Prévention du vieillissement, lutte contre l’iatrogénie

Un nouveau regard sur la prise en charge officinale des seniors

Publié le 17/09/2009
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Le laboratoire Mylan vient de donner le coup d’envoi du premier thème de son programme de formation, d’information et de services spécifiques proposé aux pharmaciens concernant « La prise en charge officinale des seniors », dans le cadre de son initiative « Mon Médicament et Moi ». Un enjeu considérable pour l’officine lorsque l’on songe que les plus de 65 ans représentent actuellement 10 millions de personnes et France et que la patientèle de certaines officines est déjà constituée aux trois quarts par des seniors. Explications.

AINSI QUE le souligne Didier Barret, président de Mylan Europe et de Mylan France, « le fait d’être le leader dans le domaine des génériques, et le 2e laboratoire pharmaceutique français en volume tous médicaments confondus, confère des responsabilités particulières, parmi lesquelles celle de concourir au bon usage du médicament. C’est dans cet esprit que s’inscrit le développement de cette démarche conçue comme une opération utile et pertinente ».

Selon une enquête réalisée en juin 2009 par Mylan auprès d’environ 300 pharmaciens d’officine, plus de 80 % des pharmaciens souhaitent disposer d’informations sur les attentes des seniors à l’officine et 66 % d’une information sur le bon usage du médicament en ce qui concerne cette population. Ces résultats ont conforté l’intention de Mylan de mettre en place une série de symposia régionaux, dans 16 grandes villes de France, entre octobre et décembre, pour le pharmacien et son équipe, afin d’approfondir leurs connaissances de ces patients à l’officine.

Chaque réunion comprendra trois grandes parties, à savoir l’image du senior aujourd’hui, ou « Comment rajeunir notre regard sur les seniors », présenté par un sociologue expert de la « séniorisation » de la société, le point de vue d’un médecin gériatre pour comprendre comment « mieux appréhender les spécificités des seniors à l’officine » et, enfin, l’intervention d’un pharmacien hospitalier d’établissement gériatrique sur le rôle majeur du pharmacien dans le « bon usage du médicament chez les seniors ».

Mieux intégrer les spécificités des seniors à l’officine.

« Le vieillissement n’est pas une maladie mais un processus physiologique consistant dans la diminution des réserves fonctionnelles, un phénomène très variable d’un patient à l’autre », rappelle le Dr Marie-Agnès Artaz (gériatre à l’hôpital Corentin Celton, Issy les Moulineaux). On distingue trois façons de vieillir : le vieillissement réussi, dans lequel il n’y a pas de modifications des réserves fonctionnelles et existe donc une bonne conservation des capacités d’adaptation, le vieillissement physiologique, foncièrement normal, caractérisé par une diminution des réserves fonctionnelles mais sans pathologies d’organe, comme par exemple la diminution progressive de la filtration glomérulaire rénale, et le vieillissement pathologique, qui s’accompagne de maladies chroniques évolutives, de handicaps et de dépendance.

Le concept de fragilité, qui a émergé ces dernières années en gériatrie, a permis de comprendre pourquoi certains patients entrent dans une spirale de déclin. Se définissant comme une diminution des réserves fonctionnelles de plusieurs organes, c’est un état instable à haut risque de décompensation pouvant faire suite à la moindre agression. Mais la fragilité est évitable au prix de la mise en œuvre d’une prévention adéquate à laquelle peut concourir le pharmacien. De nombreux outils utilisés pour identifier les personnes fragiles sont adaptables à l’officine, explorant la mobilité, la nutrition et la cognition.

Le domaine sensoriel est également majeur et le développement des « simulateurs de vieillesse » développés par l’Institut de prévention des accidents domestiques, permettent d’appréhender divers handicaps très fréquents, comme la cataracte, le glaucome, la DMLA, le vieillissement auditif et les problèmes de mobilité.

L’enjeu du bon usage du médicament.

« Il est fondamental de connaître les raisons expliquant que les seniors soient plus exposés aux risques iatrogéniques », explique Marie-Claude Guelfi, pharmacien chef à l’Hôpital Sainte Perrine, à Paris, et responsable du diplôme universitaire gérontologie et pharmacie clinique à Paris 5. L’iatrogénie est, à cet âge, plus fréquente (2 fois plus d’effets indésirables médicamenteux après 65 ans), plus grave, voire mortelle (10 % des plus de 65 ans se présentant aux urgences viennent pour un effet indésirable, 20 % des plus de 80 ans sont hospitalisés à cause d’un effet indésirable).

D’autre part, certains effets du vieillissement retentissent sur les médicaments : diminution de la masse maigre au profit de la masse grasse, expliquant que les produits liposolubles vont avoir tendance à être retenus dans l’organisme et altération rénale progressive avec un risque d’accumulation des médicaments hydrosolubles. Il faut aussi penser à l’hypoalbuminémie (dénutrition, insuffisance rénale, syndrome inflammatoire), dans le cas des médicaments fortement liés à l’albumine. Tout cela doit conduire à privilégier, d’une manière générale (sauf pour les antivitamines K) les produits à demi-vie courte et à envisager une diminution des doses, tout en évitant que les pathologies ne soient sous-traitées, par crainte des effets indésirables, ce qui représente une situation fréquente.

Un autre type de retentissement correspond à la sensibilisation de certains organes et tissus par le vieillissement : la modification de la perméabilité de la barrière hémato-encéphalique rend le cerveau plus vulnérable à certains médicaments, notamment tous les sédatifs et les analgésiques centraux, les barorécepteurs permettant de réguler la pression artérielle fonctionnent moins bien, d’où un risque majoré d’hypotension orthostatique chez les seniors. « Mais il faut savoir que près de 60 % de l’iatrogenèse médicamenteuse est évitable chez les seniors et c’est aux acteurs de santé publique, notamment aux pharmaciens, de prévenir cette dernière », conclut Marie-Claude Guelfi.

D’après une conférence de presse des Laboratoires Mylan.
DIDIER RODDE

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 2686