EN ABORDANT sous un angle médical, social, psychanalytique et éducatif la délicate question de la sexualité des jeunes, le rapport cosigné par Brigitte Letombe, gynécologue, Sophie Marinopoulos, psychanalyste, et le Pr Nisand, responsable du pôle de gynécologie-obstétrique du CHU de Strasbourg, entend dénoncer l’explosion des grossesses non désirées en particulier chez les jeunes. Il insiste sur les 60 000 IVG évitables concernant plus de 13 000 mineurs chaque année. Les auteurs proposent de s’attaquer à une exception française paradoxale : la pilule du lendemain et l’IVG restent encore aujourd’hui les seules solutions gratuites et anonymes alors que la contraception en dehors des centres de planning familial demeure payante et nécessite une autorisation parentale.
« La Hollande, les Pays-Bas et la Suisse ne connaissent pas ce problème, alors que chez nous le nombre d’IVG chez les moins de 25 ans a doublé en 20 ans », souligne le Pr Nisand. Comme les précédents rapports – celui de l’Inspection générale des affaires sociales en 2010 ou de la députée Bérangère Poletti en 2011 –, le rapport remis à Jeannette Bougrab fait le constat d’un accès défaillant des jeunes à la contraception. Le Pr Nisand reconnaît que toutes ces IVG ne sont pas évitables. Environ un tiers concerne des jeunes femmes qui ont par ailleurs une conduite à risque, mais comment faire pour les autres ? « Nous devons venir en aide à ces jeunes qui souhaitent avoir des relations sexuelles sans que les parents soient au courant, alors que dans notre pays quatre femmes sur cinq habitent à plus de 100 km d’un centre de planning familial », poursuit le Pr Nisand.
30 millions d’euros.
Au moment où les pilules qui sont sur le marché depuis plus de 40 ans viennent de bénéficier d’une baisse des prix, le gynéco-obstétricien réclame haut et fort que les méthodes contraceptives les plus innovantes, les plus modernes et les meilleurs soient accessibles à toutes. Parmi les 18 propositions du rapport, un forfait contraception qui permettrait aux jeunes de ne rien débourser jusqu’à 18 ans lui semblerait déjà un grand pas. « Xavier Bertrand ne veut rien entendre sur cette question pourtant, la prise en charge d’une pilule qui revient à 80 euros par an me semble une bonne solution par rapport aux 60 000 IVG évitables avant 25 ans qui coûtent 30 millions d’euros à la société chaque année », explique-t-il. Le professeur Anne Gompel, responsable de l’unité de gynécologie médicale et endocrinienne à l’Hôtel-Dieu (AP-HP, Paris) surenchérit : « L’industrie pharmaceutique doit aussi faire des efforts sur les prix, car il s’agit tout de même de molécules qui ne coûtent pas cher à produire. » Les laboratoires tout comme la Sécurité sociale seraient sollicités pour la mise en œuvre du forfait contraception. Le remboursement se ferait directement aux pharmaciens au prix de 7 euros mensuels. La secrétaire d’État à la Jeunesse et la Vie associative, qui soutient la proposition, a promis de tout faire pour convaincre.
Un autre volet du rapport concerne l’éducation sexuelle dès l’école primaire. L’action doit reposer sur tous les médecins, y compris généralistes, mais aussi les sages femmes, infirmiers et pharmaciens qui devraient être rémunérés. Seuls des réseaux locaux pluridisciplinaires formés à l’orthogénie permettraient cette prévention à grande échelle voulue par Jeannette Bougrab qui déplore la non-application de la loi du 4 juillet 2001 et d’une circulaire du 17 février 2003 qui font pourtant de l’éducation à la sexualité une obligation légale tout au long de l’enseignement primaire et secondaire à raison d’au moins trois séances par an et par niveau. « En baissant les bras, nous livrons l’éducation sexuelle de nos enfants à la pornographie. La consommation addictive de films observée chez les garçons d’une dizaine d’années dégrade l’image qu’ils ont des femmes. Ils vont mal et auront d’immenses difficultés à se construire », prévient le Pr Nisand. Une enquête européenne montre que 80 % des garçons de 14 à 18 ans et 45 % des filles du même âge ont vu un film porno dans l’année. Jeannette Bougrab qui refuse l’idée que l’on puisse parler de « cinéma » soutient également la proposition d’une taxation des contenus Internet pornographique.
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