Dans le contexte de crise actuel et ses conséquences sur le plan économique, comment la France peut-elle se redresser et quels leviers de croissance l'officine doit-elle actionner pour se développer ? C'est la thématique abordée par Marc Touati, fondateur du cabinet ACDEFI (Aux Commandes De l'Économie et de la Finance), lors d'une soirée débat organisée par la CERP Bretagne Atlantique.
Habitué des médias et auteur d'ouvrages spécialisés*, l'économiste a inauguré une série de conférences que le groupe répartiteur a entreprise dans l'objectif de sensibiliser les pharmaciens aux enjeux de demain. Grâce à ces rencontres, la CERP Bretagne Atlantique, qui se définit comme un partenaire privilégié de l'officine, souhaite offrir à la profession l'occasion de mieux comprendre le monde qui nous entoure afin de déceler les évolutions majeures en matière de santé, et plus précisément dans le domaine de la pharmacie. Dans ce sens, Marc Touati a exposé sa vision des perspectives économiques et financières en 2017.
Certes, la faillite de la banque Lehman Brothers, en 2008, a précédé la crise présente, la quatrième au cours des cent dernières années, après le Krach de 1929, la crise pétrolière de 1973-1974 et celle des NTIC (nouvelles technologies de l'information et de la communication). Mais ces phases de tourmente font partie de la vie économique, l'important n'étant pas leur avènement mais bien le fait d'en sortir. Pour y parvenir, il faut contribuer à la croissance mondiale, c’est-à-dire à la création de la richesse. Or, si celle-ci augmente en moyenne de 3,5 % par an depuis 1980, elle a marqué le pas à partir de 2015 et n'excédera pas, en 2016, plus de 2,5 %. Un pourcentage auquel la zone euro ne contribue qu'à hauteur de 0,2 point, alors que la Chine et l'Inde constituent les véritables moteurs de la croissance mondiale. Ainsi les pays émergents, qui représentaient 58 % du PIB mondial en 2015, sont-ils mieux armés pour résister à la crise. La zone euro l'est beaucoup moins, et pourtant elle va devoir affronter les dangers à venir. À commencer par la récession qui guette les États-Unis de Donald Trump d'ici 12 à 18 mois. Pour l'éviter, le nouveau président américain compte créer une relance de l'économie nationale, notamment en misant sur les baisses d'impôts (sur les sociétés, sur le revenu, sur les successions) et l'investissement dans les infrastructures. Si ces mesures ne portent pas leurs fruits, la conjoncture mondiale s'en ressentira.
Regarder vers l'avenir
Autre menace majeure, celle que génère le Brexit qui déstabilise la construction européenne. Le phénomène va s'avérer plus coûteux pour l'Union européenne que pour le Royaume-Uni qui a vu sa livre et ses taux d'intérêt baisser, relançant ainsi sa croissance. Ce qui n'est pas le cas de la France. Même si l'Hexagone représente toujours un acteur de poids à l'échelle mondiale, son économie n'a pas été modernisée et son taux de chômage avoisine les 10 % de la population active (25 % chez les jeunes). Avec, en 2016, une croissance structurelle de 0,7 %, des dépenses publiques équivalant à 57 % du PIB, une dette publique évaluée à 96,1 % du PIB, notre pays se classe au 22e rang mondial en termes de richesses par habitant, alors qu'il était 12e en 1995. Un tableau peu réjouissant qui ne doit cependant pas occulter les leviers dont la France dispose pour redresser la situation. Baisser les impôts pour tous, diminuer les dépenses publiques de fonctionnement, réduire le coût du travail, moderniser le marché du travail et supprimer le caractère obligatoire des 35 heures, innover massivement et abolir le principe de précaution, développer la culture économique française, sont quelques-unes des mesures qui pourraient « guérir » la France. Secondées par des décisions prises à l'échelle européenne - actionner la « planche à billets », faire de l'euro une arme pour la croissance, créer un budget fédéral européen et des eurobonds - elles permettraient d'envisager l'avenir plus sereinement.
Les cartes à jouer pour l'officine
À l'image du territoire qu'elle occupe, la pharmacie française a des cartes à jouer si elle veut renouer avec la croissance. Ainsi pourra-t-elle développer des stratégies de niche portant sur des produits (objets connectés…) ou des services particuliers, l'important étant de se différencier. Elle devra bien sûr communiquer sur ses spécificités, mettre en avant son savoir-faire et surtout l'excellence de ses compétences. Elle pourra enfin miser sur l'innovation dans sa façon de gérer les stocks, sa comptabilité, ses achats, afin de dynamiser son activité et se démarquer. Cependant et par-dessus tout, c'est le facteur humain qui lui permettra de sortir de la crise. Ainsi l'officine française doit-elle miser sur les hommes et les femmes qui composent ses équipes et les impliquer le plus possible dans la vie de l'entreprise : en encourageant « l'intraprenariat » notamment par le biais de l'actionnariat salarié, en établissant une transparence maximum dans le fonctionnement de la pharmacie, et spécialement au niveau des salaires qui doivent être justement fixés et en veillant au bien-être des salariés, un facteur intimement lié aux performances de l'entreprise. À bon entendeur…
* « La fin d'un monde », Marc Touati, éditions Hugo Doc 2016.
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