DÉBUT du XXe siècle. La Compagnie anglaise des Indes orientales encourage l’inventaire des remèdes locaux et consigne notamment la racine d’un arbrisseau, tenue comme miraculeuse contre l’envenimation par les cobras : le « bois-serpent » (sarpagandha). Citée, selon certains auteurs, dans le Charaka Samhita, un texte ayurvédique vieux de 2000 ans, elle était vantée par le médecin portugais Garcia da Orta (1501-1568) dans son Cloquios dos Simples e Drogas e Consas Medicinais da India (1563) et fut représentée par le naturaliste hollandais Georges Eberhardt Rumpf (1627-1702) sous le nom de Radix mustaleae dans un traité publié à titre posthume (1755). La plante fut décrite par le botaniste anglais George Bentham (1800-1884) qui la rattacha au genre Rauwolfia, créé par un naturaliste français, Charles Plumier (1646-1704), en hommage à l’explorateur allemand Leonhardt Rauwolf (1535-1596). Son nom est Rauwolfia serpentina.
Tardive reconnaissance par l’Occident.
Malgré plus de trente usages médicaux populaires aux Indes (antalgique, sédatif, fébrifuge, ocytocique, etc.), le rauwolfia ne fut guère étudié avant 1931, année où Salimuzzman Siddiqui (1897-1994), chimiste dans un institut de recherche sur la médecine yunâni de Delhi, en isola cinq alcaloïdes dont l’ajmaline qu’il dédia au fondateur de ce centre, Hakim Ajmal Khan (1863-1927). La même année, deux médecins de Calcutta, Kaviraj Ganath Sen et Kartik Chandra Bose, observèrent sur l’animal que l’extrait de rauwolfia normalisait l’hypertension et induisait une sédation - n’était-il pas administré aux bébés agités dans l’état de Bihar ? -. Un pharmacologue indien formé à Cambridge, Ram Nath Chopra (1882-1973), confirma en 1940 l’action hypotensive d’extraits de la plante mais non celle des alcaloïdes purs alors connus. À partir de 1940, des centaines de milliers d’Indiens furent traités pour hypertension artérielle par la poudre de rauwolfia sous l’impulsion d’un cardiologue de l’hôpital de Bombay, Rustom Jal Vakil (1911-1974). Ce dernier signa la première publication internationale sur le rauwolfia où, en 1949, il synthétisa dix ans d’observations indiennes. Elle attira l’attention de Robert W. Wilkins (1906-2003), un cardiologue américain, qui testa avec succès le rauwolfia à Boston.
Parallèlement, la plante livra son secret. Emil Schlittler (1906-1979) et Johannes Müller du laboratoire Ciba, qui s’évertuaient depuis 1949 à en isoler l’alcaloïde actif - toujours inconnu -, découvrirent en 1951 un composé dont la structure fut élucidée en 1952 par Hugo J. Bein. Testée sur animal, cette « réserpine » se révéla être le principe hypotenseur et sédatif de la plante ! Commercialisée dès 1954 (Serpasil, Serpalan), elle fut toutefois concurrencée par d’autres antihypertenseurs mieux tolérés (elle reste disponible dans certains pays). Le psychiatre américain Nathan S. Kline (1918-1983) confirma les propriétés psychoactives de l’extrait du rauwolfia ; l’index thérapeutique défavorable de la réserpine et la nécessité de l’administrer à forte dose compromirent l’administration de l’alcaloïde aux patients schizophrènes, à une époque où les phénothiazines prenaient leur essor…
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