EN FRANCE, les véritables carences alimentaires sont rares. Il n’y a guère que l’insuffisance de fer, à rechercher notamment chez les enfants ou les adolescents fatigués, les femmes enceintes ou en âge de procréer, ou bien dans des situations inflammatoires (cancer, maladie intestinale chronique, insuffisance rénale). Dans ce cas, le médecin prescrit un dosage de la ferritine sérique ou du couple fer sérique et coefficient de saturation de la transferrine. Devant des symptômes d’anémie (fatigue, essoufflement, vertiges, palpitations…), de manque d’appétit mais aussi de teint jaune, de langue rouge, d’irritabilité et, plus graves, de symptômes neurologiques à type de fourmillements et d’engourdissement des extrémités et de dépression, il faut penser à des carences en vitamines B12 et B9 qu’un simple dosage sanguin permet de diagnostiquer.
Repérer la sarcopénie.
Les états de dénutrition sont beaucoup plus nombreux. En cause, toutes sortes de maladies ou de situations, chez les personnes âgées mais pas seulement : cancer, maladie aiguë (responsable d’un hypercatabolisme), pathologie chronique telle que BPCO, cirrhose ou Parkinson, opération chirurgicale abdominale, dépression, toxicomanie et alcoolisme, Alzheimer, problèmes buccodentaires ou perte des dents, polymédication (la prise de médicaments en début de repas avec un verre d’eau est anorexigène), médicaments responsables d’une altération du goût, d’une sécheresse buccale ou de troubles digestifs, dépendance, facteurs d’ordre social (isolement, difficultés financières, maltraitance)…
Mais la sarcopénie est déjà délétère. Pour repérer cette perte de masse musculaire (dès 50 ans), il suffit de demander au patient de se lever de sa chaise et de s’asseoir une dizaine de fois consécutives, exercice qui ne doit pas nécessiter trop d’efforts. La diminution de la force de préhension est un autre indicateur, plus précis : le patient saisit la poignée d’un dynamomètre de main et la serre le plus fort possible durant 5 secondes. Une valeur en deçà de 20 kg est un signe d’alerte. Autre possibilité pour éviter la dénutrition : s’assurer que les apports en protéines sont suffisants, ce qui est rarement le cas chez les personnes âgées. Il faut alors les convaincre d’avoir deux rations protéiques par jour qui permettent d’assurer un apport de plus d’1 g de protéines par kg et par jour et, si nécessaire, demander à l’entourage d’enrichir les repas ou de mettre en place un système de portage de repas. Si ces mesures ne suffisent pas, ajouter à l’alimentation des compléments nutritionnels oraux deux fois par jour.
IMC et MNA.
Un cran au-dessus, la dénutrition demande de réagir vite, de préférence quand le patient à domicile est encore en bonne santé. Mais les situations à risque ne sont pas toujours faciles à repérer. La mesure du pli cutané tricipital au niveau du bras, à mi-distance entre l’acromion et l’olécrane, donne déjà une indication et des signes physiques tels que cheveux secs et cassants, visage terne et amaigri, pétéchies, œdèmes des membres inférieurs peuvent alerter.
En pratique, explique Mireille Simon, responsable de l’unité Diététique et Nutrition au centre Alexis-Vautrin de Vandoeuvre-les-Nancy*, « le test le plus usuel et nécessitant le moins d’interprétations est le calcul de l’IMC (poids/taille au carré), sachant que les chiffres de référence ne sont pas les mêmes selon les âges. À partir de 70 ans, un IMC inférieur à 21 est trop bas alors que chez l’adulte plus jeune, le niveau d’alerte est fixé à 18,5 ». Autre indice parlant : le pourcentage et la vitesse de perte de poids. « Si la perte est de 5 à 10 % en 1 ou 2 mois ou de 10 à 15 % en 6 mois, la dénutrition est considérée comme modérée. Au-dessus de 10 % en 1 mois ou de 15 % en 6 mois, elle est sévère ».
Le MNA (Mini Nutritional Assessment) est, lui, un véritable outil validé pour surveiller le statut nutritionnel et dépister une dénutrition protéino-énergétique. Son intérêt majeur tient à sa capacité à détecter un risque de dénutrition avant toute perte de poids importante ou de baisse de l’albumine chez le sujet âgé. Ce questionnaire en 18 items porte sur l’IMC, la circonférence du mollet et du bras, le nombre de médicaments par jour, les maladies aiguës au cours des 3 derniers mois, la présence d’escarres, la mobilité, l’appétit, les habitudes alimentaires, les problèmes neuropsychologiques. Très sensible (à 96 %), reproductible et de faible coût puisqu’il ne comporte pas de dosages, ce test est facile à utiliser et bien accepté. Un score situé entre 17 et 23,5 est le reflet d’un risque de dénutrition et une correction nutritionnelle s’impose le plus tôt possible. En dessous de 17, la dénutrition protéino-énergétique est certaine, il faut alors mesurer les paramètres biochimiques comme le taux d’albumine dans le plasma et mettre en route une complémentation nutritionnelle orale.
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