« ÉPUISE moralement et physiquement malgré les structures de soutien, j’ai été contraint de placer ma mère âgée de 83 ans en institution. J’ai vécu cette démarche comme un constat d’échec et ma mère a vécu ce « déménagement » comme un abandon ».
« J’assume l’accompagnement de mon père âgé de 75 ans, sur le plan physique, psychologique et financier, j’ai l’impression de donner beaucoup sans recevoir en retour. À celà, s’ajoute l’immense chagrin de le voir perdre peu à peu ses facultés mentales. Parfois, ma patience est à bout et je deviens agressive. »
Cette maladie concerne tout l’entourage du malade, que l’on appelle les aidants et qui ont un rôle considérable. En choisissant de répondre lui-même à tous les besoins d’un parent ou d’un proche, l’aidant assume une charge physique et psychologique considérable. Comment accompagner au quotidien le malade dans la dignité et le respect ? Le pharmacien peut intervenir auprès des aidants pour les informer et les orienter dans leur difficile parcours, à toutes les étapes de la maladie. Il doit savoir les écouter pour briser l’isolement des familles et éviter les situations d’épuisement et de détresse. Son rôle est important pour aider les proches à mieux rejoindre la personne au-delà de sa maladie et de ses déficits pour lui maintenir la meilleure qualité de vie possible.
Continuer à communiquer.
En raison des troubles du langage aussi bien écrit qu’oral, de la perte de la mémoire et de la compréhension des mots, le maintien de la communication nécessite imagination et patience de la part des aidants. Certaines attitudes positives permettent de garder de bons contacts avec le malade, parmi lesquelles :
- Conserver une relation d’adulte à adulte et utiliser un vocabulaire simple en évitant les tons infantilisants ;
- Associer deux ou plusieurs de ses cinq sens (vue, ouïe, goût, toucher et odorat) pour lui parler, chaque sens pouvant compenser le défaut de l’autre ;
- Ne pas hésiter à répéter plusieurs fois la même phrase, et guetter les expressions faciales et corporelles du patient pour savoir s’il a compris, ou ce qu’il ressent ;
- Dire la vérité sans prononcer de mots inquiétants : le patient doit être informé des décisions médicales le concernant, surtout ne pas parler devant lui comme s’il n’était pas là, son avis doit être pris en compte ;
- Encourager le sujet à s’exprimer et à participer à des activités de groupe pour lutter contre une dépression, une apathie et un repli sur soi.
Attention à la malnutrition.
La dénutrition est un signe d’alerte et d’aggravation de la maladie, et le comportement alimentaire du patient doit être bien surveillé.
Comment l’évaluer ? Une pesée régulière est un bon indicateur de l’évolution de la masse corporelle. Faire des listes de courses et vérifier régulièrement l’état du frigidaire totalement vide ou chargé d’aliments inutilisés. Repérer s’il se produit une omission ou une modification des horaires des repas. Il est essentiel d’adapter les repas aux capacités du patient et de préserver le maximum d’autonomie dans la préhension, la découpe et la mastication.
Comment compenser les carences ? Les recommandations officielles sont précises : la complémentation nutritionnelle orale (CNO) doit être proposée à tous les malades présentant une perte de poids, et être adaptée aux éventuels troubles du comportement alimentaire.
Sauvegarder l’autonomie : adapter le cadre de vie.
Aménager un environnement simplifié du domicile va rendre la personne malade plus sûre d’elle-même et la mettre en confiance, et le niveau de risque sera réduit au minimum en facilitant sa vie quotidienne et celle des aidants. Quelles mesures prendre ?
Protéger en priorité les endroits dangereux (portes, fenêtres, prises électriques…), supprimer le gaz. Aménager la maison pour éviter les chutes : poignets d’appui, rampe, sol antidérapant, douche avec siège, rehausse WC, lit bas, robinets mitigeurs…). Installer des systèmes de géolocalisation plus ou moins sophistiqués (bracelet antidisparition, téléphone portable, radiorepérage, caméra de visiophonie) qui relient le malade à des centres de télésurveillance ou à la famille, pour limiter la fugue ou l’errance.
Démarches administratives, suivi, assistance.
Le pharmacien doit connaître les associations existantes et recueillir un maximum d’informations sur toutes les aides proposées type consultation mémoire, établissements d’accueil temporaire pour les familles et de prise en charge du malade en journée, structures de répit pour éviter que les aidants se replient sur eux-mêmes et s’épuisent.
La prise en charge sociale inclut des aides matérielles (prestation spécifique dépendance PSD, allocation compensatrice, réduction d’impôts, exonération de cotisations). Les protections juridiques sont conçues dans l’intérêt de la personne et de ses biens : la sauvegarde de justice, la tutelle et la curatelle. Avec l’avancement de la maladie, il existe des structures d’accueil long séjour (EHPAD : établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) et les Unités de vie Alzheimer.
Les aidants sont aussi des patients et la Haute autorité de santé (HAS) leur recommande une consultation médicale annuelle pour une évaluation globale de leur état de santé, mais aussi de leur état psychique, affectif, nutritionnel, et ce suivi doit les accompagner aux différentes étapes de la maladie.
Les associations de patients : l’association France Alzheimer est la plus connue à l’heure actuelle. Elle regroupe 120 associations locales, Tél. : 01.42.97.52.41.
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