Intoxication homéopathique

Par
Publié le 23/03/2023
Article réservé aux abonnés

« Un homme de 53 ans sans antécédents connus et sans traitement chronique en cours s'est présenté à notre service des urgences avec un syndrome anticholinergique incluant confusion, anxiété, ataxie et dysarthrie après ingestion d'un médicament… » Ainsi débute l'article de Sabrina Schmollet & coll. publié en février 2021 dans « Clinical toxicology ». Un cas clinique d'intoxication médicamenteuse qu'on aurait qualifié de banal si le médicament mis en cause n'était homéopathique… Le patient n'a en effet ingéré d'autre traitement qu'une solution homéopathique contenant un extrait d'Atropa belladonna prétendument en dilution D4. Autrement dit, un extrait de belladone, atropinique puissant, dilué censément 10 000 fois ! Si l'efficacité thérapeutique de la médecine des semblables fait encore débat, on sait au moins que les procédés de fabrication de ces médicaments induisent, par nature, une toxicité nulle sur les organismes. En l'espèce pourtant, le tableau clinique évoque clairement un syndrome atropinique, appelé aussi syndrome anticholinergique, qui apparaît à la suite d'une intoxication par des plantes ou des médicaments contenant de l'atropine. Aussi, pour en avoir le cœur net, les médecins réalisent des dosages sur la solution homéopathique et sur un prélèvement sanguin du patient. Et là, bingo ! L'analyse révèle des concentrations d'environ 3 mg/ml de sulfate d'atropine dans le médicament et un taux sérique de 5,7 ng/ml (±1,4) dans le sang du patient, prouvant un surdosage d'atropine de 600 fois, dû à une erreur de production de la dilution homéopathique. Gardé en observation, l'intoxiqué homéopathique ressortira quelques jours plus tard sans dommage de l'hôpital. Cet épisode prouve, concluent les auteurs, que des erreurs de fabrication, rares mais potentiellement dangereuses, doivent être envisagées face à des symptômes survenant après l'ingestion de remèdes homéopathiques. Désormais, les adeptes et autres défenseurs de la médecine Hahnemannienne ne pourront même plus dire « si ça ne fait pas de bien, au moins, ça ne fait pas de mal »

Didier Doukhan

Source : Le Quotidien du Pharmacien