C'est l'une des conséquences de l'affaire du valproate : une prise de conscience des autorités de santé de la problématique de l'utilisation de médicaments au cours de la grossesse. Avec pour premiers résultats l'apposition de pictogrammes d'avertissement, d'abord sur les spécialités contenant du valproate au mois de mars, et depuis la semaine dernière sur tous les médicaments dont la prise comporte des risques pendant la grossesse. Mais l'Agence ne compte pas s'arrêter là et vient de constituer une cellule dédiée de cinq personnes pour coordonner le travail interne et la collaboration avec des acteurs externes comme les centres régionaux de pharmacovigilance ou le Centre de référence sur les agents tératogènes.
Car il y a urgence à agir. Selon une étude réalisée dans le cadre d'un projet financé par l'ANSM, sur les prescriptions de médicaments chez un échantillon de femmes enceintes françaises, sur la période 2011-2014, 97 % des femmes enceintes ont reçu au moins un médicament, 93 % si l'on exclut les vitamines et minéraux. Un taux particulièrement élevé si l'on compare aux résultats obtenus dans d'autres pays : de 44 à 57 % dans les pays d'Europe du Nord, 64 % aux États-Unis, 69 % aux Pays-Bas, 85 % en Allemagne. En outre, le nombre moyen de médicaments prescrits chez les femmes enceintes est de 10, alors qu'il est compris entre 2 et 3 aux États-Unis et en Europe du Nord. « Il y a aussi un problème d'inéquité sociale très forte, entre les femmes appartenant à des catégories socioprofessionnelles supérieures (CSP +), qui consomment moins de médicaments et sont davantage supplémentées, et les patientes CSP-, donc en difficulté, qui au contraire ne prennent pas assez de suppléments et plus de médicaments que la moyenne », note Dominique Martin, directeur général de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM).
Diminuer l'exposition
Or, il faut éviter les médicaments pendant la grossesse et les utiliser uniquement s'il n'y a pas d'autres choix possibles. Car « au moins 60 % des médicaments » présentent un risque tératogène ou fœtotoxique. « Ces risques peuvent être considérables, insiste Dominique Martin. Je rappelle que pour le valproate, si on cumule les risques de malformation et les risques de retard, on sait que 30 à 40 % des enfants sont concernés, c'est massif ! »
Pour amorcer un changement de comportement à la fois des prescripteurs, des dispensateurs et des patientes, l'ANSM compte sur l'information et la communication. Elle a ainsi coécrit, avec le Collège de médecine générale, une plaquette « Médicaments et grossesse, mode d'emploi » pour les professionnels de santé et un document équivalent pour les patientes est en cours de réalisation. L'ANSM souhaite aussi promouvoir la remontée des signaux, mettre en œuvre les mesures de réduction du risque et les évaluer pour les améliorer. « C'est notre objectif ultra-prioritaire : travailler sur les connaissances et faire changer les pratiques pour diminuer l'exposition aux médicaments des femmes enceintes en France. »
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