L’ARTICLE 40 du PLFSS 2014 est sans doute celui qui a provoqué le plus d’agitation au sein de la profession. En effet, il vise à mettre en œuvre un dispositif de transparence sur les remises obtenues par les pharmaciens, avec l’objectif de faire évoluer les tarifs des génériques sur des bases plus proches des prix réellement pratiqués par les laboratoires. Si la profession n’a rien contre le principe de la transparence, elle craint en revanche que cette disposition remette en cause les contrats de coopération commerciale et les ressources qui vont avec. De son côté, l’administration conteste ces contrats, estimant qu’ils servent avant tout à obtenir des remises au-delà du plafond autorisé de 17 %. Dans ce contexte, les parlementaires ont finalement adopté un amendement confiant aux ministres du Budget et de la Santé le soin de fixer le plafond des remises, par arrêté. Cet amendement propose d’autoriser l’augmentation du plafond des remises, aujourd’hui fixée à 17 %, dans la limite de 50 % du prix fabricant hors taxe (PFHT) ou du tarif forfaitaire de responsabilité (TFR). Après négociations, le nouveau plafond se situera donc entre 0 et 50 %. En attendant, le taux de 17 % est maintenu jusqu’à la parution de l’arrêté ministériel. La mesure doit permettre de dégager entre 15 et 50 millions d’euros d’économies par an.
La dispensation à l’unité expérimentée.
Autre article particulièrement discuté, celui concernant l’expérimentation de la dispensation à l’unité de médicaments. Pour Marisol Touraine, il s’agit d’un enjeu de santé publique. « Aujourd’hui, un médicament sur deux remboursé n’est pas consommé, affirme la ministre de la Santé. Dans le même temps, beaucoup de patients pratiquent l’automédication et conservent leurs médicaments en vue de les réutiliser. Pour l’essentiel, les produits conservés sont les médicaments contre la fièvre et la douleur, mais aussi les antibiotiques, alors même que ceux-ci ne doivent pas être repris sans avis médical. » Et la ministre de considérer que ce phénomène résulte de l’impossibilité pour les pharmaciens de délivrer exactement la quantité de médicaments prescrite. D’où son idée d’inscrire dans le cadre du PLFSS le lancement d’une expérimentation sur la dispensation à l’unité en officine. « L’Assemblée nationale a voté cette disposition, souligne-t-elle. Le PLFSS doit suivre son cours, mais je souhaite que nous préparions ensemble cette expérimentation avec l’ensemble des représentants pour définir les modalités précises. Elle nous permettra d’évaluer l’impact de cette dispensation à l’unité sur la diminution du gaspillage, l’amélioration de l’observance, la réduction des risques sanitaires et la maîtrise des dépenses de l’assurance-maladie. » En pratique, le PLFSS 2014 propose d’expérimenter la délivrance au comprimé près, de façon ciblée sur les antibiotiques, dans certaines régions, dans deux cents pharmacies volontaires, pendant une période de trois ans.
Mais, en attendant les résultats de cette expérimentation, la profession se montre divisée sur la question. La Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) se déclare ainsi favorable à l’expérimentation dans le sens où il s’agit d’une disposition de santé publique visant à lutter contre l’antibiorésistance. « C’est une question de cohérence », expliquait récemment au « Quotidien » son président, Philippe Gaertner (notre édition du 24 octobre). En revanche, l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) s’y montre largement hostile. « La dispensation à l’unité ne résoudra ni le problème de gaspillage de médicaments, ni celui de l’antibiorésistance », explique son président, Gilles Bonnefond. Pour lui, « cette mesure va conduire les officinaux à consacrer un temps précieux au comptage des comprimés au détriment du conseil dispensé en officine et de l’accompagnement des patients chroniques et des personnes âgées ».
D’inquiétantes économies.
Au-delà de ces dispositions, les mesures prévues sur le médicament inquiètent les représentants syndicaux. Sur les 2,4 milliards d’euros d’économies demandées à l’assurance-maladie, le poste médicament et dispositifs médicaux est, en effet, appelé à contribuer en 2014 à hauteur de 960 millions d’euros. Au programme des baisses de prix massives sur les spécialités inscrites au répertoire des génériques pour 605 millions d’euros. Avec, à la clé, une perte de marge d’au moins 300 millions d’euros, soit entre 9 000 et 10 000 euros par officine. « Les pharmaciens sont les plus gros contributeurs », déplore Philippe Gaertner. « L’officine participe à hauteur de 35 % d’économies, alors qu’elle ne représente qu’environ 20 % des dépenses sur le médicament », détaille le président de la FSPF, qui juge la situation « insupportable ». « C’est pourquoi aussi nous avons une vraie obligation de réussir l’évolution de la rémunération », insiste Philippe Gaertner.
« L’inquiétude de la profession est grande face aux économies demandées au réseau officinal, indique également Gilles Bonnefond. Le poste médicament ne pourra pas supporter des efforts supplémentaires, y compris dans un contexte de recettes inférieures aux prévisions. » Le président de l’USPO dénonce également l’adoption d’un amendement déposé en catimini permettant la taxation des ventes directes des laboratoires (voir également notre article en page 5). « Il s’agit d’un coup de poignard pour l’économie de l’officine au seul profit des grossistes-répartiteurs », s’insurge Gilles Bonnefond.
Le texte doit maintenant être examiné par le Sénat avant de revenir en deuxième lecture à l’Assemblée nationale. Les débats sont loin d’être terminés.
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