Pr Bruno Lina* : la transmission sexuelle du Zika est possible

Publié le 08/02/2016
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Le Quotidien du Pharmacien. - Zika, dengue chikungunya… tous ces virus ont comme point commun la transmission par un même vecteur, le moustique du genre Aedes. Comment se fait la transmission ?

Pr Bruno Lina. - Au départ ces moustiques s’infectent en faisant un repas sanguin chez une personne qui a le virus dans le sang. Le virus peut ensuite se multiplier dans les glandes salivaires du moustique et lors d’un nouveau repas sanguin, l’insecte injecte dans un autre organisme humain une dose de virus en même temps qu’un anticoagulant. Ce mode de transmission est très stéréotypé : il est le même pour la dengue, le West Nile, le chikungunya, le paludisme. De plus, on pense que, dans certaines conditions, le moustique peut transmettre le virus à sa descendance (infection des œufs), ce qui favorise la diffusion du pathogène.

Outre le moustique, un autre mode de transmission, par voie sexuelle, est suspecté. Qu’en sait-on aujourd’hui ?

Nous sommes encore dans le flou, car le nombre de ces transmissions se compte sur les doigts d’une main. Une infection par transmission sexuelle a été observée en 2008. Il s’agissait d’un scientifique américain infecté à l’étranger qui, de retour chez lui, avait transmis la maladie à son épouse qui ne s’était jamais rendue en zone endémique. Mais, après analyse, on a remarqué que cet homme présentait une hémospermie (du sang dans le sperme, NDLR). On ignore donc si le virus a été transmis par du sang infecté présent dans le sperme, ou par le sperme lui-même. On ignore aussi si l’hémospermie était une complication de l’infection par Zika, ou si elle était préexistante.

Récemment, un autre cas a été découvert à Dallas, aux États-Unis, mais nous ne disposons pas assez d’éléments sur ce cas pour conclure.

Existe-t-il un risque d’explosion de la pathologie par cette voie de contamination ?

Non, car la phase aiguë de l’infection par Zika est de courte durée, comme celle de la grippe. Autrement dit, la présence du virus dans le sang ou dans le sperme ne dure que quelques jours. Alors, si la transmission sexuelle est possible, l’homme ne peut pas être vecteur de la maladie Zika à long terme et répandre le virus dans le monde, comme cela est le cas avec le virus du sida, ou des hépatites, qui sont présents de façon chronique dans le sang.

*Bruno Lina est le directeur du laboratoire de Virologie du CHU de Lyon.
Propos recueillis par Charlotte Demarti

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 3238