Un entretien avec Jean Fabre, président de Phoenix Pharma France*

La répartition souffre d'un manque de visibilité

Par
Publié le 08/01/2018
Article réservé aux abonnés
Le président du répartiteur Phoenix Pharma France et du groupement Plus Pharmacie (enseigne PharmaVie) livre son analyse sur les mutations récentes du marché des groupements ainsi que sur les défis à relever par le secteur de la répartition.
jean Fabre

jean Fabre
Crédit photo : DR

Le Quotidien du pharmacien. — Vous avez pris, il y a six mois, la direction de Phoenix Pharma France ainsi que celle de PharmaVie. Quel développement envisagez-vous pour ce groupement ?

Jean Fabre.- Je pense qu’un groupement ne se définit pas par sa taille mais par sa capacité à répondre aux missions du pharmacien. Nous avons déjà franchi une première étape de manière symbolique, par exemple avec Lili Smart, une application pour l’accompagnement des personnes dépendantes, qui sera potentiellement déployée sur le réseau l’année prochaine.

En cela le réseau PharmaVie, bien réparti sur le territoire, est en mesure d’offrir un bon équilibre et surtout les outils pour faire face à l’évolution de la législation et à une éventuelle ouverture du capital. Car il faut bien reconnaître que les équipes doivent être formées pour répondre à ces futurs défis. Et ce avec des formations validantes en termes de comportement et d’organisation.

C’est en effet sur la qualité de l’accompagnement du patient que se fera la différence dans un univers plus concurrentiel que celui que nous connaissons aujourd’hui.

Cette évolution passe-t-elle par le développement de nouveaux services ?

Je ne crois pas aux services pour les services. La livraison à domicile ne représente pas pour moi un axe de développement différenciant. Ce ne sont pas les services, en effet, qui distinguent un groupement mais la manière dont les pharmaciens vont les mettre en œuvre et les exercer. Ainsi je pense que les titulaires ont des cartes à jouer dans la prévention, le dépistage, la vaccination, des éléments clés où le pharmacien crée un lien social d’importance avec les patients et leur famille.

Quel regard portez-vous sur les récents rapprochements qui se sont opérés sur le marché des groupements ?

Nous n’avons pas pour l’heure de projet de rachat. Car un tel rapprochement doit être un projet en soi. Certes le groupe Phoenix qui détient 3 000 pharmacies intégrées en propre au niveau européen serait en capacité de financer un rachat. Mais pour quel objectif ? Pour nous, il s’agit avant tout de préserver un certain état d’esprit. De jouer autant sur la sélection que sur le critère de taille.

Certes, je trouve logique que nos concurrents rachètent un groupement car il est évident qu’un mariage entre un grossiste-répartiteur et un groupement semble naturel. Nous avons une mission de santé publique et une fonction de « commerçant » qui forment un socle commun. Dans ce sens, une intégration verticale semble pertinente.

Enfin, il ne faut pas oublier que le marché français a ses spécificités et qu’on ne peut pas plaquer les expériences menées dans certains pays au marché hexagonal.

Ces rapprochements sont-ils une réponse aux problèmes majeurs rencontrés par la répartition aujourd’hui, à savoir une marge brute dégagée qui ne suffit plus à rémunérer les coûts de distribution ?

Le problème de la répartition, c’est son manque de visibilité, alors que c’est un chaînon indispensable entre le pharmacien et l’industrie. Ce n’est que récemment qu’elle s’est taillé une part dans le débat. Jusqu’à présent elle remplissait son rôle de manière invisible et peu de monde se souciait de sa viabilité financière.

Aujourd’hui, les choses commencent à bouger grâce à la CSRP (Chambre syndicale de la répartition pharmaceutique) qui a porté le débat auprès des autorités, notamment au sujet de la taxe sur les génériques. Il faut continuer à faire valoir nos efforts en ce qui concerne notre contribution aux économies.

Par ailleurs, les grossistes-répartiteurs ont déjà effectué leur travail de restructuration à leur propre échelle. Nous avons toujours eu le souci d’améliorer notre productivité tout en maintenant nos obligations de service public, on est au bout de ce qu’il est possible de faire.

Tous les grossistes-répartiteurs sont alignés pour trouver une solution avec les autorités de santé afin de permettre la pérennité de notre système de distribution, assurer nos missions et contribuer à l’amélioration de notre système de santé.

*Jean Fabre est également président-directeur-général de Plus Pharmacie, pour l’enseigne PharmaVie.

Propos recueillis par Marie Bonte

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 3400