L’AMM (autorisation de mise sur le marché) : la voie standard
Définition réglementaire
La demande d’autorisation de mise sur le marché ou AMM est une démarche préalable obligatoire à la commercialisation d’une spécialité pharmaceutique fabriquée industriellement. Elle est également indispensable pour prétendre au remboursement par l’assurance-maladie du médicament concerné. En France, l’AMM est délivrée par l’ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé).
Les conditions requises
L’obtention d’une AMM est basée sur l’évaluation de la balance bénéfice/risque du produit qui doit être favorable pour qu’un médicament soit commercialisé. Pour cela, différents paramètres sont étudiés. Le dossier d’AMM comporte donc plusieurs parties dont la structure est harmonisée au niveau international pour faciliter la compilation des données et leur évaluation par les autorités.
Tout d’abord, une partie qualité évalue la fabrication industrielle du médicament. Ensuite, la partie sécurité comporte les études précliniques, c’est-à-dire les données du comportement in vivo dans l’organisme non humain du médicament (pharmacocinétique, toxicologie, pharmacologie…). Si les résultats de ces études sont satisfaisants, les essais cliniques sur l’Homme peuvent alors démarrer afin de renseigner la dernière partie du dossier, à savoir l’efficacité. Ces essais sont strictement encadrés par la loi et ne peuvent débuter qu’après avis favorable du comité de protection des personnes et autorisation de l’ANSM.
Ces trois parties du dossier d’AMM sont accompagnées du RCP (résumé des caractéristiques du produit), de la notice patient et des informations d’étiquetage.
Qui délivre les AMM ?
Dans les pays membres de l’Union européenne (UE), 4 procédures permettent d’obtenir cette AMM : 3 sont européennes et 1 nationale. Parmi les européennes, on trouve d’abord la procédure centralisée qui concerne les médicaments destinés à tous les États membres. Le dossier est alors déposé auprès de la Commission européenne et l’AMM sera valable d’emblée dans toute l’UE mais le laboratoire peut choisir de ne commercialiser son produit que dans un certain nombre de pays. Cette procédure est obligatoire pour les médicaments de thérapie innovante ou issus des biotechnologies, les médicaments innovants contenant une nouvelle substance active et ceux permettant de traiter certaines affections (VIH, cancer, maladies neurodégénératives, diabète, maladies auto-immunes et maladies virales) ainsi que pour les médicaments orphelins indiqués dans le traitement des maladies rares.
Vient ensuite la procédure décentralisée. Il s’agit pour le laboratoire de déposer son dossier simultanément auprès des autorités de tous les États membres. L’évaluation est menée par un état choisi comme État membre de référence. Ainsi, si l’AMM est accordée, elle l’est dans les autres États en même temps.
Enfin, la procédure de reconnaissance mutuelle vise les produits qui ont déjà obtenu une AMM dans un des États membres de l’UE suite à une procédure nationale. Cette autorisation initiale peut alors être étendue à d’autres États membres dans lesquels le laboratoire souhaite commercialiser son médicament. Les AMM sont délivrées par les autorités compétentes des États concernés mais la procédure est pilotée par l’État qui a octroyé l’AMM existante.
Quant à la procédure nationale, de moins en moins utilisée, elle concerne les médicaments que les laboratoires ne souhaitent commercialiser que dans un seul État membre. L’AMM est alors délivrée par l’autorité compétente de cet État et ne sera valable que dans cet État.
Hors AMM : les accès dérogatoires
Depuis le 1er juillet 2021, l’accès dérogatoire aux médicaments a évolué afin notamment de simplifier les procédures et d’accélérer les délais d’accès aux traitements. Cela permet également aux patients en impasse thérapeutique d’accéder à des traitements innovants. Exit donc les RTU (recommandations temporaires d’utilisation) et les ATU (autorisations temporaires d’utilisation) nominative et de cohorte. Celles-ci sont désormais remplacées par les CPC (cadre de prescription compassionnelle) et les AAP (autorisation d’accès précoce).
Médicaments à cadre de prescription compassionnelle (CPC) (ex RTU)
Définition réglementaire
Les médicaments CPC correspondent aux spécialités prescrites pour un autre usage que celui prévu par leur AMM. Les CPC sont établis à l’initiative de l’ANSM ou à la demande du ministre chargé de la santé ou de la sécurité sociale pour une durée maximale de 3 ans renouvelable. De plus, ils sont accompagnés d’un protocole d’utilisation thérapeutique et de suivi des patients ainsi que, le cas échéant, des caractéristiques de la population bénéficiant du médicament sous CPC. Ils sont publiés sur le site de l’ANSM.
Qu’est-ce que cela permet ?
Les CPC permettent de sécuriser les prescriptions hors AMM et d’imposer un protocole de suivi des prescriptions.
Dans quelles conditions ?
L’ANSM peut définir ce cadre dérogatoire à condition qu’il existe un besoin thérapeutique et que le rapport bénéfice/risque du médicament soit présumé favorable, notamment à partir de données scientifiques publiées d’efficacité et de tolérance.
Ensuite, le médecin peut prescrire une spécialité faisant l’objet d’un CPC en portant sur l’ordonnance la mention « Prescription au titre d’un accès compassionnel en dehors du cadre d’une autorisation de mise sur le marché ». Le pharmacien peut alors délivrer le médicament en vérifiant que le protocole de CPC défini est bien respecté (prescripteur habilité, posologie, durée maximale de prescription…). La prise en charge du traitement par l’assurance-maladie se fera selon les mêmes critères de prix et de taux qu’une prescription conforme à l’AMM.
Autorisation d’accès précoce (AAP) (ex ATUc)
Définition réglementaire
Les médicaments bénéficiant d’une AAP correspondent à des traitements innovants, en cours de développement, sans alternative thérapeutique, destinés à traiter des maladies rares ou invalidantes et pour lesquels le laboratoire s’engage à déposer une demande d’AMM rapidement.
Qu’est-ce que cela permet ?
Le but premier de cet accès dérogatoire, accordé par la HAS après avis de l’ANSM, est de raccourcir le délai d’obtention pour les patients d’un médicament, le tout d’une façon sécurisée. Ainsi, le délai d’entrée dans le dispositif d’accès précoce ne sera plus que de 3 mois maximum, contre 135 jours en moyenne pour les anciennes ATU de cohorte. Le laboratoire devra ensuite mettre le médicament concerné à disposition des patients dans un délai de 2 mois. Cela permet donc d’améliorer la prise en charge des patients se trouvant dans une impasse thérapeutique ou qui ne peuvent ni attendre la mise à disposition classique du médicament ni être inclus dans un essai clinique.
Dans quelles conditions ?
Pour prétendre à une AAP, plusieurs conditions sont requises : l’absence de traitement approprié, le caractère urgent de la mise en œuvre du traitement, la forte présomption d’efficacité au vu des données scientifiques et le caractère innovant du médicament. De plus, un protocole d’utilisation thérapeutique (PUT) et de recueil des données défini par la HAS doit être respecté afin d’assurer une surveillance du groupe de patients concerné. Cela permet de compiler des données concernant l’efficacité du traitement, ses effets indésirables ou encore les conditions réelles de son utilisation et ainsi d’approfondir les connaissances sur ce traitement et de vérifier le plus tôt possible si les bénéfices attendus sont effectifs. Enfin, le laboratoire s’engage également à déposer une demande d’AMM dans un délai maximum de 2 ans suivant l’octroi de l’AAP.
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