CYRILLE DIMEY, avocat associé du cabinet JTBB Avocats, l’annonce sur son blog consacré au contrôle fiscal. Une deuxième opération Caducée est en cours, et elle ne concerne plus les seuls clients Alliadis, mais aussi les pharmaciens équipés du logiciel LGPI de Pharmagest. Le 16 avril, un pharmacien francilien a fait l’objet d’une perquisition fiscale. Dès 7 heures du matin et jusque tard dans la soirée, les fonctionnaires du fisc accompagnés d’officiers de la police judiciaire et, selon la règle, en présence d’un membre du Conseil de l’Ordre des pharmaciens, ont cherché à démontrer des effacements de mouvements de caisses à partir d’une fonction d’un logiciel dit « permissif ». Ce titulaire n’était pas le seul à recevoir la visite du fisc. Selon l’avocate qui l’assistait, simultanément huit autres pharmaciens d’Ile-de-France, et d’autres sur l’ensemble du territoire français, étaient eux aussi dans la ligne de mire des services financiers. Au total, vingt à trente pharmaciens auraient fait l’objet de cette « opération coup-de-poing ».
L’administration fiscale ne semble pas prête à lâcher d’un pouce les officinaux depuis que, en 2008, la caisse primaire d’assurance-maladie (CPAM) du Gard a mis le doigt sur une vaste affaire de fraude dans une pharmacie de Remoulins. En l’occurrence, c’est le moyen utilisé pour détourner de l’argent qui a éveillé un soupçon grandissant à l’égard de toute la profession. C’est ainsi que, en 2009, l’opération Caducée voyait le jour : une grande vague de perquisitions avait été menée. Fin 2010, le procureur de Nîmes, Robert Gelli, confirmait qu’un logiciel de la société Alliadis permettait d’occulter des opérations imposables. « Ce qui est exceptionnel, c’est que le mode de minoration se trouve inclus dans le logiciel lui-même et est fourni par la société qui prépare les logiciels de comptabilité des pharmacies, sous réserve de demander l’accès au code informatique. »
Nouvelles sanctions.
Cette découverte a poussé la direction générale des finances publiques (DGFIP) à déposer une plainte contre Alliadis. Et la société Alliadis à se défendre : « A l’image de ce qui existe dans les logiciels concurrents, il s’agit d’un module d’administration qui permet d’accéder au contenu de la base de données contenant l’ensemble des opérations réalisées. Pour activer ce module, la pharmacie a besoin d’un code administrateur qui lui est fourni sur demande expresse de sa part. Ce code d’accès confidentiel est la garantie pour le pharmacien qu’il est la seule et unique personne contrôlant l’accès à sa base de données et qu’en conséquence, ses collaborateurs en sont privés ». Autrement dit, ce module n’est pas présent uniquement dans le logiciel incriminé mais aussi chez des concurrents. Une information judiciaire n’en a pas moins été ouverte par le parquet de Niort en décembre dernier, à l’encontre de l’éditeur de logiciel. En effet, la loi du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude fiscale a renforcé – entre autres – les obligations des concepteurs ou éditeurs de logiciels, de comptabilité, de gestion ou de systèmes de caisse. Elle prévoit que « de nouvelles sanctions seront appliquées en cas de démonstration de fraude commise au moyen de ces logiciels ».
Chez Pharmagest Interactive, Denis Supplisson, directeur général délégué, souligne que l’avocat à la source de l’information défend un pharmacien effectivement équipé d’un logiciel LGPI, qui subit actuellement un contrôle fiscal. Rien d’extraordinaire étant donné le nombre de contrôles fiscaux concernant habituellement les pharmacies chaque année. « C’est un non-événement ! Il est étonnant qu’on s’intéresse à un billet d’un blog d’un avocat inconnu dont les déclarations ne s’appuient sur rien, qui ne doit pas faire sa publicité et saisit l’occasion à son avantage pour faire parler de lui. Nous ne sommes pas informés d’une deuxième vague de l’opération Caducée et l’administration fiscale n’a fait aucune déclaration dans ce sens. Cela n’engage donc que cet avocat qui se fait un bon coup de pub. »
Obstination des services fiscaux.
Sauf que, cette fois, le contrôle fiscal est un peu plus musclé que la procédure habituelle puisqu’elle prend la forme d’une perquisition, comme cela s’était produit lors de la première vague de l’opération Caducée courant 2010. À l’époque, 4 000 pharmacies étaient suspectées de fraude parce qu’elles avaient demandé le fameux code d’accès à la fonctionnalité permissive de leur logiciel. Mais la fraude semble finalement plus limitée que ce que pensait le fisc, qui a progressivement arrêté les perquisitions pour revenir à des méthodes plus classiques de contrôles fiscaux inopinés. À la mi-2011, on parle alors de 500 pharmacies concernées par des contrôles « de routine ». Les premières notifications de redressement tombent à l’automne 2011, puis des sanctions pénales pour certains à partir de 2012.
Aujourd’hui, les utilisateurs de LGPI s’exposent-ils à la même série de contrôles fiscaux ? Pharmagest risque-t-il lui-même, en tant qu’éditeur, de connaître le même sort que son concurrent ? En tout état de cause, cette nouvelle vague de vingt, voire de trente perquisitions en bonne et due forme dans les officines dénote une nouvelle fois l’obstination des services fiscaux à l’encontre de la profession. À titre indicatif, selon son rapport d’activités de juin 2014, la DGFIP, dans sa lutte « contre les fraudes les plus graves », a procédé à 221 perquisitions fiscales sur l’ensemble des entreprises françaises en 2013.
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