LE TRADITIONNEL « forum économique des pharmaciens », qui se tient chaque printemps à Berlin, a fait le point sur l’évolution récente de la pharmacie outre-Rhin qui, en 2014, a vu une nouvelle fois le nombre d’officines diminuer. L’Allemagne comptait 20 441 pharmacies le 31 décembre dernier, soit 221 de moins qu’un an plus tôt… et mille de moins qu’il y a cinq ans. De plus, le nombre de filiales continue de progresser, ce qui signifie que beaucoup d’officines autrefois indépendantes passent sous le contrôle d’une autre pharmacie : on compte désormais 4 172 filiales pour 16 269 officines uniques ou principales. Toujours l’an dernier, 163 pharmacies ont été créées et 384 ont fermé, ces deux chiffres étant toutefois en baisse par rapport à ceux des cinq dernières années.
Concrètement, rappelle Fritz Becker, le président du syndicat national des pharmaciens (DAV), cela signifie que de plus en plus de patients peuvent avoir du mal à trouver une pharmacie près de chez eux, et que de plus en plus de pharmaciens n’arrivent pas à vendre et voient une partie de leur retraite menacée. C’est dans les régions du nord-est, entre Berlin et la Pologne, mais aussi dans le sud-ouest de la Rhénanie, face à la Belgique, que la situation démographique est la plus difficile.
Revalorisation des gardes.
La progression du chiffre d’affaires, si elle confirme celle enregistrée l’an dernier après trois années d’une baisse dramatique, ne doit donc pas trop faire illusion. Elle est liée d’une part à la diminution du nombre des officines, qui entraîne très logiquement un report des ventes sur les autres pharmacies, mais aussi à la réforme du paiement des gardes de nuit et de week-ends, qui constituent d’ailleurs l’un des grands succès de l’ABDA, l’association qui fédère l’ensemble des organisations professionnelles du pays. Celle-ci a négocié, en 2013, une augmentation d’honoraires de 16 centimes par boîte, et qui s’ajoute à l’honoraire normal de délivrance (8,35 euros par boîte), pour être versée intégralement dans un fonds servant à financer les gardes. Grâce à cette somme, les pharmacies touchent désormais une moyenne de 250 euros par garde, une bouffée d’oxygène pour les pharmacies rurales qui font beaucoup de gardes mais ont une petite activité : ce supplément avait d’ailleurs été négocié dans le but d’aider principalement ces petites officines. 2014 a été la première année complète de son introduction, et confirme l’intérêt de ce système, dont se félicite la profession.
Ces nouveaux forfaits de garde ont permis aux pharmaciens d’améliorer leur résultat net avant cotisations sociales et impôts, qui s’est monté en 2014 à 129 000 euros, soit 5 000 de plus que l’an dernier.
Toutefois, les moyennes de résultats et de chiffre d’affaires cachent des disparités de plus en plus grandes entre les officines. Ainsi, si le chiffre d’affaires moyen a été de 2,02 millions d’euros en 2014, soit 0,6 % de plus qu’en 2013, 61 % des officines n’atteignent pas cette somme, et plus de 30 % d’entre elles réalisent un CA tournant entre 1,25 et 1,5 million.
Explosion des ventes sur Internet.
Autre grande tendance de l’année, l’explosion sans précédent des ventes par Internet, heureusement freinée par l’interdiction faite aux pharmacies virtuelles de proposer des rabais ou des ristournes sur les prescriptions, ce qui supprime, pour l’acheteur, tout intérêt à se fournir en ligne. Les ventes de prescriptions sont donc insignifiantes. En revanche, les ventes d’OTC par Internet ont progressé de 34 % en 2014 par rapport à 2013, un chiffre record que l’on retrouve toutefois pour de nombreux autres produits et articles vendus en ligne (voir notre enquête sur les ventes en ligne en page 6). À eux seuls, les OTC antirhumes ont bondi de 50 %, la plupart des autres OTC, notamment antitussifs et antalgiques, affichant des progressions allant de 20 à 30 %.
Sans surprise la vente d’OTC en officine a baissé de 3 % en 2014, et tous les secteurs sont touchés. « Nous ne gardons un avantage que lorsque les clients ont besoin d’un conseil et d’un médicament tout de suite », constate la responsable des statistiques économiques de l’ABDA, Claudia Korf, en faisant notamment référence à la vague de grippe du début de cette année. Arrivée plus tardivement en Allemagne qu’en France, elle a entraîné, entre autres conséquences, un pic d’activités pour les pharmacies en matière d’OTC.
Des projets qui oublient le pharmacien.
Au-delà des chiffres et des statistiques, le congrès s’est aussi fait l’écho des interrogations des pharmaciens face à plusieurs projets de réforme portés par le gouvernement… et qui font selon eux l’impasse sur leurs spécificités. Ainsi, le ministère de la Santé souhaite mettre en place un suivi pharmaceutique pour tous les patients consommant plus de trois médicaments à la fois, mais entend confier cette mission aux médecins généralistes, ce qui suscite l’incompréhension de la profession.
De même, les pharmaciens se sentent exclus des projets de renforcement de la permanence des soins et des programmes de prévention, qui font là aussi, selon eux, la part belle aux autres professions de santé. Une situation d’autant plus absurde, rappellent-ils, que les pharmaciens font partie des professions les plus populaires au sein de la population, qui leur accorde un indice de confiance particulièrement élevé.
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