« La cancérologie propose de plus en plus de traitements ambulatoires durant desquels le patient réalise ou termine sa chimiothérapie à domicile, explique Catherine Donamaria, pharmacienne de l’Institut Bergonié de Bordeaux, pôle d’excellence régional dans la lutte contre le cancer. Nous avons pensé que le retour à domicile de nos patients pouvait être accompagné par leur pharmacien d’officine. Car c’est le seul professionnel de santé présent partout et toujours disponible. »
Pendant plusieurs années, l’Institut Bergonié a testé cette idée sur ses patients qui se sont déclarés favorables à un suivi à domicile par leur pharmacien. Et, en janvier, a démarré une collaboration à grande échelle avec l’URPS Pharmaciens de Nouvelle-Aquitaine.
Libre choix du patient
Elle porte sur la fourniture par le pharmacien de ville de matériels de chimiothérapie injectable à domicile pour des patients atteints de cancers digestifs. Ces matériels étaient auparavant fournis par des prestataires qui n’assuraient aucun suivi à domicile.
Le libre choix du patient étant au cœur de ce dispositif, l’officine a fait la quasi-unanimité : sur les 200 premiers patients, 198* ont choisi leur pharmacien plutôt qu’un prestataire. Côté officine, peu de refus, à peine 5 %.
En pratique, le patient quitte Bergonié avec une ordonnance. Auparavant, son pharmacien a été contacté par l’établissement : « La communication n’est pas toujours facile, car beaucoup d’officines travaillent encore avec un crayon, un papier et un fax, reconnaît Catherine Donamaria. Ce qui est totalement impossible pour préserver la confidentialité. Nous leur proposons donc de travailler sur la messagerie nationale sécurisée MS Santé. 50 % des officines l’ont déjà installée. Quant aux pharmaciens qui s’inquiètent de la complexité de leur nouvelle mission, nous leur fournissons un accompagnement et tout se passe très bien. »
Financement URPS
Cet accompagnement se déroule par téléphone : « Le pharmacien de ville peut appeler ses confrères de Bergonié pour s’informer et se former sur les thérapies, les produits ou les matériels, explique François Martial, président de l’URPS pharmaciens de Nouvelle-Aquitaine. Les échanges sont si importants que nous avons accepté de financer un poste d’interne** pour pérenniser l’accompagnement de nos officines. »
Cette expérience concerne 50 patients/semaine, issus à 50 % de Gironde, mais aussi des Landes, Dordogne, Lot-et-Garonne, Charente, Charente-Maritime. Pour eux, l’URPS organise des réunions dans toute la région pour motiver les pharmaciens à rejoindre la démarche.
« À l’avenir, l’accompagnement des sorties d’hospitalisation par les officines pourrait s’étendre aux pompes portables, thérapies orales, antidouleurs, matériels de stomie, nutrition… suggère Catherine Donamaria. Dans quelques mois, nous passerons aussi à l’e-ordonnance. La prescription de sortie sera alors immédiatement dirigée vers l’officine. »
« La collaboration avec Bergonié est un succès qui va être présenté à l’ARS et aux autres régions en quête de lien ville-hôpital, souligne François Martial. Tout le monde y est gagnant : le patient et son entourage, mieux encadrés et rassurés par un professionnel de santé qui les suit au jour le jour ; le pharmacien qui récupère un nouveau domaine d’expertise (et un nouveau marché, ndlr) ; la Sécurité sociale qui nous a aidés à bien tarifer ces actes, et trouve ici une source d’économies***. »
* Un refus était motivé par le manque de confidentialité de l’officine lors de la délivrance des produits et matériels.
** Poste financé à 50 % par l’URPS pharmaciens et à 50 % par Bergonié.
*** Le recours à des prestataires est souvent pointé par les officines comme une source de dépenses sans beaucoup de mesure.
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