteinte par paliers), par voie IM (une injection hebdomadaire de 7,5 mg à 30 mg ; usage hospitalier, hors AMM) ou en IV. Les effets indésirables sont digestifs (nausées, douleurs, anorexie, stomatite), pulmonaire (toux, dyspnée d’effort, rarissimes pneumopathies d’hypersensibilité ou fibrose pulmonaire), cutanés (exanthème maculopapuleux), hématologiques et, surtout, hépatiques (augmentation des transaminases, risque de fibrose ou de cirrhose) notamment chez le patient obèse, diabétique, insuffisant rénal ou utilisant d’autres médicaments hépatotoxiques. Une biopsie hépatique recherchant une fibrose est parfois envisagée après administration cumulée de 1,5 g à 2 g. Par ailleurs, une contraception fiable doit être instaurée ou maintenue : elle sera poursuivie 3 mois après l’arrêt du traitement chez la femme et 5 mois chez l’homme.
Ciclosporine.
La ciclosporine (Néoral, Sandimmun), puissant immunosuppresseur, inhibe l’activité des lymphocytes T auxiliaires ; son activité est comparable à celle du méthotrexate mais elle induit moins d’anomalies biologiques. En revanche, son administration expose à des effets indésirables non négligeables, notamment au niveau rénal ou au niveau buccal (hypertrophie gingivale). Elle est proposée comme traitement de première intention (2,5 à 5 mg/kg), sur prescription initiale hospitalière valable 6 mois, en cures de trois à six mois, sous couvert d’une surveillance rénale annuelle. Il est déconseillé de l’associer au méthotrexate (sauf situation exceptionnelle).
Léflunomide.
Le léflunomide (Arava, prescription de spécialiste), immunosuppresseur actif par voie orale, est indiqué dans le traitement du rhumatisme psoriasique et généralement prescrit cas d’échappement ou de contre-indication au méthotrexate. Le risque de malformations fœtales, y compris après traitement du père, impose une contraception pendant le traitement et jusqu’à 2 ans après son arrêt (ou jusqu’à 11 jours après l’arrêt du traitement si réalisation d’un wash-out spécifique, cf. RCP du médicament).
Apremilast.
Cet inhibiteur des phosphodiestérases-4 inhibe la dégradation de l’AMPc et donc, indirectement, le taux de TNFα et d’interleukines 12 et 23 pro-inflammatoires. Agréé par la FDA et l’EMEA, il sera probablement commercialisé à terme (Otezia).
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Françoise Amouroux
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