LE NOMBRE de comprimés de baclofène vendus en 2012 (génériques inclus) a progressé de 52 % par rapport à l’année précédente. « D’après les estimations des laboratoires*, la proportion de l’usage hors AMM dans le traitement de l’alcoolo-dépendance correspond à environ 50 % des ventes de baclofène sur le territoire national », note le comité.
Les doses utilisées sont très « hétérogènes » avec une médiane à 120 mg par jour. « Le profil des prescripteurs reste mal caractérisé, cependant il ressort que les principaux prescripteurs sont des addictologues, psychiatres et généralistes », souligne le CRPV de Grenoble, en charge du dossier.
405 effets indésirables.
Au cours de l’année 2012, 263 cas (93 graves et 170 non graves) correspondant à 405 effets indésirables ont été rapportés dans le traitement des addictions, soit 163 cas de plus que pour l’année 2011. Les types d’effets indésirables le plus souvent rapportés sont : les troubles neurologiques (33,6 %), les troubles psychiatriques (21,2 %) et les troubles gastro-intestinaux (10 %).
« Comparativement à l’augmentation des chiffres de vente (x 1,5), une nette progression des effets attendus a été observée, en particulier pour les effets indésirables neurologiques et psychiatriques », commente le CRPV. Les troubles mnésiques ont par exemple été multipliés par 7, les troubles dépressifs par 10, les syndromes de sevrage par 10, les abus et la dépendance par 8.
« Les signaux dont la surveillance active avait été conseillée dans le rapport précédent, à savoir les troubles mnésiques et l’abaissement du seuil épileptogène en cours de traitement en particulier lors d’alcoolisation, sont confirmés », ajoute le comité.
Nouveaux signaux et nouveau profil.
Le rapport révèle par ailleurs que de nouveaux signaux ont été observés, ce qui selon le CRPV, témoigne d’un « profil d’effets indésirables différent » du baclofène à haute dose prescrit dans le traitement des addictions par rapport à son utilisation dans la spasticité. Ces nouveaux signaux sont : troubles sensitifs et sensoriels (24), erreurs de prise (19), xérostomie (16), insomnie (14), décompensation maniaque (14), accidents (11), syndrome de sevrage sur le mode confusionnel et hallucinatoire se rapprochant du delirium tremens alcoolique (10), sudation excessive (10), abus dépendance (8) et syndrome œdémateux (5).
« D’autres signaux plus faibles émergent » qui « devront faire l’objet d’une surveillance à l’avenir », indique encore le CRPV. Ces derniers sont précisés : hypertriglycéridémie (3), prise de poids (3), troubles anxieux paradoxaux (3), rétrécissement du champ visuel (2), allongement du QT en cas de surdosage (2), diabète insipide en cas de surdosage (2), syndrome d’apnée du sommeil (2 dont 1 à réévaluer).
Le comité évoque les connaissances encore limitées des diverses fonctionnalités du récepteur GBA-B (le baclofène est agoniste des récepteurs centraux et périphériques GABA-B) dont « la pharmacologie est complexe et non élucidée ».
Ainsi, d’un côté des nouveaux effets sont observés alors que d’autres « attendus du fait de la pharmacologie du produit » ne le sont pas, comme les troubles extrapyramidaux, les syndromes des jambes sans repos, le syndrome amotivationnel, l’hémorragie digestive, le syndrome sérotoninergique ou l’abus à des fins dopantes par analogie avec le GHB. Des signaux émergents dans le précédent rapport n’ont pas été confirmés mais « doivent faire l’objet d’une surveillance » (cancers et troubles hématologiques).
Modification des RCP.
Le rapporteur préconise la poursuite de ce suivi national de pharmacovigilance et l’accès à une RTU (recommandation d’utilisation temporaire) qui permettra la mise en place de mesures de minimisation de risques (orientation des patients vers des centres d’excellence, diffusion d’une information de sécurité validée, stimulation de la notification spontanée).
Le comité confirme que cette RTU est en cours d’élaboration et devrait bientôt être finalisée comme l’avait annoncé le Pr Dominique Maraninchi, directeur de l’ANSM, en juin dernier. Le rapporteur suggère aussi que les études de phase 1 et 2 déposées par les laboratoires soient de nouveau analysées afin de voir si des études complémentaires sont nécessaires à doses élevées.
Enfin, il recommande une harmonisation et une actualisation des RCP en indiquant, dans les mises en garde, les risques de décompensation maniaque, de dépression et de passage à l’acte suicidaire ; les effets indésirables comme le syndrome œdémateux, la sécheresse buccale, les troubles anxieux paradoxaux, le syndrome d’apnée du sommeil doivent être ajoutés ; le diabète insipide et l’allongement de QT devront apparaître dans la rubrique « surdosage ».
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