« A 10 ans, je mangeais énormément...
Mon entourage mettait cela sur le compte de l’adolescence. Dans le même temps, je souffrais d’une soif intense (près de 4 l d’eau/jour) et urinais très souvent. En 6 mois, j’avais perdu 10 kg. J’étais devenue extrêmement maigre. J’ai cru que j’allais mourir. Testant la présence de sucre dans les urines, par de simples bandelettes, mon pédiatre dépiste alors un diabète insulinodépendant et m’adresse au service hospitalier de diabétologie pédiatrique pour le confirmer (sans pour autant être en coma acidocétosique !).
J’allais devoir vivre avec ma maladie toute ma vie. Cependant, si je la soignais correctement, je n’engageais pas le pronostic vital. J’ai d’abord cherché l’autonomie par rapport à l’aspect technique. Puis, j’ai développé ma capacité à gérer le risque hypoglycémique en adaptant mon alimentation et les doses d’insuline. Je peux dire qu’à présent le diabète fait partie de moi, je l’ai complètement intégré, il n’est jamais un frein à vivre comme tout le monde. Pour cela, je dois le maîtriser. Cet état d’esprit s’est illustré lorsque j’ai désiré un enfant. Pour obtenir le feu vert de mon diabétologue, j’avais conscience de l’absolue nécessité d’un équilibre glycémique avant la conception. C’est pourquoi, une grossesse chez les femmes diabétiques dure, non pas 9 mois, mais 12 ! »
« Au tout début, j’étais soigné pour une dyslipidémie, par un traitement hypocholestérolémiant…
Puis, une glycémie un peu élevée justifia l’ajout d’un antidiabétique oral. Je pensais que ce dérèglement serait limité dans le temps. Je ne savais pas que les traitements antidiabétiques étaient là pour contrôler la maladie mais ne l’éliminait pas. Je n’avais pas conscience du caractère chronique de la maladie car physiquement, je ne sentais pas le diabète de type 2 : lorsque la glycémie oscille entre 0,8 et 2,5-3 g/l, on ne s’en rend pas compte ! C’est le phénomène d’escalade thérapeutique par ajout d’un autre antidiabétique oral puis finalement le passage à l’insuline qui m’a questionné. L’information prodiguée par les associations de patients a été alors déterminante pour que je prenne au sérieux (mais pas avec gravité !) ma maladie, que j’évalue ses risques sans dramatiser. J’ai assimilé que je ne vais pas me battre pour faire disparaître la maladie chronique mais que je devrais être vigilant vis-à-vis de ce que je choisis de manger et de la surveillance des complications au niveau du cœur, des yeux, des pieds. »
« Tousser et cracher le matin, pour moi, fumeur depuis des nombreuses années, c’était normal…
Le médecin du travail a cherché à plusieurs reprises de me dissuader de fumer. À son cabinet, il m’a proposé de mesurer mon souffle à l’aide d’un spiromètre miniaturisé, pensant me faire prendre conscience de la perte de mes capacités respiratoires. Oui, bien sûr, le VEMS (Volume Expiré Maximal en une Seconde), rapporté à la CV (Capacité Vitale, différence entre « gonflé à fond » et « vidé à fond ») témoignait d’une obstruction des bronches. Je ne voulais pas y accorder d’importance préférant m’adapter à mes limitations, en choisissant l’ascenseur plutôt que l’escalier par exemple ! Je ne voulais pas non plus regarder en face la dépression dans laquelle je vivais tous les jours. Mais au moins de janvier, les choses se sont aggravées et j’ai frôlé l’hospitalisation. Mon généraliste m’a adressé au pneumologue doté de matériel performant : la mesure du rapport VEMS/CV, bien inférieur à 75 % (ou encore celle du rapport VEMS/VEM6 inférieure à 80 %) authentifiait une BPCO que j’avais laissé évoluer sur plusieurs années. Le spécialiste m’expliqua que les exacerbations étaient fréquentes en hiver. »
« La première fois que mon médecin généraliste a fait la moue en prenant ma tension, je pensais que l’augmentation n’était pas catastrophique : 150 mm de Hg au lieu du « banal » 130 ou 140 mm Hg…
Je me suis dit que cela aller passer. Sans doute était-ce lié au stress : au travail en ce moment, les rythmes sont élevés. Cette fois, mon médecin désirait investiguer davantage. Connaissant mon activité professionnelle de cadre commercial dans un domaine à forte concurrence, il m’avait déjà recommandé une activité physique régulière. Non pas du sport intensif mais plutôt des activités d’endurance douce comme marcher, nager ou faire du vélo, plusieurs fois par semaine. Mais je ne l’ai jamais fait prétextant ma fatigue. C’est pourquoi, il m’a demandé de revenir quelques jours après : là encore la tension 150/90 restait élevée. Craignant un effet « blouse blanche », il m’a demandé de mesurer ma tension à mon domicile à l’aide d’un appareil d’automesure tensionnelle validé. Quand je suis revenu avec mon relevé de chiffres, le diagnostic d’HTA ne faisait plus de doute. Jamais je ne me suis senti malade, ne souffrant d’aucun symptôme gênant ou douloureux. Dans ma famille, il n’y a pas hypertendus. Par contre, mes repas, arrosés de bons vins pour faire plaisir aux clients sont trop riches en graisses et en sel ! »
De façon générale, le caractère insidieux de ces maladies chroniques engendre un retard diagnostic préjudiciable. Le pharmacien, en mesure d’identifier les situations de pré-maladie et d’identifier les facteurs de risque, peut jouer un rôle pertinent dans l’incitation à l’investigation médicale permettant de gagner de précieuses années de prise en charge. Il représente également, une aide dans le vécu de la médication chronique en veillant régulièrement à l’émergence de complications.
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