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Un projet d’automatisation, c’est un peu comme l’achat d’une voiture. Des considérations rationnelles, objectives vont se mêler à un désir, forcément plus confus, où l’envie prend le dessus sur la logique. La comparaison s’arrête là, tant les enjeux sont autrement plus importants pour une officine qui, en se lançant dans un tel projet, s’engage pour une longue durée, une dizaine d’années environ. D’où l’importance de se poser les bonnes questions, les rationnelles et celles qui le sont un peu moins, peut-être pour mieux les écarter. Car c’est un projet engageant, combinant ambitions stratégiques tout autant que préoccupations pratiques, ponctuelles, qui nécessite d’être dans une vision globale, à long terme, et dans des aspects très concrets qui peuvent se nicher dans des détails.
1.Que recherche-t-on avec l’automatisation ?
Se poser cette question en alignant toutes les réponses possibles permet de les analyser et de faire le tri entre les « bonnes » et les « mauvaises » raisons, qui ne le sont que pour son officine et pas forcément pour la pharmacie voisine. L’erreur serait de se concentrer sur un seul aspect, améliorer la rapidité de la délivrance par exemple et de négliger le reste. Cette identification des objectifs permet de mieux en parler avec l’équipe officinale qu’il faut nécessairement impliquer. « Le terme d’automatisation fait peur », explique Vincent Deltour, directeur commercial de Meditech. D’où la nécessité d’expliquer clairement ce que l’on veut, rationaliser l’ensemble du back-office, réduire les erreurs de stocks, limiter les tâches monotones… En tenant compte de la taille de la pharmacie, de sa zone de chalandise et bien sûr de la structure de son équipe officinale, il sera possible de mieux choisir la configuration de la machine. Evidemment, tous les prestataires proposent un audit, et leur expérience leur permet d’être pertinents. Cela facilite les décisions, mais ne dédouane pas les titulaires d’une clarification de leurs intentions vis-à-vis des équipes officinales. S’équiper d’un chargeur automatique par exemple, c’est soit un poste en moins, soit une modification profonde du travail d’une personne…
2. Comment bien choisir sa machine selon la structure de son stock ?
Voilà une question qui est typique de l’enjeu de l’automatisation, celui de pouvoir se projeter dans une évolution à définir. Car le projet ne doit pas s’adapter au stock tel qu’il est aujourd’hui, mais tel qu’il doit être demain selon les souhaits des pharmaciens. « C’est le choix de la machine qui va restructurer le stock », estime ainsi Vincent Deltour. « Les robots peuvent modifier le stock, les automates en conservent la structure telle quelle », précise-t-il cependant. « La robotisation permet de réduire les stocks et donc de gagner des points de trésorerie de façon parfois spectaculaire, et certains pharmaciens en profitent pour investir en largeur de stock. » Beaucoup moins d’exemplaires de références données, mais beaucoup plus de références grâce à un fonctionnement en flux tendu. Cela suppose en amont une véritable adaptation de la politique d’achat. Ce n’est donc pas le stock qui détermine la machine, mais bien l’inverse.
3.Comment évaluer les performances de la machine ?
Celles-ci sont annoncées de façon détaillée avec par exemple, des capacités de tant de milliers de boîtes, des vitesses de délivrance de tant etc… Mais ce sont finalement des données théoriques pour une pharmacie qui a besoin de vérifier « in vivo » si la machine souhaitée correspond à son besoin. « Les capacités sont données en fonction de tailles de boîtes qui ne sont pas standardisées, et il arrive qu’en réalité la capacité ne corresponde qu’à moins de 60 % de ce qui a été annoncé », souligne ainsi Olivier Resano, directeur commercial de Mekapharm. La solution ? Tester auprès de collègues pharmaciens déjà équipés qui ont le même profil (débit quotidien, CA quotidien, CA global…) pour vérifier la capacité et la vitesse de traitement et comparer les temps de travail de façon pratique, y compris pour les systèmes de rangement automatique. « Le temps de travail humain et le temps de travail d’une machine sont très différents et doivent être pris en compte tous les deux avant de prendre une décision », avertit Olivier Resano.
4. Comment dimensionner sa future machine ?
Outre les tests effectués comme évoqué ci-dessus, il y a aussi une façon d’envisager la taille de la machine selon ses ambitions, qui selon François Legaud, directeur commercial de Becton Dickinson France (ex ARX), doivent se mesurer à une échelle d’une dizaine d’années, pour autant qu’on puisse évaluer ce qui peut se passer en dix ans. L’exercice est difficile admet-il, mais plus que jamais, compte tenu des transformations potentielles des officines dues aux technologies digitales, les robots seront amenés à distribuer des volumes de produits toujours plus importants, ordonnance, homéo, OTC et même parapharmacie. « La digitalisation de l’officine sera plus facile si le robot suit », assure François Legaud. « Les machines sont rarement surdimensionnées », ajoute-t-il. Mais cela coûte plus cher. Un calcul qui doit être nuancé selon le directeur commercial du fabricant, puisqu’il doit être fait à l’échelle de dix ans, l’investissement est alors fortement rentabilisé. Le dimensionnement peut prendre des aspects plus prosaïques mais non moins négligeables, comme par exemple, le fait de distribuer un nombre de comptoirs précis, comme le souligne Bertrand Juchs directeur d’Omnicell France (ex Mach 4). « Si l’on distribue tous les comptoirs, la machine devra être d’autant plus puissante, il est donc parfois plus judicieux d’avoir une sortie pour deux comptoirs », propose-t-il.
5. Où installer la machine ?
La question est loin d’être anodine selon Olivier Resano, des officines ayant fait de mauvais choix se sont retrouvées dans des situations difficiles. Bien sûr, l’installation est dictée avant tout par les contraintes architecturales. Tout le monde conseille la simplicité, éviter de mettre l’automate loin des comptoirs par exemple, un cas de figure toujours délicat avec des systèmes de transitique parfois complexes et en tout cas coûteux. Il est préférable de mettre la machine au même niveau, éviter les caves par exemple. Mais parfois, les titulaires n’ont pas le choix. « En région parisienne, l’installation des machines dans les caves est fréquente, prix du foncier oblige », souligne Bertrand Juchs. En tout état de cause, rester dans une logique de simplicité. Si l’installation doit se faire à l’étage, il faut vérifier si des coûts de structures supplémentaires ne seront pas nécessaires pour renforcer le plancher : malgré l’implication de prestataires spécialisés, des pharmaciens se sont retrouvés coincés et forcés d’investir à la dernière minute. L’emplacement doit tenir compte également des flux des personnes et des marchandises, faire en sorte que tout soit fluide dès le sas de livraison. Il est dommage de neutraliser les gains de productivité engagés par l’automatisation si par ailleurs de nouvelles contraintes apparaissent pour l’équipe officinale à cause d’une mauvaise estimation des flux créés par l’installation de la machine.
6. Comment éviter les nuisances liées à l’installation de la machine ?
Bertrand Juchs évoque notamment celle du bruit qu’elle provoque, pas tant pour l’équipe officinale ou la clientèle mais pour les habitants d’un immeuble lorsque l’officine en occupe le rez-de-chaussée. « Le bruit se propage par vibrations ou effets de résonances, ce n’est pas fort, mais c’est un bruit nouveau et constant », explique le directeur d’Omnicell. Surtout quand les machines travaillent la nuit. D’où la nécessité parfois de s’équiper d’un kit anti bruit, qui permet d’atténuer les effets sonores de ces machines. Un détail, sans doute, mais l’automatisation est faite aussi de cela, et les prévoir très en amont évite les mauvaises surprises au dernier moment. Comme par exemple s’assurer d’un abonnement internet autonome pour la machine afin de disposer d’un débit suffisant ou encore vérifier que l’installation électrique supporte le courant triphasé quand la machine fonctionne sur ce mode, ce qui n’est pas le cas de tous les robots et automates.
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