LE SENTIMENT d’insécurité gagne l’officine. En octobre 2010, un collectif de professionnels de santé de Stains et de Pierrefitte-sur-Seine, en Seine-Saint-Denis, avait attiré l’attention des pouvoirs publics sur les agressions dont ils étaient victimes, en organisant une journée « santé morte » (voir l’entretien ci-dessous). En février dernier, une pharmacienne de la cité des Moulins, à Nice, Fatiha Djegaoud, avait remis cette problématique sur le devant de la scène, face à Nicolas Sarkozy sur TF1 dans l’émission « Paroles de Français ».
Décidé à agir dans ce domaine, le gouvernement a élaboré un dispositif spécialement dédié à la sécurisation de l’exercice des professionnels de santé. Et un protocole a été signé le 10 mai entre les sept Ordres de professionnels de santé et les ministères de la Santé, de la Justice et de l’Intérieur. Déjà, le 20 avril, les syndicats avaient ratifié un protocole quasiment identique.
En pratique, « le texte se décline en trois volets : les actions à mettre en œuvre en prévention, pendant l’agression et après », précise Alain Marcillac, référent sécurité du conseil national de l’Ordre des pharmaciens (CNOP).
Le protocole prévoit ainsi la mise en place de « référents sécurité » au niveau départemental, des officiers de police ou de gendarmerie qui seront les interlocuteurs privilégiés des ordinaux. « Ils pourront effectuer des diagnostics gratuits dans les officines et dispenser des conseils de sécurité », explique Alain Marcillac. « Ils seront plus sensibilisés aux problématiques et aux façons de travailler des professionnels de santé, ce qui facilitera les échanges », ajoute-t-il. Par ailleurs, le protocole recommande aux maires « d’intégrer les abords des cabinets et des officines exposés aux risques de malveillance dans le périmètre couvert par le dispositif de vidéo protection implanté dans leur commune ».
Dépôt de plainte facilité.
Afin de faciliter une intervention « rapide et efficace » des forces de sécurité, un numéro d’alerte dédié aux professionnels de santé devrait être créé. « Un tel numéro existe déjà en Seine-Saint-Denis, mais il est trop long et trop compliqué à retenir en cas d’urgence », souligne Alain Marcillac. « Nous travaillons donc sur un numéro simplifié, qui permettrait aux services de police ou de gendarmerie de savoir immédiatement qu’un professionnel de santé appelle ».
Le protocole envisage également une facilitation des dépôts de plainte. « Il y a actuellement une sous-déclaration des agressions, car les professionnels de santé considèrent que le dépôt de plainte est une perte de temps », relève l’ordinal. Pour pallier ce problème, les pharmaciens victimes d’agression pourront donc prendre rendez-vous au commissariat pour déposer plainte, ou, autre option, un policier ou un gendarme pourra recueillir directement la plainte sur place.
Les Ordres auront aussi la possibilité de se porter partie civile, et les procureurs seront tenus de leur communiquer, ainsi qu’au plaignant, les suites de la procédure. Enfin, pour éviter d’éventuelles représailles, le plaignant pourra, avec l’accord du procureur, être domicilié à son adresse professionnelle voire au commissariat de police ou de gendarmerie.
Tout est donc prêt. Mais l’entrée en vigueur du dispositif est suspendue à la publication de décrets d’application et à la diffusion aux commissariats d’une circulaire ministérielle détaillant les mesures à mettre en œuvre. Cela ne devrait pas tarder, « d’ici à l’été », selon Alain Marcillac.
Du côté des syndicats, le projet est plutôt bien accueilli. Gilles Bonnefond, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) estime ainsi que ce protocole est « un bon texte, qui montre que les pouvoirs publics s’intéressent aux problèmes des professionnels de santé ». Il souhaite toutefois que le volet prévention soit particulièrement renforcé, notamment lors des gardes. « Il faut rendre davantage obligatoire le passage par le commissariat pour connaître une pharmacie de garde. Ce système est efficace car il permet d’éviter qu’un patient ne vienne pour d’autres raisons que la délivrance d’une ordonnance du jour. » Jean-Luc Audhoui, président de la commission Communication de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), ajoute que « les syndicats sont souvent avisés quand des problèmes surviennent. Désormais, ils pourront faire circuler l’information de part et d’autre ». Frédéric Laurent, président de l’Union nationale des pharmacies de France (UNPF), confirme pour sa part que « les syndicats auront un rôle important d’information des confrères de l’existence de ce dispositif. Il faudra que les pharmaciens sachent qu’ils peuvent y faire appel en cas de problème », conclut-il.
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