Horaires, dates de congés, attribution de responsabilités ou simple incompatibilité d'humeur : les sources de conflit ne manquent pas dans les petites entreprises. S'ajoutent à cela de longues heures passées en huis clos, qui apprennent à mieux se connaître, mais pas forcément à mieux se supporter… Il revient au manager d'intervenir avant que la situation ne dégénère. C'est naturellement au titulaire de dénouer les fils d'un conflit. Mais, de plus en plus, cette mission est aussi confiée à un adjoint. Quand et comment déléguer la gestion des relations humaines à son collaborateur pharmacien ? Éléments de réponse apportés par quatre experts en management.
- L'adjoint est-il bien placé pour gérer les conflits ?
La gestion d'un conflit et, de façon générale, le management de l'équipe, n'est pas l'apanage du titulaire. De plus en plus, elle est déléguée à un collaborateur, qu'il soit ou non pharmacien. « Ce n'est pas une question de diplôme, mais de capacité à communiquer », estime Martine Camillerap, directrice de PKC Communication. Si le management n'apparaît pas comme une fonction première de l'adjoint, elle peut faire partie de ses attributions, bien au-delà de la gestion des achats ou du tiers payant. L'adjoint a les mêmes compétences professionnelles que son titulaire. Il est aussi salarié de l'officine, comme ses collègues préparateurs. Occupant cette position centrale, il peut faire office de courroie de transmission des informations entre les employés et le patron. « Le titulaire n'est pas forcément au courant de l'existence de tensions dans son équipe, indique Martine Camillerap. L'adjoint est mieux placé pour les détecter, et même pour les gérer. » Certaines qualités sont alors requises, outre l'indispensable motivation. Un manager doit faire preuve de capacités d'écoute et d'empathie. Pas si simple. « Cela veut dire qu'il doit intégrer les contraintes et les motivations qui conduisent l'autre à agir comme il le fait », développe Amandine Leterrier, responsable des formations du groupe Astera. Et puis un manager n'est rien sans son aptitude à la conciliation. « Gérer un conflit, c'est aider les personnes à trouver une solution. Ce n'est pas taper du poing sur la table. Il faut une main de fer dans un gant de velours », assure Martine Camillerap. Tout cela en toute humilité. « Ce n'est pas parce qu'on a des responsabilités qu'on détient forcément la vérité », ajoute la directrice de PKC Communication.
L'adjoint manager doit aussi s'attendre à occuper une position bien particulière aux yeux de ses collègues. « La responsabilité de la résolution des conflits, cela isole toujours un peu. On ne peut plus tout à fait avoir les mêmes rapports avec ses collègues », souligne Martine Camillerap. Aussi cette délégation de la gestion des conflits doit-elle s'inscrire dans un cadre plus général. « Ne lui donnez pas une importance excessive. Ce n'est qu'un alinéa dans la liste des responsabilités qui font que le travail se déroule bien tout au long de la journée », précise l'experte en gestion humaine. Sans être désignés managers, des adjoints peuvent jouer un rôle de médiateur ou indiquer au titulaire ce qui cloche au sein de l'équipe.
- À partir de combien de salariés peut-on déléguer ?
La réponse diverge selon les experts en management. Pour Jean-Paul Sécheresse, dirigeant de JPS Consultants, il y a un effectif minimal pour déléguer la gestion des conflits. « En dessous de dix salariés, les adjoints ont rarement une responsabilité d'encadrement, estime t-il. Ils relaient les consignes du titulaire, notamment en son absence. Mais ils ne sont pas forcément reconnus comme managers. En revanche, si l'équipe compte au moins cinq adjoints, un cadre peut avoir sous sa responsabilité un certain nombre de préparateurs. » Jean-Paul Sécheresse constate que, dans des entreprises de petite taille, un échelon hiérarchique supplémentaire ne se justifie pas et serait même néfaste. D'autres consultants ne partagent pas cet avis. Directrice de l'organisme de formation Girophorm, Sam Laroui-Barbe indique pour sa part qu'une délégation de la gestion des conflits peut se faire dès lors que l'officine compte un pharmacien adjoint.
- Quels intérêts pour l'adjoint et son titulaire ?
Déléguer une partie de son management n'est pas si aisé pour un titulaire. Il doit bien prendre conscience de ce que cela peut lui apporter. Soulagé de tâches quotidiennes et chronophages, il affine les objectifs de son entreprise à moyen et même à long terme. Il ne délègue donc pas par commodité ou pour fuir ses responsabilités. D'ailleurs la délégation n'empêche pas le contrôle, prévient Sam Laroui-Barbe. Selon les personnalités à encadrer, le manager est amené à choisir et à doser entre différents types de management, rappelés par Sam Laroui-Barbe : l'approche persuasive (mobiliser et convaincre), participative (faire participer), délégative (donner de l'autonomie à l'équipe) ou directive (organiser, planifier, contrôler). Première étape, le titulaire identifie ce qui peut et ne peut pas être transmis à son adjoint. Puis il fait des propositions à ce dernier, tout en validant ses capacités à remplir ses nouvelles missions.
Pour le pharmacien salarié, l'intérêt est de se préparer à une installation future. Ces motivations pourront d'ailleurs être évoquées au cours de l'entretien d'embauche, exprimées par l'employeur et aussi par le candidat. Si le titulaire lui en donne la possibilité, le pharmacien adjoint doit se tenir prêt à mouiller la chemise. « En général, les gens ne sont pas très friands de la gestion du conflit. On a tendance à espérer qu'il disparaisse tout seul, mais c'est rarement le cas. Si l'adjoint se montre impliqué dans le management, il pourra aussi prendre part à l'animation des réunions et aux entretiens de recrutement », propose Amandine Leterrier.
- Comment l'adjoint doit-il procéder ?
Le titulaire qui confie la gestion des conflits à son adjoint doit d'abord asseoir la légitimité et l'autorité de ce dernier. Ainsi, ses prérogatives seront détaillées dans les fiches de description de poste, qui définissent les attributions de chacun au sein de l'équipe. « Une mauvaise définition de ces tâches est à l'origine de malentendus, voire de conflits », avertit Martine Camillerap. Une fois ces règles fixées, elles doivent être respectées par l'équipe tout entière. Une réunion peut permettre d'indiquer ou de rappeler l'organisation de l'officine. « Quand le titulaire n'est pas là, chacun sait qui est en charge des priorités », souligne Jean-Paul Sécheresse. Des points sur les i qui ont un effet préventif sur l'apparition d'un conflit. Lorsqu'il est à un stade plus avancé, le premier acte de l'adjoint manager est d'identifier l'origine, le contexte et les principaux protagonistes du conflit. « S'il est lié à un intérêt ou à un besoin d'un salarié, la plupart du temps, une bonne communication suffit à le régler, explique Sam Laroui-Barbe. Mais s'il est consécutif à la confrontation d'opinions, c'est plus profond. Il faut alors s'en tenir aux faits et ne pas entrer dans l'affect. »
Ces éléments doivent être connus de l'adjoint qui s'engage dans la résolution des conflits. Dans tous les cas, il doit prendre de la distance par rapport aux événements. Mais ne pas trop tarder non plus. « Le malaise peut avoir des conséquences sur le reste de l'équipe et s'en ressentir sur la clientèle », prévient Amandine Leterrier. Une technique de conciliation consiste à recevoir les personnes impliquées dans le conflit, séparément, puis ensemble. Chacun devra faire des concessions pour parvenir à travailler dans de bonnes conditions. Si la tentative échoue, c'est au titulaire de reprendre la main, en procédant de même. Selon les cas, il sera accompagné ou non de son adjoint responsable pendant les entretiens. Pour certains salariés, en effet, il est difficile d'avoir à s'expliquer devant plusieurs managers.
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