« Sous-dimensionner le back-office alors qu’on a un grand et bel espace de vente, c’est comme doter une Porsche d’un moteur de deux chevaux. » L’avertissement de Jean-Pierre Demeyere, directeur de JCDA, est clair : négliger le back-office peut être lourd de conséquences. Or, la tendance du moment, et cela depuis plusieurs années déjà, est de privilégier le front office, quitte à, dans de nombreux cas, rogner sur le back-office.
Rogner sur cet espace de travail ne signifie pas pour autant qu’on le délaisse, mais nécessite de penser à optimiser au mieux son aménagement. Ce n’est pas toujours le cas, la faute peut-être à des pharmaciens un peu trop préoccupés par l’agencement du nouvel espace de vente, ou aussi, à de grands agenceurs, moins impliqués dans le fonctionnement du back-office. Telle est du moins l’opinion de Pierre Jegou, responsable de Pierre Jegou Agencement pour qui certains grands faiseurs de l’agencement de pharmacies délaissent le back-office pour le front office, plus visuel. « Or, l’un fonctionne avec l’autre, il est nécessaire de penser les deux ensemble. » Pour Pierre Jegou, on en est déjà à revenir parfois sur cette tendance à privilégier à tout prix le front office. « Un back-office réduit, c’est souvent un casse-tête, les pharmaciens se plaignent de ne pas pouvoir travailler correctement », constate-t-il.
La robotisation libère de l’espace
Il est évidemment difficile de généraliser tant les situations peuvent être variées, rien de commun entre une grande pharmacie installée dans une petite ville ou à la campagne, où le back-office occupe parfois jusqu’à la moitié de la superficie totale, voire plus, et les pharmacies installées dans les grandes villes, notamment à Paris, où la gestion de l’espace se trouve autrement plus complexe. Mais la tendance est là, le back-office tend parfois à ne plus occuper qu’un tiers de l’espace total. La façon dont le pharmacien va pouvoir l’optimiser est donc un enjeu fondamental, en particulier pour les réagencements qui se font dans un même espace, une même superficie donc, avec à la clé une réduction du back-office. Les pharmacies qui opèrent un transfert dans un espace plus vaste sont moins soumises à cet enjeu, le souci d’optimisation demeure mais elles disposent d’une marge de manœuvre plus grande.
Les contraintes matérielles et physiques, les habitudes de travail des équipes et les ambitions des titulaires vont guider le travail des agenceurs. Mais on peut néanmoins distinguer déjà deux situations globales, celles où il y a automatisation et celles où il n’y en a pas. Robotisation plutôt qu’automatisation, tient à nuancer Michel Julin, directeur général de TH Kohl, car un robot concentre plus qu’un automate de références dans un espace donné. Cette concentration des stocks libère systématiquement de la superficie et facilite la gestion physique de ces stocks, y compris ceux qui ne sont pas dans le robot. Dans l’idéal, un stock délocalisé au sous-sol ou à l’étage peut permettre de disposer d’un tout petit back-office derrière le front office, affirme Jean-Pierre Demeyere. Elle implique par ailleurs une gestion des flux différente, le déballage des produits livrés devra être placé au plus proche du robot, et la jonction entre back-office et front office s’en trouve modifiée.
Réception des marchandises, stockage et délivrance
Quelle que soit la situation de l’officine, l’efficacité du back-office dépend de la façon dont ont été pensés les flux au sein de l’officine, ceux des médicaments, ceux des équipes au sein du back-office, et la circulation de ces mêmes équipes entre le back et le front office. Les flux de médicaments vont en partie déterminer ceux des équipes. « Il est important de raisonner à partir du lieu où l’on reçoit les marchandises, ce lieu doit être proche du stockage qui lui-même doit être proche du lieu de délivrance », commente Daniel Van Acker, Directeur général de Mobil M. « C’est une véritable analyse des flux à laquelle nous devons procéder, et quel que soit le problème, il y a toujours une solution. Si, par exemple, le lieu de stockage ne peut pas être proche de la délivrance, on peut prévoir des systèmes de tapis roulants ou de chariots pour faciliter la circulation des produits. »
Daniel Van Acker glisse au passage l’importance d’accorder la juste place aux différentes zones qui composent le back-office : trop d’espace nuit aussi à cette gestion des flux, « la nature a horreur du vide, et trop d’espace signifie trop de choses qui traînent… »
.Dans certains cas, les petites pharmacies parisiennes, les marchandises sont réceptionnées dans l’espace de vente, puisqu’il n’y a pas d’accès direct dans le back-office, cela complique la gestion de ces différents flux. Cette analyse impliquerait presque de savoir combien de pas il faut effectuer entre les différents pôles qui composent le back-office, suggère Michel Julin. Elle implique aussi de rationaliser ces mêmes pôles. Si une pharmacie décide de ne pas prendre de robot pour des raisons budgétaires, il lui faudra néanmoins trouver les moyens de concentrer les stocks : les colonnes tiroirs représentent une bonne alternative. Des mobiliers supplémentaires adaptés, comme par exemple les armoires à déplacement latéral, suggérées par Bernard Deniel, directeur de Média 6 Pharmacie, sont aussi des moyens utiles pour y parvenir. Ces armoires que l’on tire avec une poignée permettent une économie de place importante au sol tout en stockant des volumes tout aussi importants de produits. Les solutions pour concentrer et donc alléger le back-office des stocks sont nombreuses, ainsi le fait tout simple de stocker un maximum de produits dans le front office. Puisque ce qui se voit se vend, et plus on voit, plus on vend, autant en profiter pour alléger aussi le back-office. N’oublions pas aussi, pour les officines qui se sont lancées dans la vente en ligne, la nécessité de prévoir un espace dédié, pas tant au niveau de la réception des marchandises qui peut être faite en un point unique, qu’à celui de la préparation des commandes et de leur expédition.
Espaces polyvalents
La rationalisation de ces différents pôles dans un espace considéré comme étroit doit prendre en compte de nombreux autres éléments. Outre un confort minimum pour le poste de déballage, la concentration et le bon positionnement des stocks, il faut penser à l’administratif, un poste pour la transmission de données, à tout ce qui est matériel, informatique, gestion du froid, à un éventuel espace pour les réunions, pour la formation etc… et à ce que requiert la législation du travail, des toilettes, un espace repos etc… Faire tenir tout cela dans de petits espaces tient du casse-tête, que parfois, certaines astuces permettent de résoudre.
Prenons l’exemple du poste administratif et de l’endroit où se trouve le déballage des marchandises livrées. L’ARS préconise que cela soit deux espaces bien distincts, mais dans certains cas, il peut être utile de les rassembler. « On peut par exemple prévoir un même plan de travail au lieu de deux différents, qui occupera trois mètres carrés au lieu de quatre (deux fois deux) », décrit Bernard Deniel, « la distinction des deux activités se fera sur ce plan de travail unique qu’il est possible d’aménager en fonction de l’administratif d’un côté et du déballage de l’autre. »
Dans un back-office où l’espace est compté, il faut jouer la carte de la polyvalence, le bureau du titulaire peut servir pour bien sûr accueillir les commerciaux des laboratoires, mais aussi de salle de réunion, de salle pour la formation, pourquoi pas de salle de garde… avec ce qu’il faut de cloisons amovibles et d’astuces, tout est possible, tant que la gestion des flux est pensée de la façon la plus rationnelle. Il faut aussi penser aux développements futurs, en informatique par exemple, on pourra avoir besoin d’un poste supplémentaire en back-office, ou pour les officines qui ont décidé de faire de la PDA, prévoir à un moment de la place quand une automatisation sera nécessaire. Quant aux espaces dédiés au préparatoire, ils obéissent à une logique un peu à part, car soumis à une réglementation très précise. Ils ont tendance du reste à disparaître, sauf les pharmacies qui se spécialisent et y consacrent une superficie forcément importante.
Pour une meilleure circulation
Gagner de l’espace en concentrant au mieux le stockage de certains produits et rationalisant les différents pôles d’activité de l’officine permet une meilleure circulation, notamment entre le back-office et le front office. Éviter par exemple de ne pas accorder suffisamment de place devant les colonnes tiroirs, cela arrive parfois. Ou encore, prévoir une ouverture assez grande pour éviter les goulots d’étranglement entre back et front office, notamment au niveau de l’OTC et quand cette ouverture est unique. S’il y en a plusieurs, ces ouvertures peuvent être resserrées. Une fois réglée la gestion des flux, qui implique la majorité des sujets de l’agencement du back-office, il ne reste plus qu’à envisager, ou pas, son esthétique. Les agenceurs constatent que bien souvent, les titulaires n’y accordent pas d’importance, ce qui peut se comprendre tant les arbitrages sont difficiles, mais derrière l’esthétique, se trouve aussi la notion de confort de travail. Aussi insistent-ils sur l’importance de l’éclairage, la lumière naturelle autant que possible, mais on sait bien que c’est loin d’être toujours le cas, et à défaut, des pavés leds, une solution efficace et peu coûteuse qui vaut bien un peu d’attention.
Quant au reste, des meubles blancs, ou parfois ceux anciens du front office qui vient d’être réagencé, vont largement faire l’affaire. Néanmoins, les agenceurs proposent parfois des solutions esthétiques à des prix qu’ils jugent intéressants, suffisamment en tout cas pour que les pharmaciens soient à l’écoute et évaluent le lien entre le confort de travail et la productivité de leurs équipes.
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