Les dépenses de médicaments risquent de déraper de 1,2 milliard d’euros de plus que prévu en 2024, a soudainement détecté la Direction de la sécurité sociale (DSS), alors que les discussions sur le budget de la sécurité sociale ont débuté il y a plusieurs semaines. Le niveau de remises consenties par les laboratoires est inférieur aux prévisions, a justifié le ministre du Budget et des Comptes publics, Laurent Saint-Martin, lors de l’ouverture des débats sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2025 au Sénat, lundi 18 novembre. Le gouvernement a donc revu sa copie avec une hausse des dépenses de santé de 0,8 milliard d’euros pour l’ONDAM 2024. Et pour « contenir » le dépassement, le ministre du budget propose « notamment de mobiliser différents leviers de maîtrise de dépenses des médicaments pour un rendement estimé à 600 millions d’euros. » Comme un coup de massue, il a ainsi annoncé baisser le plafond des remises sur les médicaments génériques « pour environ 100 millions d’euros ». La réponse de la profession ne s’est pas fait attendre. « Ces remises participent à l’économie des officines, sont déclarées par le CEPS et intégrées dans l’observatoire de la rémunération des officines de la CNAM », rétorque Pierre-Olivier Variot, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO).
30,10 % de l’EBE
De fait, selon les projections de Joël Lecœur, expert-comptable et président du réseau CGP, sollicité par le syndicat, « pour une officine moyenne issue de nos statistiques 2024, la remise plafonnée à 40 % sur le générique représente environ 78 000 euros. Ce montant est à comparer à la marge, l’excédent brut d’exploitation (EBE) et la rémunération moyenne du titulaire. Soit 11,24 % de la marge brute globale, 30,10 % de l’EBE et 129 % de la rémunération nette du titulaire, (87 % de la rémunération brute) ». Cette nouvelle offensive contre l’économie officinale est d’autant plus ressentie comme une injustice que les pharmaciens ont le sentiment de contribuer aux efforts d’économies sur le médicament. « Cette transparence dans les remises a permis de faire des économies importantes tout en permettant au CEPS de continuer à baisser les prix des médicaments matures de façon très importante », relève l’USPO dans un courrier qui sera prochainement envoyé à la ministre de la Santé, Geneviève Darrieusecq. Le syndicat souligne des baisses de remises déjà intervenues sur certains médicaments, notamment sur ceux à base d’amoxicilline ou de prednisolone, remisés à 2,5 %.
Biosimilaires gagnants ?
De là se demander si les pharmaciens seraient victimes d’un jeu de dupes ? Il n’y a qu’un pas. Car en juin dernier, les représentants de la profession avaient reçu du ministre de la Santé d’alors, Frédéric Valletoux, l’assurance d’une libéralisation des remises sur les biosimilaires. Jamais, il n’avait été question à l’époque de baisser les remises génériques. Or aujourd’hui, l’incitation pour promouvoir les biosimilaires et les hybrides via des remises (de 200 à 300 millions d’euros, selon les estimations, la liste n’étant pas encore fixée) s’opère aux dépens des remises génériques. Ni plus, ni moins. Le constat est amer pour Alain Grollaud, président de Federgy, la chambre syndicale des groupements et enseignes de pharmacie. « Cet acharnement est d’autant plus incompréhensible dans la mesure où la substitution des biosimilaires pourrait rapporter 1 milliard d’euros d’économies à l’assurance-maladie. Mais comment motiver les pharmaciens s’ils n’ont aucune visibilité sur leur rémunération ? » Et sur la rétribution du travail de pédagogie qui s’annonce au comptoir. Car toujours lors de la même séance de lundi dernier, le ministre du Budget et des Comptes publics, Laurent Saint-Martin, a déclaré « nous proposons d’introduire le tiers payant pour les médicaments biosimilaires et hybrides pour accélérer leur diffusion à l’instar de ce que nous faisons déjà sur les génériques, ce qui permettrait d’économiser 50 millions d’euros ». Des biosimilaires pour lesquels le principe de remises, lui, a donc été admis et inclus dans le PLFFS pour 2025. « Les sénateurs ont validé l’article sur les biosimilaires et ils ont en plus rajouté le fait de pouvoir avoir les princeps sous TFR si jamais il y avait égalisation de prix, ce qui est plutôt une bonne mesure », détaille Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF).
Revenant sur les remises génériques, le président de la FSPF ne saisit pas « quel impact cela pourra avoir sur les comptes sociaux, sauf à diminuer d’autant le prix des médicaments ». Il tient à tempérer la portée de cette décision qui, si elle venait à être entérinée dans le PLFSS 2025, ferait en tout état de cause l’objet de discussions ultérieures entre les représentants de la profession et la Direction de la Sécurité sociale (DSS). Les taux précis des remises sur les génériques et les biosimilaires seront en effet fixés par voie réglementaire, à l’issue de négociations qui ne pourront démarrer qu’une fois le PLFSS voté. « Ces négociations vont durer quelques mois, avertit déjà Philippe Besset. Elles devront aboutir à un taux de remises, ou bien à plusieurs taux de remises, sur les génériques, les biosimilaires mais aussi sur la liste des produits et prestations (LPP) », explique-t-il.
Des mois pourraient donc s’accumuler d’ici à ce que cette mesure prenne effet. À titre d’exemple, ce n’est qu’aujourd’hui que les syndicats de la profession sont invités à communiquer le taux de remises qu’ils souhaitent voir appliquer aux dispositifs médicaux. Une mesure prévue à la Loi de financement de la Sécurité sociale pour… 2023.
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