Depuis plusieurs mois, des présomptions s’accumulent pour suggérer l’effet bénéfique de la vitamine D contre le Covid-19, sans qu’il y ait encore consensus sur cette question. Ainsi, dès avril, une étude américaine proposait qu’un déficit saisonnier en vitamine D puisse expliquer partiellement les variations géographiques dans la sévérité de l’infection par le coronavirus. Le même mois, une autre publication américaine englobant des patients victimes du Covid-19 dans divers pays, et prenant en compte le rapport entre le taux de vitamine D, le niveau de protéine C-Réactive (CRP), un indicateur de l’inflammation et la sévérité de l’infection, a montré que le risque de développer une forme sévère de Covid-19 était plus élevé chez un patient carencé en vitamine D. En octobre, une étude espagnole trouvait un taux de vitamine D dans le sang des patients hospitalisés pour Covid significativement inférieur au taux mesuré en population générale : environ 82 % d’entre eux présentaient ainsi une carence. Une étude française publiée début novembre montre qu’une supplémentation régulière en vitamine D3 chez des sujets âgés infectés par le coronavirus réduit la sévérité de l’infection et améliore leur survie, mais elle ne permet pas, en revanche, de conclure à une action favorable de la prescription de vitamine D chez des patients alors qu’ils sont déjà victimes de signes sévères, du moins à la dose administrée (bolus unique de 80 000 UI). Ces publications et d’autres encore prennent un relief particulier dans le contexte sanitaire actuel, lorsque l’on sait qu’environ un adulte sur deux serait carencé en vitamine D en Europe occidentale.
Un stéroïde anti-inflammatoire
La vitamine D3 (cholécalciférol) est produite dans le derme à partir d’un précurseur stéroïdien, sous l’action des rayons UVB solaires, puis elle est activée par métabolisme dans le foie (en calcidiol ou 25-OH vitamine D3) puis le rein (en calcitriol). La vitamine D2, d’origine alimentaire, est présente dans les poissons gras mais se trouve en très faible quantité dans les autres aliments. Elle suit un métabolisme identique. Classiquement, le taux normal de 25-OH vitamine D est > 30 ng/ml (> 75 nmol/l) ; il y a insuffisance entre 10 et 30 ng/ml (25-75 nmol/l) et carence lorsque le taux est < 10 ng/ml (< 125 nmol/l).
Si cette hormone stéroïdienne est indispensable à la régulation du métabolisme phosphocalcique, elle a bien des actions pharmacologiques extra-osseuses. Son intérêt prophylactique contre les infections respiratoires à influenzavirus, rhinovirus, coronavirus est suspecté depuis longtemps au vu d’une corrélation entre la saison où sévissent ces virus et celle où la population est la plus carencée en cette vitamine ; de même, un taux sérique suffisant réduirait la sévérité de ces infections une fois déclarées.
Un effet sur l'« orage cytokinique »
La vitamine D régule la réponse inflammatoire et tempère probablement l’« orage cytokinique » à l’origine de la détresse respiratoire aiguë caractérisant les formes sévères et souvent létales du Covid. Elle agit aussi sur le système rénine-angiotensine, participant à l’entrée du coronavirus dans les cellules. Une cholécalciférolémie suffisante pourrait donc permettre de se protéger des complications les plus graves de l’infection et, peut-être, dans des proportions considérables puisqu’elle diviserait par deux la mortalité.
Pour autant, cela ne signifie pas qu’il faille supplémenter toute la population, du moins dans l’attente de résultats probants. En France, l'Académie de médecine précise que la vitamine D ne peut être considérée comme un traitement préventif ou curatif de l’infection par le coronavirus, mais qu’elle pourrait constituer un adjuvant utile aux autres médicaments. Elle recommande de doser le taux de vitamine D (25-OHD) sérique chez les personnes âgées de plus de 60 ans atteintes de Covid-19, et d’administrer, si carence, une dose de charge de 50 000 à 100 000 UI qui contribuerait à limiter les complications respiratoires. L’Académie préconise aussi de supplémenter à raison de 800 à 1 000 UI/j les personnes âgées de moins de 60 ans dès la confirmation du diagnostic de Covid-19 ; des spécialistes évoquent quant à eux une dose quotidienne allant jusqu’à 1 500 UI.
Cet intérêt nouveau pour la vitamine D se traduit dans son usage et ses ventes qui explosent cette année. Ainsi, les prescriptions hospitalières et ambulatoires sont de plus en plus nombreuses en France et, au Royaume-Uni, le gouvernement a décidé de la distribuer aux quelque 2 millions de personnes les plus vulnérables vis-à-vis de l’infection, et ce pendant quatre mois.
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