Méthadone, Suboxone, Subutex et générique… Voilà à quoi se résume aujourd'hui l’arsenal thérapeutique dans la substitution aux opiacés en France. Dans certains pays européens, le nombre de molécules disponibles est au contraire beaucoup plus grand : « En plus de la méthadone et de la buprénorphine, on trouve la lofexidine en Italie et au Royaume-Uni, la levométhadone et la morphine en Allemagne, qui sont indiquées en tant que médicament de substitution aux opiacés (MSO) », explique Karima Hider-Mlynarz, évaluateur études économiques à l'ANSM. Leur mise à disposition dans l’Hexagone pourrait répondre à une demande. Mais les autorités de santé ne s’orientent pas vers un tel élargissement. En revanche, d’autres évolutions sont attendues.
Primoprescription de méthadone
Ainsi, les médecins de ville pourraient bientôt initier des traitements par méthadone, dont la primoprescription est, pour l'heure, réservée au CSAPA** et aux services hospitaliers. Dans cet objectif, l’étude Méthaville a évalué la faisabilité et la sécurité d’une telle mesure. « Les résultats, publiés en 2014, montrent que les effets pour le patient sont comparables, quel que soit le mode d’initiation du traitement, et que la prescription en ville est bien acceptée des patients et des médecins », commente Émilie Monzon, évaluateur à l'ANSM. Une telle extension ne pourrait toutefois se faire qu’en respectant certaines conditions : les médecins devront être agréés et collaborer avec les pharmaciens. Mais si la commission « Stupéfiants et psychotropes » de l’ANSM s’est prononcée favorablement pour cette primoprescription de méthadone en ville en 2014, celle-ci n’a toujours pas été mise en place.
Explosion galénique de BHD
Autre évolution attendue, de nouvelles formes galéniques de buprénorphine haut dosage (BHD) devraient prochainement être commercialisées. Première nouveauté dans les starting-blocks : des lyophilisats oraux de BHD (Orobupré 2 mg et 8 mg). Ce lyoc se place sur la langue (et non dessous), sa vitesse de dissolution est plus rapide que celle du Subutex (15 secondes) et il est non sécable. « Orobupré a obtenu son AMM en novembre 2017 mais n’est pas encore commercialisé », annonce Émilie Monzon.
Autre lancement en souffrance : un comprimé sublingual associant BHD et naloxone (Zubsolv), qui a obtenu son AMM en novembre 2017, n'est toujours pas commercialisé à ce jour. Zubsolv existera en 6 dosages. Il n’est pas interchangeable avec Suboxone et sa biodisponibilité lui est supérieure.
Des implants de BHD sont également à l’étude, comme le Probuphine, un implant sous cutané de 80 mg de BHD, déjà approuvé aux États-Unis. « En pratique, un médecin pose quatre implants à un patient qui est stable cliniquement avec une dose de BHD transmuqueuse n’excédant pas 8 mg par jour. L’implant est posé pour six mois, et il n’est pas possible de supplémenter le patient par BHD transmuqueuse. Si le patient en a besoin, il faudra alors reconsidérer le traitement », détaille Émilie Monzon.
Formes injectables
Par ailleurs, depuis longtemps, les usagers de drogues et les acteurs de santé réclament la mise sur le marché de BHD sous forme injectable, un mode d’administration convenant mieux à certains patients. Une forme à libération prolongée (développée par la société Camurus) à prendre en une injection toutes les semaines (8, 16, 24 et 32 mg) ou tous les mois (64, 96, 128 et 160 mg) est en cours d’évaluation. L’administration sera réservée aux professionnels de santé. Une autre spécialité injectable LP est sur les rangs (développée par la société Indivior). « Cette spécialité, déjà approuvée aux États-Unis sous le nom de Sublocade, est administrée chaque mois en sous-cutané par un professionnel de santé. Elle devrait être évaluée en Europe cet automne », confie Émilie Monzon.
Enfin, la commission « Stupéfiants et psychotropes » de l’ANSM souhaiterait qu’une BHD injectable à action rapide soit disponible. « Elle permettrait de se substituer aux opioïdes et de réduire les risques et les dommages liés à l’injection de comprimés de BHD, commente Émilie Monzon. Cette forme serait utile pour certains usagers injecteurs de BHD ou d’autres opioïdes, et/ou dépendants à l’injection. » Malheureusement, aucune demande d’AMM n’a été déposée pour un tel produit.
* Journée d'échange de la Commission des stupéfiants sur les traitements de substitution des pharmacodépendances majeures aux opioïdes en France (TSO).
** Centre de soins, d'accompagnement et de prévention en addictologie.
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