APRÈS AVOIR testé (dans un essai de phase I antérieur) la bonne tolérance de cette approche thérapeutique, les auteurs sont, logiquement, passé à l’étape suivante : l’évaluation de l’efficacité. Le vecteur utilisé dans ce vaccin recombinant est un poxvirus (vaccine et fowlpox), et l’antigène tumoral cible choisi (NY-ESO-1) possède des qualités intéressantes en termes de spécificité d’expression tissulaire. La première injection vaccinale (avec pour vecteur le virus de la vaccine, rV-NY-ESO-1) fut suivie par un rappel (avec pour vecteur le virus fowlpox, rF-NY-ESO-1).
Les 25 patients atteints de mélanomes exprimant l’antigène NY-ESO-1 (essai conduit à Francfort) étaient au stade III (28 %) ou IV (72 %). Les effets du vaccin ont été suivis pendant 32 mois en moyenne (9-106?mois). Les patientes ayant un cancer épithélial de l’ovaire (EOC, n = 22) ont été incluses après avoir eu une ablation totale de la tumeur et une chimiothérapie à base de platinium (essai conduit au Roswell Park Cancer Institute, Buffalo). Presque toutes (91 %) étaient à un stade III/IV ; le suivi a, ici, été de 48 mois (23-66).
Le premier indice d’efficacité du vaccin, dans l’essai « mélanomes », est le taux de bénéfice clinique (CBR). Combinant le taux de réponse objective (9,5 % de réponse complète, 4,8 % de réponse partielle, 4,8 % de réponse mixte) et le taux de stabilisation de la maladie (52,4 %), le CBR est de 71,5 %. La survie globale (OS) moyenne est de 9 mois (0-84 mois) et la survie sans progression (PFS) de 48 mois (3-106) en moyenne. Chez les 22 patientes EOC, l’évolution vers des récidives est retardée de 21 mois (16-29) et l’OS est de 48 mois en moyenne.
L’équipe d’Elke Jäger étaiye ensuite ces résultats cliniques sur des preuves biologiques de l’action du vaccin. La primo-vaccination rV-NY-ESO-1, complétée par le rappel rF-NY-ESO-1, induit une sécrétion d’anticorps anti-NY-ESO-1 chez 33 % (5/15) des patients « mélanome » qui étaient séronégatifs au début de l’essai. Dans le groupe EOC, une réponse immunologique s’observe chez 42 % (8/19) des patientes qui étaient séronégatives au démarrage de l’étude.
Réponses CD8 et CD4.
À cela s’ajoute l’objectivation d’une réponse de type CD8+ chez 88 % (22/25) des patients du groupe mélanome après vaccination, tandis qu’une production de CD4+ est enregistrée chez 78 % d’entre eux. Les chiffres observés dans le groupe EOC sont de 46 % et de 91 %, respectivement, pour les CD8+ et les CD4+. En outre, il existe des indices de la création, suite à la vaccination anti-cancéreuse, d’une immunité à long terme contre l’antigène tumoral puisque des cellules T CD8+ et CD4+ spécifiques d’antigène sont détectées, respectivement, jusqu’à 6 et 12 mois après traitement dans un sous-groupe de patients.
Les résultats obtenus par ce vaccin viral sont d’autant plus convaincants que les auteurs réussissent à établir l’existence d’un lien entre la réponse immunitaire et l’impact clinique. La PFS est en effet clairement améliorée chez les patients à statut CD8+ séropositif maintenu ou augmenté après la vaccination (19,5 mois en moyenne, vs 9 mois chez les patients restant séronégatifs après le traitement, p = 0,05) dans le groupe mélanome. On fait des observations comparables chez les patientes à cancer de l’ovaire.
Le nombre limité de participants et le caractère non randomisé de ces essais de phase II incitent naturellement à la prudence, mais un nouveau pas décisif semble aujourd’hui franchi dans le domaine de l’approche vaccinale du cancer.
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