Douleurs ostéo-articulaires

Une prise en charge tout en nuances chez le senior

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Publié le 12/06/2017
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Étiologies souvent multiples, mécanismes intriqués… les douleurs ostéo-articulaires du sujet âgé brouillent les pistes avec, dans la majorité des cas, une efficacité des antalgiques et une tolérance moindres. Les seniors peuvent pourtant prétendre à des traitements forts contre la douleur mais en veillant de près aux posologies et à la polymédication.
DOULEURS OSTEO

DOULEURS OSTEO
Crédit photo : PHANIE

Après 70 ans, la douleur chronique touche une personne âgée sur deux vivant à̀ domicile.

Après 70 ans, la douleur chronique touche une personne âgée sur deux vivant à domicile. Chez le senior, les douleurs ostéo-articulaires arrivent en tête. Elles sont dues à l’arthrose, aux dorsalgies et en particulier aux lombalgies, ainsi qu’aux pathologies spécifiques du sujet âgé comme la maladie de Horton, la pseudo-polyarthrite rhizomélique ou les rhumatismes inflammatoires. L’une des spécificités des douleurs ostéo-articulaires chez le senior est qu’elles sont souvent intriquées, avec par exemple, une douleur arthrosique associée à des douleurs rachidiennes ou autres. Ces douleurs font aussi plus fréquemment appel à des mécanismes multiples, à la fois inflammatoires, nociceptifs et neuropathiques. Dans la douleur chronique, une partie peut être nociceptive - typiquement la douleur arthrosique - et une autre, neuropathique. Enfin, « souvent, sur ces douleurs de fond, complète le Pr Serge Perrot, rhumatologue. « Evaluation et traitement de la douleur », hôpital Cochin (Paris), apparaissent des accès aigus qui pourront soit être le témoin d’une acutisation de la maladie chronique, soit révéler une seconde pathologie sous-jacente, d’où la grande difficulté diagnostique. Par exemple, une douleur générée par une fracture vertébrale peut être ignorée chez une personne lombalgique. Une douleur au genou en cas d’arthrose peut faire méconnaître une goutte ou une chondrocalcinose articulaire. Ces confusions sont parfois renforcées par des troubles cognitifs. »

Privilégier les approches localisées

La première des difficultés pour adapter un traitement, qui vaut pour l’ensemble des douleurs et en particulier ostéo-articulaires est que même en bonne santé, les seniors ont un ressenti douloureux altéré. Les modifications des fibres nerveuses étant inéluctables avec l’âge, les conséquences sont un ressenti altéré et différé de la douleur aiguë. À l’inverse, la douleur chronique est exacerbée du fait de l’épuisement - encore plus marqué chez le senior - des faisceaux inhibiteurs descendants. Par ailleurs, à pharmacopée égale, les prescriptions antalgiques chez le senior seront bien plus nuancées s’il souffre de comorbidités et donc de polymédication avec un risque d’effets indésirables et d’interactions médicamenteuses accrus, chez un sujet fragilisé et à l’homéostasie diminuée. « Dans le contexte des douleurs mixtes et chroniques des pathologies ostéo-articulaires chez la personne âgée, l’arsenal antalgique montre aussi très vite ses limites, souligne Serge Perrot. Il ne faudrait jamais fonder l’approche thérapeutique exclusivement sur les médicaments contre la douleur mais à l’inverse, tout en restant prudent, ne pas sous-traiter sous prétexte de l’âge avancé. » Dans les douleurs ostéo-articulaires, les approches localisées chez le sujet âgé (infiltrations, massages locaux, anti-inflammatoires locaux, froid ou chaleur, gestes localisés) sont privilégiées. L’association des approches non médicamenteuses (kinésithérapie, rééducation, balnéothérapie) et les aides techniques (cannes, orthèses) seront systémiquement envisagée.

Plusieurs préceptes dans la pratique devraient être observés : une initialisation prudente, un suivi pas à pas (du fait de phénomènes d’effets indésirables plus importants et d’accumulation chez le senior) et une réévaluation permanente car des changements peuvent intervenir sur le plan rénal ou hépatique, un état de déshydratation etc. Les seniors souffrant de douleurs ostéo-articulaires peuvent bénéficier d’une antalgie forte, tout en surveillant les posologies et la polymédication car les effets délétères des antalgiques sont souvent liés aux associations avec les autres médicaments (psychotropes-morphiniques).

Laetitia Vergnac
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Source : Le Quotidien du Pharmacien: 3358