Cas de comptoir
Le contexte :
« Mon bébé de huit mois a souffert de quelques rougeurs cet hiver, notamment autour des lèvres et sur les joues. Depuis quelque temps ces lésions s’étendent au niveau des plis et perturbent son sommeil. »
Les questions à poser :
« Avec quelle fréquence se produisent les poussées ? Avez-vous remarqué une sécheresse anormale de la peau et des microlésions suintantes ? Quels produits utilisez-vous ? Avez-vous des antécédents familiaux d’atopie ou d’allergie et avez-vous consulté votre médecin ?
Un peu de physiopathologie
À la naissance, la peau du bébé a la même structure que celle de l’adulte, mais elle en diffère par son immaturité et plusieurs raisons expliquent sa fragilité.
- La couche cornée (stratum corneum) est fine et perméable et les cellules manquent de cohésion, ce qui ne permet pas d’assurer une barrière étanche et une intégrité cutanée suffisante d’où une plus grande sensibilité aux agressions.
- Les glandes sébacées se mettent au repos après la naissance. Une séborrhée physiologique persiste quelques mois après l’accouchement mais vers l’âge de trois mois, et jusqu’à la puberté, la peau ne produit plus de sébum. Résultat : elle se déshydrate, se dessèche, se gerce et devient irritable.
- Les glandes sudoripares fonctionnent de façon irrégulière, la peau est moins bien lubrifiée et plus sensible aux agressions climatiques. Ce déficit a pour autres conséquences une mauvaise régulation thermique et un déséquilibre de la flore cutanée.
- La production de mélanine est peu développée ce qui explique que l’exposition solaire est fortement déconseillée avant six mois.
- Le film hydrolipidique est quasi inexistant et peu résistant, il assure mal sa fonction barrière et la peau est sujette aux frottements, aux lésions et aux infections. L’immaturité fonctionnelle de la peau du nourrisson exige une grande prudence dans le choix des actifs et l’utilisation des topiques.
Les mots du conseil
La toilette et les soins quotidiens de bébé doivent se faire avec beaucoup de douceur et le pharmacien doit parfois rappeler à la maman les règles d’hygiène élémentaires et les gestes essentiels concernant le bain, la toilette du corps, le nettoyage du visage, le lavage des cheveux… Lorsque la peau du bébé ne présente pas de problèmes cutanés particuliers, l’application quotidienne de topiques protecteurs a pour but de renforcer la fonction barrière du film hydrolipidique afin d’isoler l’épiderme tout en l’hydratant et en le nourrissant. Certains bobos peuvent être traités facilement, mais d’autres pathologies cutanées, plus ou moins sévères (immunité innée, allergies, intolérance…), nécessitent des soins plus spécifiques. La maman a besoin alors d’être rassurée et conseillée, soit pour prévenir leur survenue ou leurs complications, soit pour soulager les symptômes et limiter leur évolution.
Quels sont les facteurs à prendre en compte en cas de soins spécifiques ?
- L’un des facteurs à prendre en compte est le rapport surface cutanée/poids. Il est trois fois plus élevé chez le nourrisson que chez l’adulte, ce qui augmente la concentration tissulaire d’un actif pour une même surface d’application.
- La finesse de la couche cornée et sa perméabilité augmentent également la biodisponibilité d’un topique, surtout au niveau de la région périanale où les applications sont fréquentes.
- L’occlusion réalisée de façon artificielle (changes), ou naturelle (plis), multiplie par dix la pénétration cutanée.
- Le choix des produits doit tenir compte du pH cutané, proche de la neutralité (pH voisin de 7), alors que celui de l’adulte est compris entre 4,4 et5,6.
- Les applications des produits doivent se limiter à de petites surfaces et de ne pas être trop répétées.
Comment traiter un érythème fessier ?
Il faut toujours compléter la toilette du siège avec une lotion hydratante, en insistant sur les plis à l’aide d’une compresse. Sécher minutieusement les replis de la peau avant d’appliquer une crème isolante, absorbante et cicatrisante, type Bépanthen 5 %, Déflamol, pommade Mitosyl Irritations. Les poudres (talc) collent et irritent la peau au contact des urines et leur accumulation favorise les surinfections.
Que faire lorsqu’il est suintant ?
Utiliser des lotions asséchantes incolores (Cytélium A-Derma, Cicalfate Avène) et recouvrir d’une pâte à l’eau non occlusive formulée avec un mélange de glycérine et d’eau, et renfermant un agent cicatrisant antiseptique, généralement de l’oxyde de zinc (Aloplastine, Éryplast, Klorane pâte protectrice, Pédiatril crème pour le change, Uriage 1er change…).
Comment faire disparaître les croûtes de lait ?
Durant les premiers mois, les sécrétions excessives de sébum peuvent s’accumuler sous forme de pellicules blanches, épaisses et adhérentes sur le visage, le cuir chevelu et les sourcils. Il faut les ramollir le soir avec un soin émollient et kératolytique (ABC-Derm Babysquam, Kélual émulsion, Pediatril gel croûtes de lait, Stelaker…), ou de l’huile d’amande douce et faire un shampooing doux le matin.
Comment reconnaître les dartres et les traiter ?
Ces petites plaques rouges et sèches sont localisées sur le pourtour de la bouche et des joues. Elles sont occasionnées par le froid, le vent et elles sont entretenues par la salivation et la succion de la tétine ou du doudou. Pour les éviter, il suffit d’appliquer tout l’hiver, une crème hydratante ou apaisante et antiseptique à base de cuivre et de zinc ou un cold-cream.
Ma fille est pleine de boutons de chaleur sur le torse et les plis. Que faire ?
Leur origine est due à un excès de transpiration et pour se débarrasser de ces petites vésicules remplies d’un liquide clair, il suffit de baigner bébé plus souvent et d’absorber l’excès de sueur avec du talc ou de la poudre de toilette et de le découvrir le plus possible.
Mon nouveau-né présente de petites vésicules grasses sur le nez, le menton et le front.
Regroupés sous le terme de milliaire sébacée du nouveau-né, ces microkystes résultent d’une rétention de sébum, ils ne nécessitent aucun soin et disparaissent généralement au bout d’un mois.
J’ai observé de petits points blancs sur le nez et le front de mon bébé. Dois-je les percer ?
Surtout pas ! Il s’agit d’acné due à des glandes sébacées momentanément dilatées et les lésions vont régresser spontanément en quelques semaines avec une hygiène minutieuse (chlorhexidine aqueuse). Éviter l’application de crèmes grasses.
Le pédiatre a prescrit à mon fils un dermocorticoïde pour son eczéma, quels autres soins utiliser pour limiter la fréquence des poussées ?
La dermatite atopique ou eczéma constitutionnel implique plusieurs mécanismes complexes et ses caractéristiques sont des démangeaisons intenses, des lésions érythémateuses localisées et une sécheresse constante (xérose) et généralisée. La peau est nettoyée avec un gel surgras (Lipikar, Xéramance, Atoderm moussant…) pour éliminer les débris présents à la surface de la peau ou un gel aseptisant. L’enfant doit être baigné dans de l’eau tiède (35 °C) additionnée d’une huile émolliente (Stélatopia, Oleatum, Topialyse…) ou d’Aveeno Colloïdal poudre de bain. En dehors des poussées, l’épiderme est nourri et hydraté avec des crèmes et des laits émollients. La brumisation d’eaux thermales permet de calmer le prurit (Avène, Uriage, La Roche-Posay, Vichy, Evaux…).
Mon fils présente des croûtes jaunâtres et purulentes sur la lèvre. Est-ce contagieux ?
Les lésions de l’impétigo sont dues à un staphylocoque ou un streptocoque et les bactéries se transmettent par contat direct. Une consultation médicale s’impose et une éviction de la crèche est recommandée momentanément. Respecter une hygiène rigoureuse des mains et couper soigneusement les ongles.
Les produits conseils
Les actifs regroupent principalement des filmogènes, des agents humectants, des substances lipophiles, des agents calmants et adoucissants, des cicatrisants et des vitamines. Certaines gammes de soins, telle « Les Essentiels de Mitosyl », recouvrent l’ensemble de ces propriétés.
Quel est l’objectif des filmogènes ?
Ils jouent le rôle d’isolant physique et ils empêchent l’évaporation de l’eau. Ils forment un film hydrolipidique à la surface de l’épiderme. Ils sont composés de cires (cold-cream ABC Derm, Mustela Bébé, Saint Gervais) ; d’huiles végétales et animales : beurre de karité, insaponifiables de soja, huiles de sésame, de bourrache, d’amande douce, d’onagre (Xéramance huile de bain et nettoyant dermoprotecteur) ; d’extraits de calendula (lait Klorane, gamme Weleda) et d’avoine Rhealba (Dermalibour et Septalibour A-Derma, ligne Exomega).
Quand utiliser les agents lipophiles ?
Les substances lipophiles jouent le rôle de restructurants en s’insérant dans le ciment intracellulaire. Elles renforcent la barrière cutanée en apportant des éléments nutritifs. Les plus courantes sont les céramides et les acides gras essentiels AGE (ligne Xéramance Lutsine, TriXera Avène).
Quels sont les principaux ingrédients utilisés pour hydrater, calmer et cicatriser ?
Les humectants, piégeurs d’eau, fixent l’eau et hydratent durablement la couche cornée : la glycérine est l’actif le plus utilisé (gamme Lipikar La Roche Posay, Atoderm fluide Bioderma, Premier lait Uriage…).
Les apaisants et adoucissants calment les irritations et les rougeurs : allantoïne, alphabisabolol, aloe vera, extrait de bleuet (Mustela Bébé) et de sauge (Saugella émulsion lavante).
Les cicatrisants sont représentés par l’oxyde de zinc, largement utilisé pour les rougeurs du siège, et les dérivés du cuivre et de zinc (Mitosyl Irritations, Atoderm P.O Zinc, crème Cu Zn premiers soins SOS ou spray anti-irritations). Les vitamines sont souvent associées : les vitamines A pour éviter le dessèchement et régénérer l’épiderme ; E pour protéger de l’action des radicaux libres ; F (acide linoléique) pour combattre la sécheresse cutanée ; provitamine B5 pour cicatriser.
Quels produits solaires choisir ?
Les cosmétiques solaires pour enfant obéissent aux normes de la Commission européenne mais ils n’ont pas de réglementation particulière. Le choix tient compte du SPF (indice de protection contre les UVB 50 ou 50 +) et le ratio entre la protection UVA et UVB (au moins égal à un tiers), assorti des mesures classiques de protection vestimentaire, d’hydratation, d’applications renouvelées. La présence d’agents surgraissants et une bonne résistance à l’eau sont des atouts supplémentaires. Une texture épaisse et visible permet de s’assurer qu’aucune zone n’a été oubliée.
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Françoise Amouroux
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