D’après une étude de l’institut BVA, 81 % des Français déclarent avoir déjà eu une lombalgie. Et ils sont 68 % à estimer que le repos constitue le meilleur remède contre la lombalgie. Une idée fausse que la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) s’apprête à combattre avec une campagne à destination du grand public : spot télévisé, affichage dans les transports de proximité, diffusion de contenus internet, et appli gratuite (Activ’dos).
Mais, face aux 33 % de médecins généralistes qui considèrent eux aussi que le repos est le meilleur remède contre la lombalgie, la CNAMTS a rassemblé des éléments d’information destinés aux professionnels de santé pour permettre une prise en charge adaptée. « Nous sommes face à une pathologie très fréquente, vis-à-vis de laquelle se véhiculent des idées en contradiction des recommandations émises par les différentes autorités, souligne le Pr Olivier Lyon-Caen, médecin-conseil de la CNAMTS. Il était donc temps de réunir un groupe de travail pluriprofessionnel visant à dégager les idées permettant une prise en charge adaptée. »
Le Collège de la médecine générale, la Société française de rhumatologie, la Société française de médecine physique et de réadaptation, la Société française de médecine du travail, et le Collège de la masso-kinésithérapie ont élaboré un livret d’information à destination des professionnels de santé (disponible sur ameli.fr), sur la prise en charge de la lombalgie commune chez le patient adulte.
Éviter gestes et examens inutiles
« Face à une lombalgie commune, il faut prescrire un traitement antalgique, expliquer et apaiser le patient (car cette pathologie engendre l’anxiété), éviter les gestes inutiles (examen radiologique, séances de kinésithérapie en phase aiguë), et maintenir l’activité (sauf en cas de profession particulièrement exposée) », résume le Pr Lyon-Caen, tout en avertissant que ces recommandations ne tiennent « que quand on est certain d’être face à une lombalgie commune ».
D’où la recherche de signes d’alerte afin de vérifier qu’il ne s’agit pas d’affection sévère sous-jacente nécessitant des examens complémentaires. Ces « drapeaux rouges » ont été élaborés en 2013 par la Société française de médecine du travail et validés par la Haute Autorité de santé (HAS). Il s’agit de l’âge d’apparition (inférieur à 20 ans ou supérieur à 55 ans), d’un traumatisme important récent, d’une douleur de type non mécanique (d’aggravation progressive, présente au repos et en particulier durant la nuit), d’une douleur thoracique, d’un antécédent de cancer, de l’usage prolongé de corticoïdes, de l’usage de drogue intraveineuse, ou d’immunodépression, d’une altération de l’état général, d’une perte de poids inexpliquée, de troubles neurologiques étendus (déficit du contrôle des sphincters vésicaux ou anaux, atteinte motrice des membres inférieurs, troubles sensitifs du périnée), d’une déformation structurale importante de la colonne vertébrale et de fièvre.
L’absence de signes d’alerte doit permettre d’éviter les actes inutiles. Selon les recommandations, il n’y a pas lieu de demander des examens d’imagerie dans les sept premières semaines (l’absence d’évolution favorable conduit à raccourcir ce délai). Une étude de l’Assurance-maladie réalisée à partir de données de 2014 du SNIIRAM (Système national d’information inter-régimes de l’Assurance maladie), montrait que 63 % des malades avaient bénéficié d’un acte d’imagerie du rachis lombaire dès le premier mois d’arrêt de travail, qu’un patient sur cinq a bénéficié de séances de kinésithérapie dans le premier mois de l’arrêt de travail, et qu’un patient sur deux a consulté un chirurgien (contre un sur trois qui a consulté un spécialiste médical, rhumatologue ou médecin de médecine physique et de réadaptation, un choix qu’il faudrait pourtant privilégier).
Face au risque de chronicisation
La prévention de la chronicisation demeure un point problématique. D’après l’étude BVA, un médecin sur deux seulement déclare connaître les signes évocateurs du passage à la chronicité. C’est donc l’occasion pour la CNAMTS (même si cette chronicisation s’observe dans seulement 6,8 % des cas) de rappeler les signes évocateurs, aussi appelés « drapeaux jaunes » par la Société française de médecine du travail en 2013. Il s’agit surtout d’attitudes et de représentations inappropriées par rapport au mal de dos, telles que l’idée que la douleur représenterait un danger et qu’elle pourrait entraîner un handicap grave, ou un comportement passif avec une attente de solutions placée dans des traitements plutôt que dans une implication personnelle active ; de comportements inappropriés face à la douleur, en particulier l’évitement ou la réduction de l’activité, liés à la peur ; de problèmes liés au travail (insatisfaction professionnelle ou environnement de travail jugé hostile) ou problèmes liés à une indemnisation (rente, invalidité) ; et de problèmes émotionnels tels que la dépression, l’anxiété, le stress, une tendance à une humeur dépressive et à l’isolement. Face à ces drapeaux jaunes, « il faut prendre contact avec la médecine du travail, pour éviter l’isolement de la personne concernée », estime le Pr Lyon-Caen.
Les coûts de la lombalgie sont de 580 millions d’euros pour la branche AT/MP (accidents du travail/maladies professionnelles), de 137 millions d’euros pour la branche maladie (en cas d’arrêt de moins de 6 mois) et de 216 millions d’euros pour la branche maladie (en cas d’arrêt de plus de 6 mois). Soit 933 millions en tout. « Cette campagne a pour but de parvenir à une médecine sobre, conduisant à une diminution des dépenses », souligne le Pr Lyon-Caen.
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