La BHD sublinguale est autorisée depuis 1995 dans la prise en charge du patient opiodépendant (Subutex), et ses génériques sont commercialisés depuis 2006 ; la forme orodispersible (Orobupré) est disponible depuis 2018. Le profil pharmacologique de la BHD limite le risque de dépression cardio-respiratoire et de décès, même en cas d’intoxication aiguë ou d’association abusive aux benzodiazépines. Ce substitut inscrit sur la liste I est soumis aux règles de prescription et de dispensation des stupéfiants. Dans le cadre des mesures de réduction du risque et en accord avec l'ANSM, une brochure d'information doit être remise depuis mars 2019 au patient lors de la prescription ou de la délivrance de ces médicaments (elle est téléchargeable sur les sites internet des laboratoires commercialisant les spécialités).
Forme sublinguale. La BHD sublinguale (Subutex et génériques) s’administre, selon une nouvelle version de l'AMM actualisée en 2018, à la dose initiale de 2 à 4 mg/j en 1 prise quotidienne unique, à heure fixe (en principe le matin), au moins 24 heures après la dernière prise d’opiacés (la dose initiale était comprise précédemment entre 0,8 et 4 mg/j). Une dose supplémentaire de 2 à 4 mg peut être administrée à J1 en fonction des besoins individuels du patient. L'adaptation de la posologie jusqu’à la dose d’entretien se fait par paliers de 2 à 8 mg en fonction de l'état clinique et psychologique du patient ; durant cette période, il est recommandé de délivrer la BHD de façon quotidienne. La nouvelle version de l'AMM ne fait plus mention d'une posologie moyenne à 8 mg/j. Enfin, la posologie maximale journalière est passée de 16 mg/j à 24 mg/j. Le comprimé est à laisser fondre sous la langue cinq à dix minutes, sans le sucer ni avaler la salive malgré son amertume. Une posologie mal adaptée peut induire des signes de sous-dosage souvent discrets (apathie, état anxiodépressif, irritabilité, troubles du sommeil, signes de manque). Il est possible de passer de la BHD à la méthadone si besoin, en ménageant un intervalle libre d’environ 16 heures.
La BHD est moins toxique que la méthadone (moindre risque de dépression cardiorespiratoire, moindre sensation d’euphorie, lorsqu’elle est administrée isolément, par voie sublinguale, aux doses préconisées). Son administration peut induire céphalées, vertiges, asthénie, constipation, troubles du sommeil, nausées et vomissements, sueurs. Elle est contre-indiquée en cas d’insuffisance hépatique et respiratoire sévères, en association à la méthadone, avec les antalgiques opioïdes de palier III (diminution de l'effet antalgique), avec le nalméfène (Selincro) en cas de prise en charge concomitante d’une alcoolodépendance.
L’association aux benzodiazépines expose à un risque de décès par dépression respiratoire, notamment en cas d’usage détourné de la BHD par voie IV.
La BHD peut être utilisée pendant la grossesse : une adaptation de la dose quotidienne peut cependant être nécessaire afin de maintenir l'efficacité du traitement.
Forme orodispersible. Élargissant la gamme de médicaments à base de BHD, Orobupré (comprimé dispersible 2 et 8 mg) n’est pas équivalent au Subutex et à ses génériques. Il s’agit en effet d’un lyophilisat oral qui se disperse sur la langue en 15 secondes puis diffuse dans la bouche. Le patient ne doit pas déglutir pendant 2 minutes, ni boire ou manger pendant 5 minutes (rappelons que la BHD « classique », destinée à une administration sublinguale, se conserve sous la langue jusqu’à dissolution complète, soit environ 5 à 10 minutes). Cette dispersion rapide et l’absorption buccale augmentent la biodisponibilité. Une amertume en bouche moins forte et moins prolongée limite le risque de survenue de nausées, voire de vomissements (et donc d’usage détourné en « sniff »). De plus, en cas délivrance contrôlée avec prise devant un professionnel, il suffit de 15 secondes d’attente.
La BHD « classique » ne peut être substituée par Orobupré : si un switch est requis, avec accord du patient, il faut repartir avec une dose plus faible et refaire une titration. La dose quotidienne initiale recommandée est de 2 mg ; la dose quotidienne maximale est de 18 mg (24 mg pour Subutex et ses génériques). Le plus faible dosage d'Orobupré étant de 2 mg, ce médicament n'est pas approprié chez un patient stabilisé avec une dose de BHD sublinguale inférieure à 2 mg. Le potentiel de détournement de cette nouvelle galénique reste inconnu à ce jour. La place d'Orobupré dans la stratégie thérapeutique est la même que celle de la BHD sublinguale. Améliorant le confort d'utilisation, cette nouvelle galénique représente une option utile autant pour l’usager que pour le soignant lors d'une prise supervisée.
Association à la naloxone. L’association de la BHD à la naloxone, un antagoniste opiacé, s’utilise comme la BHD isolée (Suboxone 2/0,5 mg ou 8/2 mg et génériques). La naloxone prévient le détournement du médicament : elle n’est pas absorbée par voie orale, mais, en cas d’injection, elle provoque un syndrome de sevrage aigu (douleurs abdominales, douleurs musculaires, diarrhées, anxiété, sueurs).
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