Adjoint et titulaire ont beaucoup en commun : mêmes qualifications, mêmes fonctions, mêmes responsabilités (hormis financières). Mais le premier, subordonné au second, est dans la situation d'un employé vis-à-vis du titulaire, ce qui n'est pas sans comporter certains motifs de conflits. Une notion que Thomas Roussel, directeur des opérations chez Atoopharm*, définit comme une situation de blocage entre au moins deux personnes qui ont un intérêt ou un objectif commun et sur lequel elles ne sont pas d’accord.
À l'officine comme dans la plupart des lieux de travail, les sujets de désaccords sont nombreux : griefs qui peuvent dépendre du Code du Travail et de la Convention collective concernant les jours de congé qui ne sont pas appliqués, les grilles de salaires, la rémunération des gardes, les indemnités de remplacement, les absences sans oublier la question du licenciement qui est un des thèmes d’opposition les plus fréquents ; opposition d'ordre professionnel qui peut relever du non-respect du code de la Santé publique, du code de déontologie, de la convention pharmaceutique ou des erreurs de délivrance…
Communiquer
On connaît généralement les procédures qui permettent à bien des conflits d'être évités. « Une grande part de la relation future avec le titulaire se joue au moment de la définition du poste », estime Thomas Roussel. La description des taches à effectuer, des horaires à respecter, du nombre de jours de congé, la rémunération des gardes, les conditions de remplacement et bien sûr le coefficient de rémunération doivent faire l'objet d'un descriptif détaillé et écrit. Mais il faut aller plus loin et aborder la question de l'évolution du poste, les nouvelles missions à remplir, la répartition des actes…
Le cadre de travail doit être clairement posé et, au besoin, l'adjoint peut demander à ce que soient précisés les objectifs de l'officine. Plus nombreux seront les points abordés, moins il y aura de risque d'incompréhension ou de déception. Malgré tout, un contrat de travail respecté à la lettre n'empêche pas l'émergence de problèmes, les crispations ou les attentes. Des sources de conflits latents qu'il faut pouvoir repérer à temps pour les désamorcer. Ici, le maître mot sera la communication. « Elle est la clé de voûte d'une bonne entente entre adjoint et titulaire qui rejaillit sur toute l'équipe », rappelle Thomas Roussel. « L'absence de dialogue ou une communication trop pauvre est une source de conflit majeure car alors, on laisse les questions sans réponses, on permet aux quiproquos de survenir, on ne sait pas ce que pense l'autre… » La communication informelle est la plus importante à mener. Il s'agit d'entretenir l'échange au quotidien, de livrer ses ressentis. C'est une communication d'adulte à adulte qui prouve que chacun est considéré en tant qu'être humain. Elle diffère de la communication formelle qui a cours lors d'un entretien d'évaluation, par exemple, et qui privilégie le descriptif d'une mission ou l'énumération des compétences.
L'adjoint comme moteur
La capacité d'entretenir le dialogue au jour le jour ne doit cependant pas masquer la nécessité de rencontrer le titulaire lorsqu'un problème se concrétise. Ce type d'entretien doit être sollicité par l'adjoint car c'est à celui qui ressent le malaise de mener la démarche. Attention, cependant, à bien préparer son intervention car souvent, le titulaire manque de temps et il faudra être clair et concis pour transmettre au mieux son message. « La plupart du temps, les griefs de l'adjoint sont liés à l'évolution professionnelle », précise Thomas Roussel. « Que ses missions soient jugées trop routinières, qu'il manque de responsabilités, qu'il ne progresse pas en compétence, qu'il ne bénéficie pas de formation, sont quelques-unes des plaintes les plus fréquemment évoquées ». En seconde position, arrivent le regret de ne pas être assez sollicité dans les décisions liées à l'officine et celui de ne pas être suffisamment valorisé. Pour que ces griefs soient communiqués efficacement au titulaire, l'adjoint doit structurer son discours de façon à focaliser sur les faits. Des règles existent pour organiser son exposé comme celle du « quoi, comment, qui, quand » qui permet d'exprimer d'une manière concise et détaillée un problème, une demande, une attente.
L'adjoint devra aussi livrer son ressenti face à la situation – « ça m'a déstabilisé, ça m'a contrarié » – car le titulaire doit comprendre et mesurer l'impact du problème sur son collaborateur. « Le ressenti est fondamental à exprimer. Mais il s'agit moins de décrire un fait – " vous ne m'avez pas confié cette mission " – que de livrer son sentiment quant au fait - " Je suis déçu que vous ne m'ayez pas confié cette mission " ».
Là ne se borne cependant pas l'entretien car l'adjoint, en fin d'exposé, doit proposer des solutions ou avancer des pistes à étudier pour résoudre le problème. « L'adjoint occupe un poste important dans l'officine. Il doit être une force de proposition, se faire le relais de ce qu'il constate au comptoir, donner des idées pour améliorer le fonctionnement de l'entreprise ». Souvent, l'adjoint devra faire le premier pas vers le titulaire mais si la communication s'établit au sein du tandem, l'ambiance s'en ressentira et toute l'équipe en bénéficiera.
En cas de conflit
Si malgré tout, le conflit se déclare, la première attitude à avoir est la recherche de l'entente.
Le code de déontologie prévoit en effet que les pharmaciens impliqués dans un litige doivent tenter de le résoudre avant toute autre démarche. En cas d'échec de cette tentative préalable, le Conseil de l’Ordre peut être saisi. Il suffit alors de suivre une procédure bien huilée : les personnes impliquées doivent contacter par écrit le président du Conseil dont elles dépendent. Ce dernier va examiner les suites qu'il entend donner à cette saisine. Il pourra notamment désigner un membre de son Conseil pour faciliter le dialogue et l'échange entre les pharmaciens. Cette démarche permet de mettre le problème en perspective et témoigne, de part et d'autre, d'une certaine volonté de communiquer et de s'entendre. De nombreux conflits sont ainsi résolus. En revanche, si le dialogue ne suffit pas à régler le différend, il est possible de saisir le Conseil des Prud’hommes. Une procédure judiciaire dans laquelle un syndicat peut assister le salarié. Cet encadrement peut être poussé : étude du litige et définition des droits du plaignant, aide à la négociation des indemnités, respect de la procédure (courrier recommandé, délais, convocations, entretiens…), aide à la constitution du dossier… La compétence du syndicat, lors d'un conflit avec le titulaire, se borne cependant au cadre du Code du travail.
*Sujet réalisé en collaboration avec Atoopharm (www.atoopharm.fr), organisme de formation en e-learning qui accompagne les titulaires et les équipes officinales pour renforcer leurs compétences notamment en termes de management.
Près de 40 % du chiffre d’affaires
Médicaments chers : poids lourds de l’activité officinale
Les concentrations continuent
Hygie 31, Giropharm : grandes manœuvres au sein des groupements
Valorisation et transactions en 2023
La pharmacie, le commerce le plus dynamique de France
Gestion de l’officine
Télédéclarez votre chiffre d’affaires avant le 30 juin