POUR COMPRENDRE la problématique actuelle des SPFPL, il faut remonter quelques années en arrière. Le 11 décembre 2001, la loi Murcef autorise la création de sociétés holdings pour les professionnels libéraux. Le 4 août 2008, ensuite, la loi « LME » prévoit que les SPFPL peuvent être majoritaires en capital et en droits de vote dans des SEL, dès lors que ces holdings sont détenues par les professionnels libéraux en exercice dans la SEL.
À partir de ce moment-là surtout, on attend donc un décret d’application de la loi qui doit préciser plusieurs points essentiels pour la profession de pharmacien, dont celui de la présence ou non d’investisseurs non-exploitants dans le capital des SPFPL et le nombre de participations dans des SEL qu’une SPFPL peut détenir.
Las ! Malgré un projet de décret qui a fait - difficilement - consensus dans la profession, ledit décret n’est jamais paru. Saisi par l’Association nationale des sociétés d’exercice libéral, le Conseil d’État a alors enjoint le Premier ministre, le 28 mars 2012, à se prononcer sur la nécessité de sortir ou non ce texte. En l’absence de réponse du gouvernement dans ce délai, la création de SPFPL de pharmacies est donc devenue théoriquement possible depuis le 29 septembre 2012…
Fin du feuilleton ? Pas tout à fait. Depuis le début de l’année 2013, l’Ordre des pharmaciens, d’abord très réticent, a finalement accepté, après instruction des dossiers, d’inscrire une quinzaine de SPFPL à la section A (titulaires). « Les holdings peuvent d’ores et déjà être mises en œuvre par les pharmaciens, et, aujourd’hui, il est techniquement possible de s’en servir », assure Olivier Delétoille, expert-comptable au cabinet Arythma.
Pourtant, le décret, dont le projet est dans les tiroirs du Conseil d’État depuis de nombreux mois, peut paraître à tout moment, et l’on ne sait pas quelle en sera la teneur. D’où une certaine insécurité pour les SPFPL déjà mises en place et pour celles dont la demande d’inscription est en cours. « Juridiquement, un pharmacien inscrit en section A peut créer autant de SPFPL qu’il veut, et chaque SPFPL peut détenir des participations dans autant de SEL qu’elle le souhaite », poursuit Olivier Delétoille.
Questions en suspens.
Oui, mais voilà : que se passera-t-il si les holdings inscrites à l’Ordre ne sont finalement pas conformes au décret au moment où celui-ci sera publié ? La réponse, pour le moment, n’est pas tranchée. À tout le moins, faudra-t-il, dans ce cas, une modification des statuts de la SPFPL et de la (ou des) SEL d’exploitation. Au pire, les SEL pourraient être contraintes de céder leur activité.
Par exemple, l’une des questions importantes qui devra être tranchée est celle de la suppression ou non de la dérogation dite de l’article 5.1, permettant de dissocier le capital et les droits de vote dans les SELAS. Si le futur décret interdit toute dissociation entre capital et droits de vote dans la SEL détenue par une SPFPL, les SELAS actuelles seraient en infraction avec la réglementation.
Quel sera également le sort des adjoints ? Actuellement, le projet de décret prévoit que ces derniers peuvent être invités au capital d’une holding de pharmaciens. Mais, en pratique, rien n’est moins sûr, et les adjoints pourraient être exclus du capital des holdings.
En tout cas, le décret, s’il doit sortir, ne résoudra pas un autre problème propre au fonctionnement des holdings de pharmacie et des SEL, à savoir la règle des 5 % de détention minimum du capital et des droits de vote. En effet, une SPFPL de pharmacie ne peut, par hypothèse, détenir « que » 95 % du capital d’une SEL, puisqu’au moins 5 % au moins du capital de cette dernière doivent être détenus directement par le pharmacien exploitant. « Or créer une holding est surtout avantageux quand on peut bénéficier du régime de l’intégration fiscale, qui permet de diminuer ou d’annuler l’imposition des dividendes versés par la SEL à la holding, grâce à la déduction des charges de remboursement de cette holding », précise Carole Lejas, expert-comptable, membre du réseau Exco. Mais puisque la SPFPL doit détenir, dans ce régime fiscal, 95 % au moins du capital de la SEL, ce dernier n’est applicable que si la SEL ne comporte qu’un seul pharmacien associé. Si la SEL comporte deux associés, la SPFPL ne pourra détenir que 90 % de son capital, et le régime de l’intégration fiscale ne s’appliquera pas.
Avantages fiscaux.
Malgré ces incertitudes et ces limites, les SPFPL, avec ou sans décret pour le moment, présentent des avantages indéniables pour l’acquisition et la transmission d’une officine. « La vocation première d’une holding est de s’interposer entre le pharmacien et son endettement. Aujourd’hui, un pharmacien n’a pas intérêt à s’endetter lui-même pour acquérir directement les parts d’une officine à l’IS. Il a au contraire tout intérêt à créer une société qui empruntera à sa place, afin de pouvoir optimiser la fiscalité de l’emprunt », poursuit Olivier Delétoille.
Sur ce plan, il faut d’ailleurs savoir que le régime de l’intégration fiscale peut être cumulé avec celui des sociétés mères et filiales, qui offre une exonération d’impôt sur les sociétés (IS) sur les dividendes reçus d’une filiale, sauf pour une quote-part de frais et charges calculée forfaitairement au taux de 5 % sur la somme des dividendes perçus.
Outil de transmission.
Outil d’acquisition, la holding est aussi un outil de transmission. Il est possible de céder l’officine pour un coût fiscal moindre, notamment lorsque la SPFPL est dite « animatrice », et donc assimilée fiscalement à une société d’exploitation. Les holdings dites « passives » bénéficient également de cet avantage fiscal, à condition qu’elles cèdent la totalité de leurs parts ou au moins 50 % des droits de vote.
Avec une SPFPL, on peut également profiter du système de « l’apport-cession » pour transmettre l’officine. En pratique, le système consiste à faire un apport des titres de la SEL à une SPFPL qui les revendra immédiatement. Si cette opération s’effectue avec des précautions suffisantes pour éviter tout abus de droit, elle permet d’éliminer les plus-values sur la cession des titres…
Ce ne sont là que quelques exemples des avantages de la holding dans le secteur de la pharmacie. Ce type de structure facilite indéniablement la reprise ou la transmission de l’officine, avec un effet de levier juridique et fiscal avantageux. En outre, elle présente aussi des avantages non négligeables en matière d’impôt sur le revenu pour les pharmaciens. La SPFPL est donc promise à un bel avenir dans la profession.
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