Cette étude a été présentée dans le cadre d’un atelier de formation organisé lors du Congrès de Montpellier. L’URPS pharmaciens d’Auvergne-Rhône-Alpes (AURA) a adressé des questionnaires détaillés aux 1 743 titulaires installés dans la région et obtenu 360 retours, un taux élevé pour une enquête de ce type, se félicitent ses initiateurs. 44 % des titulaires ayant répondu ont déclaré un « niveau élevé d’épuisement », sachant que 42 % des répondants affirment aussi travailler plus de 50 heures par semaine. 25 % des interrogés parlent d’un épuisement « modéré » et 31 % ne se sentent pas épuisés. Pendant la pandémie, 77 % des pharmaciens en AURA ont pratiqué des tests antigéniques, et 93 % des vaccinations.
Sentiment de frustration
Les pharmaciens ont le sentiment, justifié, de s’investir beaucoup dans leur travail, mais près de 80 % d’entre eux en tirent une satisfaction et se sentent « ragaillardis » par leur proximité avec les patients. Il n’en reste pas moins que 38 % des pharmaciens éprouvent, au moins une fois par semaine, un sentiment de frustration. De même, une majorité de pharmaciens déclare « travailler trop dur » et déplore le poids des « surcharges administratives » dans leur activité.
L’enquête a tenté d'analyser l'impact du mode d'exercice professionnel (titulaire seul ou associé), la constitution des équipes (nombre d'adjoints et préparateurs), la taille des officines et leur implantation, mais n’a pu mettre en évidence de corrélations entre ces différentes variables. Par contre, elle montre que les personnes épuisées sont en général seules et que celles exerçant en milieu rural sont légèrement moins en burn-out. « L'épuisement professionnel des pharmaciens est un phénomène qui semble diffus, et qui peut concerner tous les praticiens », conclut Florence Durupt, secrétaire générale de l’URPS pharmaciens AURA, avant d’ajouter que « la profession s’investit fortement et relève ses nouveaux défis, comme les vaccinations ou l’exercice coordonné, mais est épuisée et a besoin de soutien ».
Des pharmaciens dans le déni
À l’issue de cette présentation, le Dr Magali Briane, psychiatre lyonnaise vice-présidente de l’association « Soutien aux professions de santé » (SPS) est revenue sur la souffrance mentale des pharmaciens. Elle reste difficile à cerner car les officinaux sont souvent dans le déni par rapport à leur état. « Vous êtes en première ligne face à la souffrance des autres, et vous pensez ne pas avoir le droit de souffrir vous aussi », leur a-t-elle expliqué. Elle souligne en outre la charge de la « fatigue compassionnelle », liée au fait d’être exposé toute la journée aux malheurs des autres, sans forcément être formés pour s’en protéger.
Là aussi, la variabilité individuelle est importante mais l’association SPS a reçu au total près de 7 000 appels de professionnels de santé en 2022, dont 3 % émanaient de pharmaciens. La moitié des 419 pharmaciens ayant appelé SPS depuis 2016 exerce en île de France ou en Auvergne-Rhône Alpes. L’URPS pharmaciens AURA souhaite développer des aides en faveur des pharmaciens touchés par le burn-out et la souffrance mentale. Elle a conclu dans ce but un partenariat avec SPS, et élabore avec elle un webinaire sur le thème des agressions à l’officine, dont les conséquences psychologiques peuvent parfois être très lourdes.
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