De nombreux pharmaciens essaient aujourd’hui de renégocier leur emprunt, souvent parce qu’ils ont acheté trop cher ou qu’ils ont des difficultés financières, et qu’un ré-étalement de leur dette est nécessaire.
Mais que peut-on renégocier exactement avec la banque ? Quelles sont les garanties que celle-ci peut exiger dans ce cas ? Pour le savoir, il faut d’abord connaître les règles en vigueur aujourd’hui pour le financement des officines.
« Les banques souhaitent prêter le moins possible, sur la durée la plus courte possible, et au taux le plus haut possible. » La formule, qui revient souvent dans la bouche des pharmaciens à la recherche d’un crédit, est certes un peu caricaturale, mais elle correspond aujourd’hui à une certaine réalité.
En théorie, en effet, les conditions d’emprunt sont aujourd’hui très avantageuses, avec des taux historiquement bas. Mais, pour cette raison peut-être – avec des taux bas, la rémunération des banques est faible – et aussi parce que de nombreuses petites officines sont en difficulté, convaincre une banque de prêter de l’argent est devenu très difficile. « Les banques ne se battent plus pour financer les pharmacies, c’est clair », confirme Philippe Becker, directeur du département pharmacie de Fiducial.
Or, justement, ce sont souvent ces pharmacies à petit chiffre d’affaires qui ont besoin de renégocier leur emprunt initial, non pas tant pour baisser leur taux de crédit qui est souvent déjà bas, mais pour modifier les conditions de remboursement, afin de soulager la trésorerie.
Fréquemment, on renégocie l’emprunt auprès de l’établissement qui a financé l’acquisition. Mais pour mener à bien cette négociation, il est toujours conseillé de comparer les offres du marché, et pas seulement en termes de taux, mais aussi d’assurance de prêt ou encore de garanties.
Quels sont les taux actuels ?
Le loyer de l’argent, au plus bas ces derniers mois, a tendance à augmenter un tout petit peu depuis quelques semaines. Mais les taux de crédit restent néanmoins extrêmement intéressants pour les pharmaciens qui souhaitent emprunter ou réemprunter pour leur officine, avec une moyenne comprise entre 1,5 et 1,9 % hors assurance. On trouve ainsi, assez facilement, un taux inférieur à 2 %, sauf si le dossier présenté n’est pas bon, auquel cas il faudra souvent accepter un taux un peu supérieur.
Neuf fois sur dix, ce taux est un taux fixe, et donc constant sur toute la durée du prêt. Quelques banques (le Crédit Mutuel notamment) proposent des taux variables plafonnés ou « capés », mais cette formule a peu de succès. Il faut savoir qu’avec un financement à taux variable plafonné, les échéances de remboursement sont contenues dans une fourchette, ce qui permet en principe de profiter d’une baisse éventuelle des taux d’intérêt tout en étant protégé d’une hausse excessive de ces taux. Mais les taux étant déjà très bas, il y a peu de chance qu’ils baissent à nouveau.
Il existe aussi des variantes. Par exemple, on peut opter pour une formule à taux fixe mais avec des échéances modulables. Dans ce cas, l’emprunteur module ses remboursements à la hausse ou à la baisse, pour les adapter aux ressources de l’officine.
Quelle durée d’emprunt ?
La durée du crédit accordé pour la reprise d’une officine est en général fixée à douze ans. Il y a encore quelques mois, les banques pouvaient accorder des prêts jusqu’à quinze ans, afin de « faire passer » le financement lorsque la capacité d’emprunt du pharmacien était limitée. Mais cette facilité accordée par les banques n’a plus cours aujourd’hui, ou de moins en moins. « Les banques accordent des crédits pour des durées plus courtes », explique Michel Watrelos, expert-comptable du cabinet Conseils et Auditeurs Associés.
En ce qui concerne la quotité de prêt accordée, elle ne peut concerner que le fonds lui-même. Le pharmacien qui souhaite emprunter doit toujours financer lui-même, avec son apport personnel, le stock et les frais d’acquisition (droits d’enregistrement, commission d’agence, etc.). Sauf cas très particulier, on ne peut donc jamais emprunter au-delà de la valeur du fonds. Cette règle vaut à la fois pour l’emprunt initial et l’emprunt renégocié.
Quelle assurance de prêt ?
Quand le pharmacien souscrit un prêt pour son officine, il doit souscrire aussi une assurance qui garantit à la banque les remboursements en cas de décès ou d’invalidité définitive (en revanche, la garantie d’incapacité temporaire est facultative).
Cette assurance renchérit le coût du financement dans une proportion qui peut aller jusqu’à 0,6 point. Mais, surtout, son montant varie assez sensiblement selon la situation personnelle du pharmacien et son état de santé : plus le pharmacien est âgé, notamment, et plus le prix de cette assurance est élevé.
Pour faire baisser ce coût, on peut faire jouer la concurrence. En effet, tout pharmacien est libre de souscrire une assurance emprunteur auprès de l’assureur de son choix, et il peut même changer d’assurance de prêt jusqu’à un an après la signature du prêt. Toutefois, il est en général préférable de choisir un assureur spécialisé dans les professions de santé (MACSF, La Médicale…) dans la mesure où, si l’assurance doit jouer, le degré d’invalidité sera évalué et indemnisé selon un barème spécifique à la profession.
Quelles garanties ?
Le problème des garanties est crucial en cas de renégociation. Les garanties traditionnelles qu’exigent les banques sont la caution personnelle et le nantissement du fonds de commerce. Pour un emprunt d’un million d’euros, par exemple, le fonds sera nanti à cette hauteur, avec une caution personnelle du titulaire pour un montant de 300 000 ou 400 000 euros. Cette caution peut être demandée sur toute la durée de l’emprunt, ou sur une durée plus courte, cinq ou sept ans par exemple. Bien entendu, il vaut mieux un cautionnement pour une courte durée.
Quand il s’agit du financement d’une pharmacie en société ou du financement de parts sociales, les banques ont un problème : elles exigent certes un nantissement des parts sociales, mais en sachant que ce type de garantie a moins de valeur. Financer des parts de société demande donc une certaine ingénierie de la part des banques, et toutes ne peuvent pas l’apporter. C’est pourquoi le financement ou le refinancement de parts sociales présente un risque plus élevé pour les banquiers, d’où une concentration des demandes, pour les officines en société, vers les établissements spécialisés dans la profession.
Les pénalités applicables
Quand on solde un emprunt initial pour en souscrire un nouveau, il faut faire attention aux pénalités de remboursement anticipé. Pour les calculer, les banques appliquent des règles qui leur sont propres, puisque le montant de ces indemnités n’est pas plafonné pour les crédits professionnels. Ce montant peut donc varier beaucoup d’un établissement à un autre. Selon le cas, la somme à verser peut aller de six mois d’intérêts à 3 % ou davantage du capital restant dû. Et certaines banques interdisent même tout remboursement anticipé pendant les premières années du crédit.
Bref, au moment où le pharmacien souscrit un emprunt, il doit toujours se soucier des indemnités de remboursement anticipé prévues au contrat, et éventuellement essayer de les négocier.
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