« UN DES OBSTACLES majeurs dans le traitement du cancer, indique au "Quotidien" le Dr Erkki Ruoslahti, professeur à l’institut Burnham de l’université de Californie, à Santa Barbara, est que les médicaments anticancéreux n’entrent pas à l’intérieur des tumeurs. » Ce qui peut avoir pour conséquence, ajoute-t-il, que « ces tumeurs sont exposées à des quantités si faibles des substances (qui sont destinées à les combattre), qu’elles deviennent résistantes ».
Pour remédier à ce problème, son équipe vient de mettre au point un peptide capable non seulement de se diriger dans l’organisme vers les tumeurs et de s’y accumuler, mais aussi de pénétrer dans le parenchyme de ces tumeurs avec une cargaison chimique*.
Ce peptide, appelé iRGD, est constitué de neuf acides aminés. Son mécanisme d’action peut être décomposé en trois étapes. Tout d’abord, le motif arginine-glycine-acide aspartique (RGD) qu’il contient lui permet de se fixer de façon spécifique sur des récepteurs intégrines alpha V exprimés de façon abondante dans la vascularisation des tumeurs et dans les cellules tumorales, mais pas dans les cellules normales. En effet, la couche endothéliale des vaisseaux sanguins de chaque tissu a sa propre signature, et, précise le Dr Erkki Ruoslahti, « celle des tissus tumoraux est très différente de celles des tissus sains ». Une fois associé aux intégrines, iRGD est soumis à une coupure protéolytique qui expose un deuxième motif, appelé CendR, conduisant à son attachement à un autre récepteur, la neuropiline 1, elle aussi caractéristique des cellules cancéreuses. C’est la neuropiline qui permet le passage du peptide résiduel et de sa charge éventuelle dans le parenchyme extravasculaire de la tumeur.
Le peptide a été testé chez l’animal. Couplé à une molécule fluorescente, il a été injecté dans des souris porteuses de tumeurs. La fluorescence a permis d’observer une accumulation d’iRGD au niveau de tumeurs de différente nature dont des tumeurs du sein, de la prostate, du pancréas et du cerveau mais jamais au niveau des tissus sains.
Nanovers.
Dans une autre série d’expériences, le peptide a été couplé à une structure allongée constituée de nanosphères d’oxyde de fer, surnommée un « nanovers ». Les nanovers sont utilisés en IRM pour améliorer le contraste de l’image. Seuls les nanovers associés à iRGD ont été observés à l’intérieur des tumeurs par IRM, alors que les nanovers nus ne l’ont pas été. Enfin, les chercheurs américains ont constaté que le médicament anticancéreux Abraxane (placitaxel lié à l’albumine), couplé au peptide iRGD et injecté par voie intraveineuse chez des souris, a mieux pénétré et s’est mieux répandu dans le tissu cancéreux qu’Abraxane seul.
Lors de ces études et d’autres effectuées chez l’animal, l’équipe de l’institut Burnham a également noté une amélioration de l’efficacité des substances anticancéreuses lorsque le peptide iRGD leur était associé sans qu’il y ait eu un accroissement des effets secondaires. « Ce peptide a des propriétés de pénétration des tumeurs extraordinaires, a affirmé en conclusion, le Dr Ruoslahti, et j’espère qu’il va rendre possible des améliorations substantielles du traitement du cancer. »
Pharmaco pratique
Accompagner la patiente souffrant d’endométriose
3 questions à…
Françoise Amouroux
Cas de comptoir
Les allergies aux pollens
Pharmaco pratique
Les traitements de la sclérose en plaques