Dans quelle mesure les résultats de la greffe d’îlots de Langherans sont-ils durables à terme dans le diabète de type 1 ? C’est la question déterminante à laquelle a voulu répondre l’équipe du CHU de Lille/université de Lille/INSERM avec le suivi à 10 ans de 28 patients greffés.
Dans « Diabetes Care » (1), l’équipe des Prs François Pattou et Marie-Christine Vantyghem montrent que les bénéfices persistent à terme. Plus de trois quarts (78 %) des greffons sont fonctionnels à 10 ans avec un meilleur contrôle glycémique sans hypoglycémies sévères.
Dans cette étude prospective où le critère principal était l’insulinodépendance avec une HbA1c ≤ 6,5 %, un quart des patients n’avait plus besoin du tout d’insuline. La moitié des patients présentaient un taux d’HbA1c < 7 %. Alors que 50 % des participants avaient eu une greffe rénale, l’autre non, l’évolution était la même dans les deux groupes.
La maladie entre parenthèses
« Avec le temps, certains patients greffés d’îlots ont de nouveau besoin d’un peu d’insuline mais il n’y a plus d’hypoglycémies sévères, a expliqué le Pr Pattou lors d’une conférence de presse organisée par l’INSERM. Le temps global passé en hypoglycémie baisse franchement et significativement. De plus, en restaurant l’insulinosécrétion, la maladie est mise entre parenthèses. Les complications arrêtent de progresser, par exemple la rétinopathie; voire régressent, comme c’est le cas pour la neuropathie. Il y a peu de complications cardiovasculaires, surtout dans les 5 premières années ».
Pendant longtemps, pour les patients diabétiques de type 1 dont les complications rénales nécessitaient une greffe de rein, une transplantation simultanée de pancréas entier était l’alternative la plus efficace à l’insulinothérapie. La greffe d’îlots, qui consiste à injecter les cellules sécrétrices d’insuline issues d’un pancréas de donneur dans la veine porte afin qu’elles s’implantent dans le foie, est moins risquée. Alors que cette greffe est proposée depuis près de 20 ans dans le monde, l’équipe de Lille est la première à s’intéresser au suivi à long terme.
Une surveillance très étroite
Dans l’étude, 28 patients ont été inclus entre mars 2003 et décembre 2012. La greffe consistait en une à trois injections consécutives d’îlots. « Idéalement, un seul donneur devrait suffire, explique le Pr Pattou. Mais un 2e, voire un 3e peuvent être nécessaires ». Quant à l’immunosuppression, elle était induite par du daclizumab puis maintenue par du tacrolimus et du sirolimus. Pour les patients insuffisants rénaux, le délai moyen entre la greffe rénale et celle d’îlots était de 22 mois, l’immunosuppression pour le rein étant un protocole standard.
« Le bilan de l’immunosuppression est très rassurant au prix d’une surveillance très étroite tous les 3 mois, explique le Pr Vantyghem. La toxicité rénale en particulier peut être limitée. Les cancers cutanés sont dépistés systématiquement, quatre cas ont été observés. Un cas de lymphome est survenu chez un patient greffé rénal ».
Environ 200 greffes ont été réalisées au total en France. Aujourd’hui, il existe sur le territoire quatre laboratoires d’isolement (Lille, Grenoble, Montpellier, Paris Saint-Louis) pour neuf équipes de greffe (Besançon, Grenoble, Lille, Lyon, Montpellier, Nancy, Paris Saint-Louis, Strasbourg, Suresnes Foch). En 2018, il y a eu 29 injections d’îlots – chacune étant réalisée à partir de l’isolement d’un seul pancréas – chez 12 malades. Les démarches pour le remboursement de la greffe d’îlots sont actuellement engagées auprès de la Haute autorité de santé. La réponse est attendue pour 2020.
Conférence de presse INSERM le 12 novembre 2019, Paris.
(1) MC Vantyghem et al. Diabetes Care. doi:10.2337/dc19-0401, 2019.
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