Un an après le lancement de « la stratégie de transformation du système de santé », un projet de loi santé a été présenté lors du conseil des ministres du 13 février.
Ce texte donne l'occasion au gouvernement de rouvrir un certain nombre de chantiers, dont celui de la prescription dématérialisée. Ce projet avait été initialement confié à l’assurance-maladie dans le prolongement de la loi de 2004 (1) qui, déjà, stipulait qu’une « ordonnance comportant des prescriptions peut être formulée par courriel dès lors que son auteur peut être dûment identifié, qu'elle a été établie, transmise (...) dans des conditions propres à garantir son intégrité et sa confidentialité, et à condition qu'un examen clinique du patient ait été réalisé préalablement, sauf à titre exceptionnel en cas d'urgence ».
L’objectif du gouvernement est aujourd’hui d’accélérer le développement de l'e- prescription. Bien qu'approuvé dès 2011 par les pharmaciens et expérimenté dans trois départements (2) tout comme dans les territoires de santé numérique (TSN), ainsi que par quelques initiatives comme celle de Pharma Express, ce dispositif a souffert de nombreux retards. Face à l’émergence de plateformes médicales étrangères comme Zavamed (voir ci-dessous), et surtout face à l’avancée de la téléconsultation, médecins et pharmaciens ressentent le besoin d’encadrer la prescription et la délivrance par des règles clairement énoncées.
Pour le Dr Jacques Lucas, vice-président du Conseil national de l’Ordre des médecins (CNOM), à l’heure de la télémédecine, il est anachronique d'observer que les ordonnances ne soient toujours pas dématérialisées. Outre cette incongruité, l’e- prescription permettrait de résoudre les nombreux vols d’ordonnanciers et les falsifications d’ordonnances. « C’est donc une question de logique mais aussi de sécurité sanitaire », assène-t-il.
Outil essentiel de l’interpro
Les pharmaciens ne disent pas autre chose. Dans son livre vert « Pharmacie connectée et télépharmacie », l’atelier « Nouvelles technologies » du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens (CNOP) affirmait en novembre dernier : « la France ne peut plus se permettre de se disperser dans des expérimentations locales, rarement interopérables ». Il s’agit, selon le CNOP, « d’accélérer le rattrapage du retard que nous avons pris sur beaucoup de pays, alors que l’e prescription est un élément clé avéré du renforcement de la coordination entre professionnels de santé ».
Cela doit passer, selon lui, « par des synergies entre le dossier médical partagé (DMP), le dossier pharmaceutique (DP), la messagerie sécurisée de santé (MSS) et la prescription électronique (PEM2D) ». Une prescription électronique de médicaments pour laquelle l’instance ordinale se déclare prête à se mobiliser « en travaillant avec l’assurance-maladie sur l’interconnexion de nos systèmes ».
De son côté, le Dr Lucas indique que les médecins qui disposent de tous les outils et des infrastructures via leur logiciel d’aide à la prescription (LAP) pourraient déposer leur prescription sur un serveur à partir duquel le patient irait récupérer son ordonnance. Pour l'heure, le virage numérique prévu par le projet de loi santé ne précise pas les modalités de la mise en œuvre de l’e-prescription. Il envisage seulement que les patients pourront ouvrir leur propre espace numérique de santé. Ce qui est déjà sûr, c'est que médecins et pharmaciens souhaitent travailler main dans la main à ce projet, avec pour exigence commune, le respect du libre choix du pharmacien par le malade. « C'est également un souhait des associations de patients », ajoute Alain Delgutte, président de la section A (titulaires), du CNOP.
Alors que le projet de loi sera présenté au printemps à l’Assemblée nationale, les réglages pratiques de l’e-prescription, et principalement l'épineuse question de l'hébergeur des prescriptions dématérialisées, seront arbitrés par des ordonnances gouvernementales. Ces textes préciseront les règles relatives aux conditions de certification des logiciels d’aide à la prescription (LAP) et à la dispensation (LAD), tout en assurant la sécurité et l’intégrité des données, en vue de généraliser par étapes la prescription électronique.
Ces exigences techniques ne feront que concrétiser et renforcer la coordination entre les professionnels de santé voulue par la loi santé. « L’e-prescription est en effet un outil qui va faciliter les échanges entre médecins et pharmaciens, renforcer leur coopération, leur donner le goût d’organisations qui vont leur permettre de mieux travailler ensemble », remarque le Dr Marie Tamarelle-Verhaeghe, députée de l'Eure et responsable du texte pour le groupe LaREM. Une plus-value dont il serait dommage de se priver.
(1) Loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l'assurance-maladie, art. 34.
(2) Lancée en novembre 2017 dans trois départements (Val-de-Marne, Saône-et-Loire et Maine-et-Loire). Baptisé PEM2D, cette « prescription électronique des médicaments » est opérable via deux éditeurs de LAP et deux éditeurs de logiciels pour pharmacies (dont Pharmagest et Smart Rx).
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