L’ÉVOLUTION du temps partiel des salariés des officines n’est pas un long fleuve tranquille… À la suite de la loi sur la sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013, les parties signataires de la convention collective de la pharmacie ont conclu, en décembre 2013, un accord sur le temps partiel, qui prévoyait notamment une durée de travail minimum de 16 heures par semaine pour les adjoints et les préparateurs - au lieu de 24 heures selon la loi de sécurisation de l’emploi -, une majoration de 15 % des heures complémentaires effectuées au-delà du temps de travail contractuel, et la possibilité de conclure avec les salariés des avenants de compléments d’heures.
Las ! Au début du mois de janvier 2014, la CGT et Force ouvrière ont fait valoir leur droit d’opposition à cet accord, ce qui l’a rendu caduc. La loi devait donc normalement s’appliquer dès le 1er janvier 2014, avec, en particulier, la mise en application de la durée de travail minimum de 24 heures hebdomadaires. Mais, troisième épisode courant janvier : faute d’accords suffisamment nombreux conclus dans les branches professionnelles, le ministère du Travail a décidé de reporter la durée minimale d’activité de 24 heures au 1er juillet 2014, et ce report a finalement été acté par la loi sur la formation professionnelle et l’emploi du 5 mars dernier.
Quelle est donc aujourd’hui la durée de travail minimum des salariés à temps partiel dans les officines ? À quel tarif doivent être payées leurs heures complémentaires ? Est-il possible de conclure avec un adjoint ou un préparateur un avenant à son contrat à temps partiel pour augmenter le nombre d’heures prévues à ce contrat ? Autant de questions auxquelles il n’est pas facile de répondre, tant les épisodes législatifs et conventionnels de ces derniers mois ont complexifié la situation. Pour y voir plus clair, il faut s’arrêter sur les trois volets essentiels du nouveau régime du temps partiel.
24 heures hebdomadaires.
Faute de nouvel accord signé par les représentants des employeurs et des salariés de l’officine avant le 1er juillet prochain, la loi s’appliquera. Or « les négociations avec les syndicats de salariés sont pour l’instant au point mort. Et le 1er juillet, la loi va s’appliquer dans toute sa rigueur, à savoir 24 heures minimum par semaine pour les nouvelles embauches », fait-on savoir à l’UNPF. Philippe Denry, président de la commission relations et formation professionnelle de la FSPF, précise : « Une nouvelle réunion est prévue en juin, mais nous ne sommes pas sûrs d’aboutir. FO bloque les discussions en refusant d’inscrire certains points dans les négociations. »
Aujourd’hui, la durée minimale d’activité de 24 heures hebdomadaires est donc suspendue jusqu’au 30 juin 2014. Mais, en pratique, elle devra être respectée pour les embauches intervenant à compter du 1er juillet 2014, sauf demande du salarié d’effectuer un temps de travail inférieur (voir encadré). Concrètement, toutes les offres d’emplois relatives à des postes à pourvoir à temps partiel en pharmacie d’officine, et diffusées à compter du 1er juillet 2014, devront proposer une durée du travail au moins égale à 24 heures par semaine (ou 104 heures par mois) et cela quel que soit le poste pour lequel l’embauche est proposée (y compris pour le personnel de nettoyage notamment), ou simplement contenir la mention « temps partiel ». Il faut savoir aussi que cette durée minimum a dû normalement être respectée pour les embauches ayant eu lieu du 1er janvier au 21 janvier 2014 inclus (sauf exception liée au salarié). Mais, on l’a compris, elle ne s’applique pas pour les embauches réalisées du 22 janvier au 30 juin 2014 inclus.
Par ailleurs, pour les contrats de travail en cours, un régime transitoire s’applique : sauf disposition conventionnelle contraire, jusqu’en 2016, l’employeur pourra refuser au salarié qui la demande la durée minimale d’activité de 24 heures en cas « d’impossibilité d’y faire droit compte tenu de l’activité économique de l’entreprise ». Cette impossibilité n’a pas à être démontrée jusqu’au 30 juin 2014*.
Enfin, il faut rappeler qu’un nouvel accord de branche dans les officines pourra toujours être conclu après le 1er juillet prochain et déroger à cette règle des 24 heures minimum, en revenant peut-être aux 16 heures de l’ancien accord. Juridiquement, en effet, les branches professionnelles conservent le droit de négocier sur le temps partiel, même après l’entrée en vigueur de la loi. Par ailleurs, souligne Philippe Denry, « un nouveau report de la loi au 1er juillet 2014 n’est pas totalement à exclure, car l’application des 24 heures va poser beaucoup de problèmes dans les TPE, et en particulier les officines. L’UNAPL, notamment, a demandé ce report ».
Heures complémentaires majorées.
La loi sur la formation professionnelle du 5 mars dernier a reporté l’application de la durée minimum de travail pour les salariés à temps partiel, mais pas les dispositions sur le paiement des heures complémentaires, c’est-à-dire les heures effectuées au-delà de la durée prévue au contrat. Avant l’entrée en vigueur de la loi, les heures complémentaires qui ne dépassaient pas 10 % de la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail étaient payées normalement et ne donnaient droit à aucune majoration de salaire. Mais depuis l’entrée en vigueur de la loi au 1er janvier, elles doivent donner lieu à une majoration de salaire de 10 %. « Nous avons passé des consignes à nos adhérents pour qu’ils majorent de 10 % toute heure complémentaire effectuée depuis le début de l’année », insiste Philippe Denry.
En revanche, pour les heures complémentaires effectuées au-delà des 10 % de la durée de travail prévue au contrat, il n’y a pas de changement : ces heures donnent lieu à une majoration de 25 %. Un nouvel accord de branche étendu pourra toutefois prévoir un taux de majoration différent, sans que celui-ci ne puisse être inférieur à 10 %. Quant au contingent d’heures supplémentaires, il ne changera pas le 1er juillet prochain et reste fixé au dixième de la durée hebdomadaire de travail prévue au contrat. Attention : en principe, la durée légale de travail ne doit pas être atteinte avec le jeu des heures complémentaires. Si c’est le cas, l’adjoint peut demander la requalification de son contrat en contrat à temps plein.
Avenants impossibles.
Sur cette question des heures complémentaires, l’ancien accord de décembre 2013, rendu caduc par le défaut de signature de FO et de la CGT, prévoyait d’accorder aux employeurs la possibilité d’augmenter temporairement la durée du travail des salariés à temps partiel, dans la limite de la durée légale du travail de 35 heures par semaine, par avenant au contrat de travail. « Les heures réalisées dans le cadre de ces avenants dits de compléments d’heures avaient pour avantage de ne pas être limitées, dans leur nombre, par la règle du dixième s’imposant aux heures complémentaires. Leur paiement devait faire l’objet d’une majoration de salaire de 15 % », précise la FSPF. Or, en l’absence d’accord aujourd’hui, la mise en place de ces avenants de compléments d’heures est impossible. En effet, seul un accord de branche étendu peut permettre à l’employeur de convenir avec un salarié un tel complément. Les titulaires n’étant pas, actuellement, couverts par un accord de branche étendu, ils ne peuvent donc pas augmenter temporairement la durée de travail des salariés à temps partiel, même par avenant. S’ils le faisaient, ils encourraient un risque de requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat à temps complet. Pourtant, ce dispositif aurait donné plus de souplesse à une loi que les employeurs et les adjoints eux-mêmes estiment trop rigide. « La loi doit tenir compte des besoins et des contraintes des employeurs, surtout dans les officines où il y a de nombreux temps partiels avec des horaires réduits. Sinon, elle est contre-productive et favorise le travail non déclaré », estime par exemple Sadjad Ismaldjee, titulaire à Nanterre, dans les Hauts-de-Seine…
Reste à savoir si les parties signataires de la convention collective de l’officine réussiront à s’entendre pour trouver un nouvel accord qui satisfasse tout le monde. Pour l’instant, ce n’est pas gagné, d’autant que les négociations sont bloquées également sur la revalorisation des salaires…
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