LA MAIGREUR augmente le risque fracturaire. L’obésité aussi pour certains sites. Et l’effet du poids ne se limite pas là, selon une étude américaine publiée dans le « British Medical Journal » (BMJ). Dans la grande cohorte internationale Women’s Health Initiative (WHI) suivie plus de 10 ans en moyenne, l’équipe dirigée par le Pr Carolyn Crandall montre que les variations pondérales, à la baisse mais aussi à la hausse, sont associées à un risque augmenté de fractures à la ménopause.
Ces résultats étonnants retiennent l’attention en raison des forces de l’étude, sa taille (plus de 120 000 femmes ménopausées âgées de 50-79 ans à l’inclusion), la durée du suivi (jusqu’en 2013) et de la mesure objective du poids. La perte de poids, définie par une variation à la baisse d’au moins 5 % du poids initial au cours de la troisième année, augmente le risque de fractures par rapport à un poids stable (variation ‹ 5 %), et ce qu’elle soit voulue ou non. Et contrairement à l’idée répandue que le fait de grossir serait protecteur, le constat était bien le même pour la prise de poids (variation à la hausse ≥ 5 % à la 3e année). Grossir augmente le risque de fractures.
Une façon de tomber et l’amorti de la graisse.
Si tout changement de poids expose à faire davantage de fractures, il existe pourtant des différences entre les deux tendances contraires. Pas seulement sur la magnitude de l’effet, qui est plus limitée pour la prise de poids. Les sites anatomiques concernés ne sont pas les mêmes. Par rapport à un poids stable, l’amaigrissement augmente de 65 % l’incidence des fractures de hanche, du membre supérieur et dites « centrales » (hanche, pelvis, colonne vertébrale). Tandis que la prise de poids augmente juste un peu celle des fractures des membres supérieur et inférieur.
Dans un éditorial attaché à l’article, le Pr Juliet Compston, rhumatologue à l’université de Cambridge, rappelle que les femmes obèses présentent un risque augmenté de fracture de cheville, de la jambe et du bras par rapport à celles de poids normal. Pour ce professeur émérite, les raisons de ces effets spécifiques de sites déterminés par l’indice de masse corporelle (IMC) ne sont pas complètement comprises, mais pourraient être liées « à des façons différentes de tomber », aux « forces biomécaniques » différentes chez les obèses et à l’amorti du « capitonnage » des tissus mous. Le changement pondéral pourrait ainsi s’exercer de façon assez similaire aux hypothèses avancées pour le poids absolu.
Un effet variable selon les sites anatomiques.
Une autre distinction importante concerne le caractère intentionnel ou non de la perte de poids. Les maladies graves, à savoir cardio-vasculaires, pulmonaires, rénales, cancers ou diabète, peuvent entraîner une perte de poids non voulue et une ostéoporose. L’étude a montré que, par rapport à un poids stable, l’amaigrissement non voulu était associé à une incidence majorée de 33 % des fractures de hanche et à une incidence augmentée des fractures vertébrales. Les auteurs ont néanmoins tenu à souligner que « les associations retrouvées entre la perte de poids et l’incidence fracturaire ont persisté après ajustement sur le diagnostic de cancer et d’autres comorbidités ». Seule la perte de poids non intentionnelle était associée à un risque augmenté de fracture de hanche.
C’est la première étude montrant que la prise de poids à la ménopause est associée à une incidence fracturaire augmentée. C’est une donnée nouvelle à prendre en compte dans la pratique clinique, les sujets prenant du poids ne sont pas protégés, au contraire. De plus, la perte de poids non intentionnelle supérieure à 5 % expose à un risque fracturaire augmenté. Selon l’éditorialiste britannique, la présence de « ce facteur de risque » justifierait des explorations complémentaires (ostéodensitométrie) avec à la clef un traitement de l’ostéoporose si besoin. Bien sûr, le risque de chutes devrait être recherché et limité, et des conseils alimentaires prodigués.
Prévenir la perte osseuse.
Pour la perte de poids intentionnelle, les « conseils (...) sont plus complexes », toujours selon le professeur émérite de Cambridge, et dépendent « du poids avant et après la perte de poids ». Bien sûr, les bénéfices à attendre d’un amaigrissement chez les femmes obèses ou en simple surpoids dépassent largement le risque squelettique.
S’il faut continuer à encourager les femmes trop enrobées à maigrir, les résultats de cette étude observationnelle suggèrent de réfléchir aux interventions possibles pour prévenir la perte osseuse. L’activité physique avec renforcement musculaire pourrait être l’une d’elles.
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